Imágenes de páginas
PDF
EPUB

AN. 361.l'envoya en exil à Verceil; & ce qu'il y eut de plus honteux, c'étoit la datte des actes de fon procés. Les interrogatoires, par exemple, commençoient ainfi : Sous le confulat de Taurus & de Florentius, Taurus étant amené par les scrieurs publics. La mort d'Urfulus comte des largeffes, c'eft à dire grand treforier, fut la plus odieufe: car il avoit foutenu Julien dans les Gaules, lui faifant fournir par les treforiers des lieux tout l'argent qu'il demandoit: contre les ordres de Conftantius, qui ne vouloit pas qu'il eût de quoy donner aux troupes. Auffi Julien voyant les reproches & les maledictions que lui attiroit cette mort, fut reduit à la défavoüer. D'autres furent aprouvées de tout le monde: principalement celle de l'eunuque Eufebe prefet de la chambre de Conftantius; cet Arien fi paffioné: car il fut auffi condamné & executé à mort.

Amm. XXII.C.4.

Secr.111.C. 1.Litan.

292.

Greg.Naz. Plufieurs Chrétiens furent envelopés dans cetr.3.p. 75. te recherche & dans la reforme des officiers du palais imperial, que Julien chaffa, fous pretexte d'en bannir le luxe & de vivre en philofophe. 'Il demanda un jour un barbier pour lui faire les cheveux: era.10.p. car pour fa barbe il affectoit de la laiffer croître. Le barbier de Conftantius fe prefenta vêtu magnifiquement. Julien en fut furpris, & dit: J'ay demandé un barbier, & non pas un fenateur. Il s'informa de ce que lui valoit fa charge, & trouva qu'il avoit par jour vingt rations de pain & autant de fourage pour fes chevaux, & par an de gros gages fans les graces extraordinaires. Cela fut caufe qu'il chaffa tous les barbiers, tous les cuifiniers & les autres officiers femblables, difant qu'ils ne lui étoient point neceffaires; & particulierement les eunuques, parce qu'il n'avoit plus de femme. Il eft certain que la moleffe étoit exceffive à la cour de Conftantius, foit pour les habits d'or & de foye, foit pour la délicateffe des tables. Il y avoit juf

Jul. ad

Athen p.

504.

qu'à

[ocr errors]

qu'à mille barbiers & autant de cuifiniers: coux qui verfoient à boire & fervoient à table étoient encore en plus grand nombre. Plufieurs officiers de cette cour avoient abufé de leur fortune: mais on les accufoit entre autres chofes de s'être enrichis des dépouilles des temples des idoles.

II.

Julien ayant ainfi reduit le palais en folitude: le remplit de philofophes, de magiciens, de de-Philofovins & de charlatans de toutes fortes. Un des phes appremiers qu'il manda fut le philofophe Maxime AN. 362. qui étoit en Afie avec Chryfanthe. Ayant re-Eunap.in ceû la lettre qu'il leur écrivoit à tous deux, ils Max. p.90. confulterent leurs dieux avec tout l'art & la circonfpection qu'ils purent employer: mais ils ne rencontrerent que des prefages funeftes. Chryfanthe épouvanté de ce qu'il voyoit, dit à Maxime: Mon cherani, je pretens non feulement mourir ici, mais me cacher fous terre, fi je puis. Maxime répondit: Il me femble Chryfanthe que tu as oublié la doctrine que nous avons aprife. Les Hellenes parfaits ne doivent pas ceder à ce qu'ils rencontrent d'abord, mais forcer la nature divine de venir à eux. Peut-estre, reprit Chryfanthe, es-tu affez habile & affez hardy pour le faire: pour moy je ne puis combattre de tels fignes; & ayant ainfi parlé il fe retira. Maxime continua d'employer tous les fecrets de fon art, jufqu'à ce qu'il eut trouvé ce qu'il defiroit. Il partit, & toute l'Afie fe mit en mouvement pour lui faire honeur: les peuples accouroient en foule à fon paffage avec leurs magiftrats à la tefte: Les femmes mêmes s'empreffoient de faire leur cour à la fienne. Quand il arriva à C. P. l'empereur é- Amm. toit au fenat & y parloit: mais fi-tôt qu'il aprit la xx11.c.7. nouvelle que Maxime étoit venu; il oublia fa dig- Liban. ora. nité & la bien-feance: il courut au devant de 10.p.299.B toute fa force, loin au delà du veftibule, l'embraffa & le baifa comme auroit fait un particulier,

AN. 362. & le fit entrer dans le fenat, quoi qu'il ne fût Ennapp. point fenateur. L'empereur s'appliquoit avec

93.

182.

Maxime à confulter les dieux, y paffant non feulement le jour, mais la nuit. Ce philofophe l'obfedoit de telle forte, qu'il fembloit le gouverner, lui & tout l'empire. Enflé de cette faveur, il commença à s'habiller plus mollement qu'il ne convenoit à fa profeffion, & devint plus rude & plus difficile à ceux qui l'abordoient. Mais l'empereur ne s'apercevoit pas de ce change

ment.

Prifcus que l'empereur fit auffi venir de Gréce, ufa plus moderément de fa fortune. Chryfanthe étant encore appellé avec de preffantes inftances, confulta les dieux, & trouvant toûjours d'auffi mauvais prefages, iltint ferme & demeura à Sardis. L'empereur le fit fouverain pontife Eunap.ibid. Chryf. de Lydie & fa femme fouveraine preftreffe. Chryfanthe prévoyant la revolution prochaine, foit par magie, foit par prudence naturelle, ufa moderément du pouvoir que lui donnoit cette charge. Il ne fe preffa point comme les autres de relever les temples, il ne maltraita point les Chrétiens inutilement: mais il fe conduifit fi doucement, qu'on ne s'aperceut prefque pas en Lydie du rétabliffement des facrifices, ni de leur fupreffion qui fuivit de prés. Julien mandoit auffi avec un grand empreffement plufieurs de ceux qu'il avoit connus dans les écoles d'Afie, & leur enfloit le cœur par des promeffes magnifiques: Mais quand ils étoient arrivez, il les payoit de belles paroles, les appelloit fes compagnons, les faifoit quelquefois manger à fa table, beuvoit à leur fanté, & les renvoyoit fans rien faire. Ily eut toutefois plufieurs reteurs & plufieurs fophiftes à qui il donna des charges & des gouvernemens: leur credit croiffoit de jour en jour, & leurs efperances encore plus.

Au

Au milieu de cette troupe de philofophes, le AN. 362 nouvel empereur vivoit lui-même en philofophe, & en portoit les marques exterieures, particulierement la barbe. Conftantius la lui fit couper en le faifant Cefar, car les Romains fe rafoient alors: mais il la reprit quand il fut le maître. On le voit par fes médailles : toutes celles où il eft nommé Cefar font fans barbe ; & dans la plûpart de celles qui lui donnent le titre d'Augufte, il porte la barbe longue autant que la pouvoit avoir un homme de trente ans: car il n'en Sup. lv. avoit pas davantage quand il parvint à l'empire. xi.n. Ir Il fe difoit Grec; affectoit d'imiter les Grecs, comme plus fçavans que les Romains; & tout Mifupag. ce que nous avons de fes écrits eft en grec. Enfin il fe piquoit de rétablir dans fa perfection l'Hellenifme, c'eft à dire les mœurs des anciens Grecs ; & particulierement leur religion. Car le nom d'Hellenes fignifioit alors les payens, Sup. liv.sv tant chés les Chrétiens que chés les payens eux

mêmes.

T

106.

[ocr errors]
[ocr errors]

l'idolatrie.

Le rétablissement du paganisme fut donc le premier foin de Julien fi-tôt qu'il fe trouva le Rétablifmaître. Il donna des ordres exprés pour ouvrir fement de les temples, pour reparer ou rebâtir ceux qui Amm. étoient démolis. Il leur attribua de grands reve+ xxII. c. S. nus: il fit redreffer les autels, il renouvella les Liban ora. facrifices & les anciennes ceremonies de chaque 10. p. 89. 290. &... ville. On le voyoit lui-même en public offrir Suz. V.C.3 des victimes & des libations; il honoroit tous les miniftres de la religion profane: les facrificateurs, les hierophantes, ceux qui communiquoient les myfteres, les gardiens des idoles & des temples. Il rétablit leurs penfions, & leur rendit les honeurs, les privileges & les exemptions qui leur avoient été accordées par les anciens rois. Auffi vouloit-il qu'ils obfervaffent exacte-ment l'abstinence fuperftitieuse de certaines viandes,

A S

AN. 362. des, & les purifications exterieures prefcrites par leur religion.

B.

Greg. Naz. Ceux qui prétendoient favoir fon fecret, dier. 3. p. 70. foient qu'il avoit commencé par effacer fon baptême avec le fang des victimes, oppofant à nos faintes ceremonies celles que les payens croyoient leur fervir d'expiation; & prenant dans fes mains les entrailles des animaux immolés pour les purifier de l'euchariftie qu'il y avoit receuë. Comme il étoit curieux obfervateur des entrailles des victimes on dit qu'un jour il y vit une croix couronnée, c'est à dire environnée d'un cercle. Tous les affiftans en furent épouvantés : mais l'arufpice qui préfidoit à cette action, dit que ce cercle qui entouroit la croix, marquoit que les Chrétiens étoient pris & enfermés de toutes Prudent parts. Une autre fois comme il facrifioit pluapotheof. fieurs vaches à Proferpine, le facrificateur s'éV.450. cria que les ceremonies ne pouvoient avoir leur

[ocr errors][ocr errors][merged small]

effet, & qu'elles étoient empêchées par la prefence de quelque Chrétien: demandant que l'on fit retirer ceux qui avoient été lavés & oints, d'eft à dire qui avoient receu le baptême. L'empereur effrayé regarda de tous côtés, & reconque c'étoit un jeune homme de fes gardes. Celui-ci ne le nia pas, il jetta fa demie pique ornée de pierreries & fe retira, laiffant l'empereur & le pontife en defordre.

nut

Julien fit dreffer à C. P. l'idole de la fortune dans la principale bafilique, & lui facrifia publiquement, comme au genie de cette ville, d'où Conftantin avoit banni l'idolatrie. Comme il facrifioit à cette idole, Maris évêque de Calcedoine lui reprocha publiquement fon impieté & fon apoftafie. Julien fe contenta de lui dire qu'il étoit aveugle: car fa veuë étoit affoiblie par fon grand âge, & on le menoit par la main. “Et ton Dieu Galiléen, ajoûta-t-il, ne te guerira pas.

Ma

« AnteriorContinuar »