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ni Bouchardon, dont la mort a précédé de quelques années la découverte de cette pierre, n'ont pû en avoir aucune connoiffance, cependant l'un & l'autre de ces deux grands hommes ont employé dans quelques - uns de leurs ouvrages une figure d'enfant, qui par rapport à l'ensemble, au choix de la nature, & à l'expreffion, ne s'éloigne pas infiniment de celle que l'on voit ici. Le premier s'en eft fervi pour repréfenter l'Amour auprès de Vénus, dans un deffein d'après lequel Marc-Antoine a gravé une excellente eftampe. Le fecond l'a placée dans un des bas-reliefs de la Fontaine que la Ville à fait construire dans la rue de Grenelle au Fauxbourg Saint-Ger main. Cette rencontre heureuse ne peut avoir été produite que par l'eftime finguliere, & l'étude conftante que ces deux Artiftes modernes ont fait de l'Antique, ils en ont été pénétrés, dès-lors il ne paroîtra pas étonnant qu'ils ayent pu penfer de la même façon que les Anciens, & difpofer quelques figures de la même maniere. Rien n'est plus capable de leur faire honneur, & ne prouve davantage l'utilité d'une étude dont on peut retirer de fi grands profits.

a

J'aurois peu de chofe à dire fur le fujet de cette gravure, je n'y trouve rien d'affez particulier, & qu'on ne rencontre fréquemment fur des monumens du même genre,

Les Grecs paffionnés pour la Poëfie, & pour la Mufique, ont multiplié le Type de la Divinité qui préfidoit à ces deux Arts; le Dieu de l'Harmonie cft ici représenté prefque nud, & couvert feulement dans la partie inférieure d'une draperie légere qui fert à nourrir le bas de la figure, & à lui procurer ce trait piramidal que l'oeil voit avec un fi grand plaifir. Ses proportions approchent de celles d'une belle femme, & par cette raifon les hanches font tenues un peu larges, ce que les Anciens ont obfervé toutes les fois qu'ils ont voulu repréfenter Apollon & Bacchus, perfuadés que l'une &

l'autre de ces Divinités doivent participer aux beautés particulieres des deux fexes. Cet Apollon foutient fa Lyre de la main droite, & ce qui demandoit beaucoup d'intelligence par la difficulté qu'il y avoit à exprimer cette action en creux, la partie du bras qui paffe derriere la Lyre, fe defline fans aucune confufion, & le céde à l'instrument.qui cft plus avancé, le bras gauche fe porte vers un Génie, qui voulant fe faire le plus grand qu'il eft poffible, en s'élevant fur la pointe des pieds, préfente au Dieu l'archet qui lui eft néceffaire, pour charmer les oreilles par le mérite de fa Lyre. La figure d'Apollon eft belle, mais celle de l'enfant lui eft peut-être encore fupérieure par la fineffe de fon expreffion, & par fon mouvement naturel & bien suivi.

Cette pierre appartient à M. Mariette, qui a bien voulu lui donner place dans ce Recueil.

No. II.

M. le Chevalier Bastia de la Houze, qui eft poffeffeur du beau Socrate que j'ai fait graver dans le Vol. VI. Pl. XLIII. eft également maître de cette belle Hyacinte gravée en creux, & qui repréfente un Athlete, il eft nud, comme Apollonius en difputant avec les Gymnofophistes Egyptiens, difoit qu'il devoit être, c'est-à-dire, comme Hercule étoit dans le premier combat, dont tous les Philoftrate vit. autres n'ont été qu'une fuite. Cet Athlete eft couronné. Apol. Liv. VI. Pindare en parlant des jeux, a dit que les hommes de cette profeflion n'avoient aucun autre objet que cette Couronne, & ces Couronnes étoient variées felon les différens exercices. Ces faits font trop connus pour infifter, il fuffit de les rappeller aux Lecteurs. On fçait encore que dans le commencement de l'inftitution des jeux de la Grece, ces Couronnes étoient formées par les plantes naturelles, & que les Grecs étant devenus riches, le luxe fuccéda à la fimplicité, & qu'on les fit de métal & même d'or. Pindare en parlant des Couron

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nes d'Olivier données aux jeux Olympiques les appelle. Od. II. Olymp. Xpuoias Exatas, Olivier d'or. Platon dans le XIIe Livre de legibus, ajoute qu'un des priviléges des Athletes étoit de porter cette Couronne à leur volonté, quand ils l'avoient une fois reçue des Juges, & c'est par cette raison que les Athletes après avoir été couronnés étoient nommes Στεφανίτας.

L'Athlete repréfenté fur cette pierre tient dans une main la palme, qui étoit un autre prix que l'on accordoit à ces vainqueurs ; fi nous nous en rapportons à Plutarque dans la vie de Théfée, la premiere palme lui fut donnée au combat de Delos ; d'autres prétendent que le Laurier & la Palme parurent la premiere fois dans les jeux Pithiens, donnés à l'honneur d'Apollon, auquel ces deux arbres étoient confacrés.

Toutes les pierres qui portent le nom du Graveur Grec font précieufes, à plus forte raifon quand le nom de cet Artiste n'eft point connu. Celui de KAC Phocas paroît ici pour la premiere fois, du moins je le crois, & c'est encore un des mérites de cette belle pierre, dont je dois l'empreinte & l'explication au Pere Pacciaudi.

N°. III.

Ce monument paroît très-peu intéreffant, mais comme il ne faut pas juger par l'extérieur, on verra qu'il n'eft rien moins que ce qu'il paroît.

Il rappelle en premier lieu que le Cochon (a) a été une des premieres Divinités de la Créte. Celui-ci à été

( a ) Athenée Liv. IX. Pag. 375, rapporte d'après Agathocle le Babilonien, que le Cochon étoit un animal facré chez les Crétois, parce qu'ils croyoient que Jupiter avoit été allaité par une Truye. Ils avoient pour cet animal une extrême vénération. Les Praifiens, peuples de Créte, immoloient des Cochons, & ce facrifice avoit été ordonné par les Loix qui leur prefcrivoient cette Vic

time.

Eneid. liv. 3.

V. 401.

trouvé dans les ruines d'une ancienne Ville de cette Ifle fameufe, fituée dans les terres à l'extrêmité Orientale, vis-à-vis d'Ilanus, elle fe nommoit Lyctius. Suivant Etienne de Byzance, elle tiroit fon nom de Lyctus, fils de Lycaon, qui, felon les apparences, en fut le Fondateur. D'autres croyent qu'elle étoit appellée Lyctus, parce qu'elle étoit fituée fur une élévation. Virgile la regarde comme la patrie d'Idomenée.

Et falentinos obfedit milite campos

Lydius Idomeneus.

Cette Ville, au rapport de Strabon, tenoit le premier rang dans l'Ifle de Créte avec celles de Coros, de Gortyn & de Sydoni, elle avoit Cheronese pour fon port de Mer. Polybe & Strabon font perfuadés qu'elles étoient Colonies des Lacédémoniens. On peut voir dans le dernier Auteur une difcuffion affez longue fur le parallele des mœurs des Lytiens & des Lacédémoniens leurs fondateurs. Cette Ville fut détruite par les Cnoffiens, & fes habitans fe retirerent dans la ville de Lampaum; elle fut fans doute rebâtie dans la fuite, car fous les Empereurs Grecs elle étoit du nombre des Evêchés de Créte. Cet Evêché a été fupprimé depuis, car on ne le trouve plus parmi les treize actuels de Candie.

Cette idée générale du lieu qui nous a fourni cette Divinité qui n'eft pas commune à rencontrer, ou plutôt ce Cochon de bronze, m'a rendu fort agréable le préfent que m'en a fait M. Peyffonel, qui me l'a apporté de Candie. Il est très-bien confervé, à la réserve des

deux pieds de derriere. On ne peut douter que cet animal n'ait été modelé d'après la nature, & par un habile homme, mais en même-temps qu'il n'ait été réparé par un Artiste d'un mérite inférieur. Ce petit morceau d'antiquité me fournit une autre obfervation.

mais

Il a été trouvé à Lyctius, comme je l'ai dit par un Turc, qui a réfifté pendant trois ans aux follicitations réitérées de M. Peyffonel, alors Conful de

France à la Canée, qui vouloit en faire l'acquifition pour m'en faire préfent, comme il a fait dans la fuite. Pourroit-on fe perfuader que ce Turc, qui n'étoit pas, ce que l'on appelle parmi nous un Philofophe, qui croyoit très-néceffairement à fa Religion, malgré la défenfe expreffe de l'Alcoran contre les images, malgré l'horreur qui lui étoit inspirée dès l'enfance contre le Cochon, que ce Turc, dis-je, eut attaché une vertu fecrette à ce monument, & que dominé par une fuperftition fi étrangere, il ait réfifté autant de temps à l'appas du gain, qui a tant de pouvoir fur l'efprit de ce peuple; enfin qu'il ait aimé mieux fe livrer à l'anathéme de fa Loi, que de fe féparer de ce qu'il regardoit fans doute comme un Talisman. J'avoue que plus je connois le pays, & plus j'en fuis étonné, rien n'eft cependant plus véritable que ce fait, la fuperftition fe perfuade donc d'elle-même, & n'a befoin ni d'excufes ni d'exemples pour s'établir & fe détruire. Ainfi l'homme dans tous les temps a eu plus de penchant pour les fables que pour la vérité reçue. Quand la nature brute & fans culture préfente de pareilles inconféquences, on doit gémir fur la mifére de l'efpece humaine, & plaindre fon aveuglement.

N°. IV.

Cette Agathe onyce de deux couleurs, de la plus belle matiere & du plus beau travail, eft cependant plus défagrêable par l'inutilité de fon fujet qu'aucune que j'ai vu. Ce bas-relief auquel on ne peut refufer le titre de beau, représente fur une de fes extrêmités un colier compofé de trois perles rondes, & terminé de chaque côté par des rubans pendans. On voit dans le champ un grand E, que l'on peut regarder comme l'initial de EPTON opus au bas de la longueur de la pierre, car elle eft formée en quarré long, on lit XPYCOY. N. que je crois le nom de l'Artiste ; nommé apparemment Chryfes. Il y a un point

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