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leufe, & pour ôter tout fujet de critique, Barcas auroit dû tout hazarder, s'il le pouvoit fans rifquer un pofte qu'il lui importoit fi fort de conferver: or il est probable qu'il y avoit plus de fuites fàcheufes à craindre en l'abandonnant qu'en perdant le convoi. Outre qu'il n'étoit pas affuré de le rencontrer, il s'exposoit à un péril évident de tomber fur la route des Romains, qui fe fuffent trouvés fi fupérieurs à lui, qu'il ne pouvoit éviter d'être battu. Pour moi je crois qu'il fit beaucoup plus prudemment de conferver fon pofte, que de s'exposer à le perdre & à fe faire battre, s'il rencontroit plutôt l'ennemi que le convoi; & s'il fût arrivé plus tard, il l'eût trouvé battu & diffipé, fans pouvoir éviter d'être défait lui-même. Ajoutez à tout ce que je viens de dire, que non feulement le même vent qui pouffoit Hannon à Eryce, lui étoit contraire pour le joindre; mais qu'il étoit encore très-incertain, fi fuivi du victorieux, & obligé de gagner Eryce, il y trouveroit un azile; car les Romains n'euffent pas manqué d'attaquer cette ville en fon abfence, la trouvant affoiblie par le détachement des troupes qu'il auroit été obligé d'en tirer pour aller au fecours. Je conclus de là qu'il fit fort bien & fort prudemment de refter dans fon pofte, car s'il l'eût perdu les conditions de la paix cuffent été bien moins fupportables aux Carthaginois qu'elles ne le furent. Quoiqu'il en foit de cette conduite de Barcas, il n'y a perfonne du métier qui ne convienne, qu'elle fe peut plus pleinement juftifier que celle de deux Amiraux de nos jours. Le fait est très-propre à mes remarques, rapportons - le à quelques circonstances près que nous écarterons, pour imiter le Jefuite Hote, beaucoup plus politique que moi, lorfque certains faits peuvent incommoder certaines gens, qui n'aiment pas qu'on leur mette devant les yeux ce qu'ils s'imaginent que tout le monde ignore.

Le combat de la Hogue a fait trop de bruit dans le monde pour être ignoré, c'est une époque très-remarquable: l'on peut dire que nous fùmes malheureux, mais non pas vaincus, de l'aveu même de nos ennemis. Le Roi fupporta plus conftamment la perte de quatorze vaiffeaux, qui faifoient ce qu'il y avoit de plus redoutable dans notre marine, que ne fit Augufte celle de fes légions les plus favorites. Nous ne férons que gliffer fur ce combat, notre deffein étant d'en rapporter feulement les circonftances les plus capitales, & de les accompagner de quelques remarques, qui ne feront peut-être pas inutiles.

Jamais la France n'arma fi puiffamment que cette campagne, & ne fe fervit moins de fes forces. Le projet étoit une defcente en Angleterre; nous avions vingt mille hommes fur la côte tout prets à s'embarquer, & le Roi Jacques à la tête, que la mauvaise fortune n'abandonna jamais. Le Comte de Tourville étoit à Breft, un des premiers hommes de mer & des plus déterminés que la France ait eu. Il n'attendoit pour fe mettre en mer, finon que l'efcadre du Comte d'Etrées, qui venoit de Toulon à Breft, fût arrivée; elle arriva en effet fort peu après le départ du Vice-Amiral, elle eût dû ne point relacher, elle relâcha pourtant, & la raifon m'en eft inconnuë.

L'avis de Tourville étoit de ne pas démarrer que l'efcadre de la Méditerranée ne l'eût joint. Il n'avoit que quarante-quatre vaiffeaux de ligne contre quatre-vingt-huit de même force de la flotte combinée des Anglois & des Hollandois, qu'il étoit dangereux d'attaquer avec des forces fi médiocres; mais comme cet Amiral avoit des ordres précis de la Cour de mettre à la voile fans délai ni excufe, il fallut qu'il s'y foumit. On ne fait que penfer d'une conduite fi impatiente. On prétend que nous avions une intelligence toute formée dans la flotte Angloife, dont la plus grande partie devoit se tourner de notre côté. Je ferois prefque tenté de le croire, par les ordres donnés au Maréchal; car comment fe peut-il que quarante-quatre vaiffeaux aient ordre d'en attaquer quatrevingt-huit, fi l'on n'eût compté fur quelque complot? S'il y en avoit un, il étoit donc double. Quoiqu'il en foit, M. de Tourville trouva les ennemis dans la Manche, qui Tome I.

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lui venoient au-devant. Le combat fut des plus furieux, des plus vifs & des plus obftinés, & tel qu'il ne s'en eft guéres vû de femblable fur mer. II dura depuis dix heures du matin du 29. Mai, jufqu'à dix du foir, fans que la nuit eut été capable de le finir, dit l'Hiftorien de Louis XIV. L'Amiral François fe retira bravement fans avoir perdu un feul vaiffeau. Une fi belle action ne méritoit-elle pas de finir heureusement & glorieufement? Je l'aurois fouhaité en faveur de nos ennemis mêmes, & de tout mon coeur pour l'intérêt de la vertu, fi ces ennemis euffent été à la place du Comte de Tourville, & qu'ils fe fuffent rencontrés dans une fituation toute femblable, & commandés par un homme d'un courage & d'une conduite égale. Ce brave Vice Amiral, dont la foibleffe ne fembloit pas permettre le moindre équilibre contre des forces si supérieures, car le nombre des vaiffeaux fait tout, ou devroit tout faire dans les combats de mer; parce que celui qui outrepaffe les aîles de fon ennemi les double fans peine, & cependant cet avantage ne fervit de rien à nos ennemis, c'est ce qu'on trouva de fort furprenant: ce brave Vice-Amiral, dis-je, fe retire pourtant par une retraite, qui pouvoit être mise au nombre des plus belles & des plus célébres, fi la mauvaise fortune, plutôt que la valeur de nos ennemis, ne fe füt mêlée de nos affaires. La marée nous manqua, parce que ce combat fe donna fort près de terre; cet accident nous fit perdre quatorze vaiffeaux prefque tous du premier rang, qui furent brûlés ou coulés bas à Cherbourg & à la Hogue, & l'on peut dire que fans ce malheur, qui nous fit abandonner la mer & notre marine fans beaucoup de fujet, nos ennemis fuflènt fortis très-honteux & trèsmortifiés de cette affaire.

La Cour de France n'eût-elle pas agi plus prudemment de marquer un peu moins d'impatience, & de jouer au plus fùr? L'efcadre de la Méditerranée étoit en mer depuis long-tems, & c'eft par cette feule raifon qu'il falloit l'attendre à Breft, ou lui aller au-devant. Cette jonction étoit bien plus facile & plus affurée que celle de Barcas avec Hannon, puifque le premier avoit les forces de terre des Romains fur les bras, qui ne lui permettoient pas de s'affoiblir fans une extrême imprudence. Nous trouvions-nous dans ce cas? Il s'en faut bien, puifqu'il nous étoit libre de faire tout ce qui pouvoit aider à notre entreprife; au lieu que nous hazardons témérairement & imprudemment une partie de nos forces, lorfqu'une attente de peu de jours nous met en état de combattre avec le tout; car puifqu'il s'en fallut de fort peu que les ennemis ne fuffent battus avec cette moitié de nos forces, on peut s'imaginer en quelle paffe nous aurions été, & à quoi nous devions nous attendre, fi l'cfcadre de Toulon fe fût trouvée de la partie: jamais victoire n'eût été plus complette: cela fait voir combien les braves hommes font malheureux, lorfqu'ils fe voient forcés par des ordres fupérieurs de fe livrer à certains genres d'attaques, où quelque expérimenté & habile que l'on foit, & quelque parti que l'on prenne, on donne lieu à fon ennemi de s'applaudir de fon triomphe bien ou mal fondé.

J'ai ouï dire à des Officiers qui s'étoient trouvés dans cette affaire, & très-capables d'en bien juger, que le Comte d'Etrées, aujourd'hui Maréchal de France, auroit pû joindre fon Vice-Amiral, s'il n'eût relâché & refté à Breft; mais fait-on quels étoient fes ordres? Sufpendons done notre jugement: car pour la poffibilité de la jonction on ne la met pas en queftion, elle étoit manifefte: du moins au fentiment de ceux qui en favent plus que moi. Barcas fit peut-être bien de n'aller pas au-devant du fecours qui lui venoit de Carthage. On comprend, par ce que dit notre Auteur, qu'il lui étoit impoffible, & qu'il fit bien par cela feul qu'il ne le fit pas. Je puis décider fur celuici fans craindre que l'on m'en blâme; mais ce feroit témérairement à l'égard de l'autre, brave, entendu & courageux, comme chacun fait, & comme il l'a fait voir en tant d'occafions; il falloit qu'il eût de bonnes raifons pour refter où il étoit. Ainfi fans

décider s'il fit bien ou mal, & fi ses raisons étoient bonnes ou mauvaifes, je me contente de dire qu'il n'est pas probable qu'elles fuffent mauvaises, comme il n'eft pas probable qu'Amilcar Barcas eût laiffé échaper l'occafion de fauver fon convoi, s'il lui eût été poffible de le faire.

CHAPITRE XIV.

Traité de paix entre Rome & Carthage. Réfléxions fur cette guerre Sort des deux Etats après la conclufion de la paix.

A Carthage on fut fort furpris quand la nouvelle

y

vint que

Han

non avoit été battu. Si pour avoir fa revanche, il n'eût fallu que du courage & une forte paffion de l'emporter fur les Romains, on étoit autant que jamais difpofé à la guerre. Mais on ne favoit comment s'y prendre. Les ennemis étant maîtres de la mer, on ne pouvoit envoier de fecours à l'armée de Sicile: dans l'impuiffance où l'on fe voioit de la fecourir, on étoit forcé de la livrer, pour ainfi dire, & de l'abandonner. Il ne reftoit plus ni troupes, ni Chefs pour les conduire. Enfin on envoia promtement à Amilcar, & l'on remit tout en fa difpofition. Celui-ci fe conduifit en fage & prudent Capitaine. Tant qu'il vit quelque lueur d'efpérance, tout ce que la bravoure & l'intrépidité pouvoient faire entreprendre, il l'entreprit: il tenta, autant que Général ait jamais fait, tous les moiens d'avoir raifon de fes ennemis. Mais voiant les affaires défefpérées, & qu'il n'y avoit plus de reffources, il ne penfa plus qu'à fauver ceux qui lui étoient foumis, prudent & éclairé, il céda aux conjonctures préfentes, & dépêcha des Ambaffadeurs pour traiter d'alliance & de paix. Car un Général ne porte à jufte titre ce beau nom, qu'autant qu'il connoît également, & le tems de vaincre, & celui de renoncer à la victoire. Lutatius ne fe fit pas beaucoup prier, il favoit trop bien à quelle extrémité il étoit lui-même réduit; & combien cette guerre étoit onéreufe au peuple Romain. Elle fut donc terminée cette guerre à ces conditions: Que fous le bon plaifir du peuple Romain, il y auroit alliance entre lui & les Carthaginois, pourvû que ceux-ci fe retiraffent de toute la Sicile; Qu'ils n'euffent point de guerre avec Hiéron; Qu'ils ne priffent point les armes contre les Syracufains, ni contre leurs alliés; Qu'ils rendiffent aux Romains fans rançon tous les prifonniers qu'ils avoient faits fur eux; Qu'ils paiaffent aux Romains pendant vingt ans deux mille deux cens talens Eubéens d'argent. Ce traité ne fut pas d'abord accepté à Rome; on envoia fur les lieux dix perfonnes pour éxaminer les affaires de plus près. Ceux-ci ne changérent rien au gros de ce qui avoit été fait, mais ils étendirent un peu plus les con

Réfié.

xions

guerre.

ditions. Ils abrégérent le tems du paiement, ajoutérent mille talens à la fomme, & éxigérent de plus que les Carthaginois abandonnaffent toutes les Illes qui font entre la Sicile & l'Italie.

Ainfi finit la guerre des Romains contre les Carthaginois pour la Sifur cette cile, après avoir duré pendant vingt-quatre ans fans interruption; guerre la plus longue, la moins interrompue, & la plus grande dont nous aions jamais entendu parler, guerre dans laquelle, fans parler des autres exploits que nous avons rapportés plus haut, il fe livra deux batailles, dans l'une defquelles il y avoit plus de cinq cens galères à cinq rangs, & dans l'autre près de fept cens. Les Romains en perdirent fept cens, en comptant celles qui périrent dans les naufrages, & les Carthaginois cinq cens. Après cela ceux qui admirent les batailles navales & les flottes d'Antigonus, de Ptolomée & de Démétrius, pourront-ils, fans une furprise extrême, réfléchir fur ce que l'Hiftoire nous apprend de cette expédition? Si l'on compare les Quinquerémes dont on s'y eft fervi avec les Trirémes que les Perfes ont emploiées contre les Grecs, & celles que les Athéniens & les Lacédémoniens ont équipées les uns contre les autres, on conviendra qu'il n'y eut jamais fur mer des armées de cette force. Ce qui prouve ce que nous avons avancé d'abord, que quelques Grecs affurent fans raison que les Romains ne doivent leurs fuccès qu'à la fortune & à un pur hazard. Après s'être formés aux grandes entreprises par des expéditions de cette conféquence, ils ne pouvoient rien faire de mieux que de fe propofer la conquête de l'univers, & ce projet ne pouvoit manquer de leur réuffir.

Quelqu'un me demandera peut-être d'où vient que maîtres du monde entier, & par conféquent plus puiffans qu'ils n'étoient alors, ils ne peuvent plus équiper tant de vaiffeaux, ni mettre en mer de fi nombreufes flottes, Nous éclaircirons cette queftion, lorfque nous en viendrons à l'explication de leur gouvernement. C'eft une matiére dont on ne doit parler qu'exprès, & qui mérite toute forte d'attention; matiére qui, quoique très-curieufe, a pourtant été, fi je l'ofe dire, inconnuë jufqu'à préfent par la faute des Hiftoriens: les uns n'aiant fçû ce qui en étoit, les autres n'en aiant parlé que d'une maniére embaraffée, & dont on ne peut tirer aucun fruit. Au refte il eft aifé de voir, que c'étoit le même efprit qui dans cette guerre animoit les deux Républiques. Mêmes deffeins de part & d'autre, même grandeur de courage, même paffion de dominer. A l'égard des foldats, on ne peut difconvenir les Romains n'euffent tout l'avantage fur les Carthaginois. Mais ceux-ci de leur côté avoient un Chef qui l'emporta de beaucoup en conduite & en valeur fur tous ceux qui commandérent de la part des Romains. Ce Sort des Chef eft Amilcar furnommé Barcas, pere de cet Annibal, qui dans la deux E- fuite fit la guerre aux Romains.

que

tats après Après la paix ces deux Etats eurent à peu près le même fort

la paix.

(a) Pendant que les Romains étoient occupés dans une guerre civile qui s'étoit élevée entr'eux & les Falifques, & qui fut bientôt heureufement terminée par la réduction de la ville de ces rebelles, les Carthaginois en avoient aulli une à foutenir fort confidérable contre les foldats étrangers, & contre les Numides & les Afriquains, qui étoient entrés dans feur révolte. Après s'être vûs fouvent dans de grands périls, ils coururent enfin rifque non feulement d'être dépouillés de leurs biens, mais encore de périr eux-mêmes, & d'être chaffés de leur propre patrie. Arrêtons-nous ici un peu, fans cependant nous écarter du deffein que nous nous fommes propofé d'abord de ne rapporter des chofes que les principaux chefs, & en peu de mots. Cette guerre, pour bien des raifons, vaut la peine que nous ne pallions pas deffus fi légérement: par ce qui s'y eft fait, on apprendra ce que c'étoit que cette guerre, que plufieurs Hiftoriens appellent inexpiable. Nous y verrons quelles mefures & quelles précautions doivent prendre de loin ceux qui fe fervent de troupes étrangeres: elle nous fera comprendre quelle différence on doit mettre entre un mélange confus de nations étrangères & barbares, & des troupes qui ont eu une éducation honnête, & qui ont été nourries & élévées dans les mœurs & les coûtumes du païs; enfin ce qui s'eft paffé dans ce

(a) Pendant que les Romains étoient occupés dans une guerre civile qui s'étoit elevée entr'eux & les Falifques.]. Polybe ne dit que deux mots fur cette guerre des Falifques contre les Romains: & plante la fon lecteur fans que je m'en fache, parce qu'elle n'eft pas de fon fujet : j'ai été curieux de favoir ce que c'étoit, & fi elle avoit quelque rap port à celles des Carthaginois contre leurs troupes rebelles. Il s'en faut bien qu'elle foit fi grave ni fi longue, c'est un rien en comparaifon de l'autre. Je la mettrai toute entiére dans ces remarques, elle a échapé à l'Abbé de Vertot dans fes revolutions de la République Romaine, elle ne m'écha pera pas, ni par conféquent à mon lecteur, s'il eft curieux de l'apprendre. J'en avois lû quelque chofe dans Zonaras, je n'en eus pas dit la moitié fi la curiofité ne m'avoit donné envie de confulter Freinshemius dans fes Supplémens fur Tite Live. Il me difpenfe de bien du travail, car fans cela je me fuffe trouvé très-embaraffé pour en avoir des nouvelles plus circonftanciées, & tout le trouve dans ce Supplément. Du Ryer me fournit fa verfion, je m'en fie à lui.

Lorfqu'on ont eut affujetti tout ce qui étoit dans la Sicile de la domination des Carthaginois, qu'on eût fait la paix avec eux, & qu'il femblait que toutes chofes fuffent non feulement tranquilles, mais affu rées, il naquit en peu dejours une guerre inopinée du côté d'où l'on la craignoit le moins, qui tint toute l'Italie en inquiétude, par la crainte d'un mouvement inteftin, & qui la remplit enfuite d'étonne ment & d'admiration de la voir fitot terminée.

Les Falifques, fe laiffant emporter par je ne fai quelles raisons à une folle témérité, eurent la har.

diefe de prendre les armes,& de faire la guerre aux Romains. Mais les Confuls aiant été envoies contre eux, terminérent en fix jours cette guerre, & les réduifirent fous l'obéijance. Néanmoins dans la pre miere bataille, car l'on dit qu'on en donna deux, les gens de piedaiant été les plus forts, rendirent la victoire douteuse, bien que la cavalerie l'emporta Jureux. Mais l'on combattit la feconde fois fans in. certitude de l'evenement, & les balijques furent con traints de demander la paix, après avoir perdu plus de quinze mille hommes de leurs gens. Quand ils fe furent rendus on leur 6:a pour punition la moitié de leurs armes, de leurs chevaux, de leurs meubles, de leurs efclaves & de leurs terres; & la ville, dons la fituation & la force à quoi ils s'étoient confiés, leur avoit donné tant de haraieffe, fus transportés dans une plaine, des lieux hauts & escarpés où elle avoit été batic.

Le Peuple Romain eút éxercé plus de rigueur con tre les vaincus, par la haine qu'il avoit pour cette ville, qui s'étoit fi fouvent révoltée, & méditois même une rigoureufe vengeance ; mais il modera fa colére, aiant appris de Papyrius, qui avoit écrie le traité de leur reddition par les ordres des Confuls, que les Falifques s'étoient abandonnés non pas à la puiffance, mais à la bonne foi des Romains; & enfin ce nom de foi eut tant de pouvoir fur les ef prits, qu'on jugea qu'il ne falloit rien ordonner de rigoureux contre les vaincus, puisqu'ils avoient pour eux un interceffeur fi vénérable, Cette guerre fu caufe que l'on finit cette année par le triomphe des Confals.] Je foupçonne un peu la durée de cette guerre, en fix jours deux batailles & la paix; celà est presque incroiable.

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