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Ce n'eft point l'élégance générale du travail & du deffein
qui m'engagent à la rapporter; c'eft le sujet même qui y
eft traité; c'eft l'agrément que l'on aura d'y voir l'image
riante de ces fêtes & de ces voyages de plaifir, que les
Egyptiens faifoient fur le Nil en certains temps de l'année.
Maillet parle de ces fêtes; mais ce qu'il en dit eft un peu Voyage d'Egyp.
ampoule, & tient trop, felon moi, aux mœurs & aux P. 75.
idées modernes. Strabon en fait auffi mention. Ce qu'on Lib. 17. p. 801.
en lit dans Hérodote eft plus précis. Après avoir dit que
les Egyptiens s'affembloient plufieurs fois l'année en dif-
férentes villes, pour y offrir des facrifices en l'honneur de
leurs Dieux, il ajoûte: » Voici ce qu'ils font quand ils
» vont à Bubafte. Ils s'embarquent fur le Nil, & chaque
» bateau eft rempli d'une grande quantité de personnes
de l'un & de l'autre fexe; des femmes font du bruit avec
» leurs crotales pendant le voyage, & des hommes jouent
» de la flûte, tandis que le refte de la troupe chante & bat
» des mains. Lorfqu'ils approchent de quelque ville, ce
qu'ils font le plus qu'il leur eft poffible, quelques-unes
>> des femmes continuent leur fymphonie; d'autres appellent
» à haute voix celles de la ville, & leur difent des injures :
quelques-unes danfent; d'autres enfin fe tiennent
debout, en levant leur robe avec indécence. Ces fortes
de jeux fe recommencent toutes les fois qu'on passe
» devant les villes fituées fur le bord du Nil. Quand ils
» font arrivés à Bubafte, ils célébrent la fête qui les
affemble; ils offrent des facrifices magnifiques. On
prétend qu'on y confomme plus de vin que dans le refte
» de l'année ; & l'on ajoûte, que le nombre des hommes
» & des femmes qui font le voyage de Bubafte, monte à
fept cents mille perfonnes, fans compter les enfans.

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II me femble que le récit d'Hérodote s'accorde avec la pierre gravée, autant qu'il eft poffible à une gravûre de ce genre, & à fon peu d'étendue, d'exprimer une action & un pareil fujet. Les figures qui dansent fur le

P. 492.

pont, ou fur la couverte du bateau, paroiffent représenter en effet des femmes ; elles font très-peu vêtues, & tiennent leurs crotales dans les mains. On fçait que cette efpéce d'inftrument étoit compofé de deux lames de cuivre, qui fervoient à faire du bruit, ainsi que Saumaife Salm. ad Vopisc. l'a démontré. L'homme qui joue des deux flûtes à la pouppe du bateau, eft la feule chofe que l'on puiffe ne pas trouver parfaitement d'accord avec ce que nous fçavons d'ailleurs fur les Egyptiens; car il ne paroît pas que l'ufage de ce double inftrument ait été établi dans l'Egypte. Mais comme je ne donne pas cette gravûre pour être de la premiere antiquité Egyptienne, & qu'au contraire fon travail me porte à la croire Grecque; il aura pû fe faire, ou que l'Artifte aura pris la licence d'introduire cet inftrument de fon pays, ou qu'en effet les Egyptiens l'auront reçû des Grecs dans des temps poftérieurs. Car s'il est très-important, comme on n'en peut douter, de ne point confondre les temps en matiére d'antiquités, il est indispenfablement néceffaire de les diftinguer dans tout ce qui regarde l'Egypte.

pl. 60.

que

Avant de finir cet article, je dois remarquer que le fujet que je viens d'expliquer, fe trouve traité de la même maniére fur une cornaline gravée dans un Recueil Muf. Cortonenfe. d'antiquités, publié depuis peu en Italie. Le fçavant Antiquaire qui a pris foin de l'éclaircir, ne voit dans cette compofition qu'une troupe de pantomimes, tels qu'ils Bellorii Lucern. font représentés fur plusieurs monumens Romains. J'avoue tab. 44. & 45. que fes preuves font capables de faire impreffion, & que je me rendrois à fon autorité, fi je n'étois encore arrêté par les raifons qui m'ont déterminé à embraffer un sentiment contraire.. 1°, Le bateau représenté fur les deux pierres, reffemble entiérement aux barques que l'on voit fur les monumens Egyptiens, & entr'autres fur la face feptentrionale de l'obélifque de S. Jean de Latran, où l'on remarque dans le milieu un pont ou une élévation quarrée.

quarrée. 2°. Sur le premier plan où l'on reconnoît le bord de la riviere, on apperçoit des rofeaux & des oiseaux, qui fur ma pierre paroiffent être des Ibis, ce qui dénote les bords du Nil, & fixe par conféquent le lieu de la fcéne. 3°. Enfin je ne crois pas que le goût du travail foit Romain; & s'il n'eft pas Grec, comme je l'ai déja dit, j'y trouverois bien plus de rapports avec le goût Egyptien. J'infifterois même d'autant plus fur cette derniére preuve, qu'elle m'a semblé toujours recevoir un nouveau degré de force du fréquent examen que j'ai fait de la pierre. PLANCHE IV.

N°. I. & II.

L'Isis que l'on voit dans cette Planche, avec fon fils Horus fur fes genoux, eft de bronze, & a un pied de hauteur. Quoique ces fortes de figures aient été fort multipliées parmi les Egyptiens, il eft rare d'en trouver d'un fi grand volume & d'une fi parfaite conservation. J'en pofféde cependant une autre semblable, qui a cinq à fix lignes de plus dans fa hauteur, & dont je n'ai fait graver que la tête; elle eft au No. II. Cette partie avoit feule des différences. Les fiéges de bois, fur lesquelles font affifes l'une & l'autre aujourd'hui, ne font pas du même temps; ceux qu'elles avoient autrefois ayant été ou détruits, ou féparés des figures, il m'a fallu y en fubftituer de nouveaux. La coëffure de ces deux figures mérite quelqu'attention: on y voit d'abord un oiseau, dont les aîles éployées accompagnent la chevelure; au-deffus de l'oifeau eft une couronne de feuilles, du milieu de laquelle s'élevent deux grandes cornes qui embraffent le difque de la Lune.

Dans la table Ifiaque, & dans d'autres monumens Egyptiens, Ifis paroît plus d'une fois avec la dépouille d'un oifeau fur la tête. Kirker a & Pignorius ont cru que c'étoit la poule de Numidie, ou la poule Pintade, qui mens.Ifiac. p. 43. C

Tome 1.

a Oedip. Egypt. Synt. 1. p. 91. de

par la diverfité de fes couleurs, étoit regardée comme le Tymbole de la variété qui fe fait remarquer dans les productions de la nature, que l'on confondoit fouvent avec Ifis. Les feuilles dont cette Déeffe eft couronnée, font des feuilles de mufa, efpéce d'arbre fort commun aux environs de Damiette, & que Théophrafte a mis dans la Horus Apollo. claffe des palmiers. Si c'eft de cet arbre qu'on a dit a qu'il Hierog.l.1.0.23. pouffoit une feule branche à chaque lunaifon, & que les Egyptiens l'employoient dans leur écriture fymbolique, on ne doit pas être furpris que fes feuilles foient entrées. dans la parure d'Ifis, Divinité qui n'étoit pas différente de Lib. 2. c. 41. la Lune. A l'égard des cornes, Hérodote rapporte que les Egyptiens repréfentoient cette Déeffe avec des cornes de bœuf, de la même maniére que les Grecs repréfentoient De Ifid. & Ofirid. Io; & Plutarque dit que Mercure mit une tête de bœuf fur celle d'Ifis, à la place du diadême qu'Horus venoit de lui ôter. Mais comme il ne faut pas beaucoup s'arrêter à ces fortes de traditions, je penferois plûtôt que les cornes de bœuf ayant été dans les plus anciens temps l'emblême de la puiffance, elles entroient dans le nombre des attributs qui caractérisoient les Princes & les Dieux & je me fonde fur un paffage de Sanchoniaton, où il est dit, qu'Aftarte mit fur fa tête la marque de la Royauté, c'est-à-dire, une tête de taureau. Les rapports d'Ifis avec la Lune font trop connus, pour que je doive rendre raifon du difque que l'on voit fur la tête.

Eufeb. Prap. Evan. 1. 1. c. 10.

No. III.

Voici encore une autre tête d'Ifis, également de bronze, & très-bien confervée. On pourroit la regarder comme tronquée; elle ne l'eft cependant point: on la voit dans fon entier, & telle qu'elle a toujours été ; c'est-à-dire, faite pour être jointe avec quelque gaîne d'une autre matiére; les barres & traverses qui font dans l'intérieur, & qui ont été fondues avec la tête même, en font une

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preuve. Ce buste a cinq pouces & demi de hauteur, & quatre pouces fix lignes de largeur. La plinte que la Déeffe a fur la tête, & qui femble former une efpece de couronne, a un trou quarré dans fon milieu. Il eft long de huit lignes fur cinq de large, & a fervi à porter quelqu'ornement qui ne fubfifte plus, & qui vraisemblablement n'étoit autre chofe que des cornes de boeuf accompagnées du difque de la Lune; telles enfin que l'on en voit dans les figures précédentes: car toutes les têtes qui portent cet ornes ment, posent fur une pareille base.

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Tout ce qui prouve les connoiffances & les différentes pratiques des Anciens dans les Arts, mérite notre attention, ou du moins confole de la peine que l'on s'eft donnée pour les retrouver. C'est en conféquence de cette penfée, que j'ai fait graver ces quatre petits morceaux,& nullement à caufe de leurs formes. En effet, quoiqu'il fe trouve quelquefois des variétés dans les figures d'une même efpéce, faites par les Egyptiens, on peut dire en général que ces variétés ne font pas fort confidérables. Qui voudroit par exemple, fuivre les différences que préfente la coëffure des Ifis, n'auroit pas beaucoup d'observations à faire, & je doute qu'elles fuffent même fort utiles. Car comment s'exprimer,ou quels éclairciffemens pourroit-on donner fur des chofes de détail qui nous font abfolument inconnues?

No. I.

CETTE Ifis qui a deux pouces dix lignes de hauteur, tient le petit Horus fur fes genoux. Il eft auffi mal formé dans l'original, qu'il le paroît dans la copie.

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