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peinture en détrempe pouvoit s'y trouver employée, mais plus fûrement encore celle qu'ils nommoient encauftique, & dans laquelle on mettoit la cire coloriée en fufion, comme j'ai effayé de le démontrer dans un Mémoire lû à l'Académie des Belles-Lettres; & l'on fent bien que, foit en détrempe, foit en peinture encauftique, il aura été facile d'établir les couleurs fur des morceaux de bois ou de métal. Je conviens donc que ces deux genres de peinture pouvoient être confacrés à ce galant ufage. Cependant quoique plus commodes & plus aifés à porter que les ouvrages modelés, nous ne voyons par aucun paffage que les Anciens les aient mis en pratique. Le Lecteur jugera de ces conjectures. En attendant, il me femble avoir affez bien tiré parti de toutes ces têtes, en les préfentant de face, de profil, par-derriére, des trois quarts, enfin felon l'afpect capable de faire paroître plus diftinctement & avec plus de graces les différentes façons dont les Dames Grecques & Romaines ont arrangé leurs coëffures, au moins dans certains temps; & pour ne point caufer d'erreur, j'avertis que les deux afpecs de la même tête portent le même numéro. Cette petite recherche eft plus capable de fatisfaire la curiosité, que la vûe des médailles qui ne fçauroient nous apprendre auffi parfaitement les différentes maniéres dont le coëffoient les Dames Grecques & Romaines. J'avois espéré que ces mêmes médailles auroient fervi à fixer précisément le temps où la mode de ces coëffures étoit en regne ; mais on s'expoferoit à trop d'erreurs par cette voie. Cependant fi l'on confulte les monumens, & principalement les buftes & ftatues antiques, il paroîtra que ces huit têtes font prefque toutes du temps des premiers Empereurs, & quoiqu'elles foient de travail différent, c'est-à-dire, Grec & Romain, je n'ai pas voulu les féparer, non-feulement à caufe de leur reffemblance générale, mais par la raison qu'elles ont toutes été trouvées en Egypte, d'où elles me font parvenues. Remarquez fur-tout les têtes des Nos. V

& VIII de la Planche LXXVII & LXXVIII. Elles ne font parées que d'un feul pendant à l'oreille gauche. Cette fingularité confirmée par deux exemples, mérite, ce me femble, une attention particuliére; & je ne me fouviens pas même de l'avoir vû rapportée par aucun Auteur.

PLANCHE LXXIX.

No. I.

CE fragment d'émail est un échantillon de la magnificence des Romains dans l'intérieur de leurs maifons. Je le dois à la politeffe de M. Schoepflin qui l'avoit apporté de Rome. La couleur en eft d'un bleu clair, extrêmement beau; fon épaiffeur eft d'environ fept lignes, fa plus grande hauteur eft de quatre pouces deux lignes, & fa plus grande largeur de trois pouces quatre lignes. Il faifoit partie d'une incruftation dont les murailles étoient revêtues. Ces fortes d'incruftations étoient fouvent enrichies d'ornemens dorés, pareils à ceux que nous voyons fur ce morceau. La figure eft drapée, & le goût du deffein fait juger que l'ouvrage eft Romain : elle représente une Victoire, les ailes éployées, & tenant avec les mains une efpéce de banderolle. C'eft ainsi qu'elle paroît fur plufieurs médailles du temps de Septime Sévère : elle a trois pouces trois lignes de hauteur, & la tête en eft prefqu'effacée. Cet ouvrage devoit produire un effet magnifique. Le bleu turquin de l'émail & les ornemens dorés ont encore aujourd'hui de l'éclat; mais ce n'eft qu'une foible image de celui dont ils ont dû briller dans le temps qu'ils n'avoient effuyé aucun accident. Ce qui mérite encore notre attention, c'eft que l'or a été mis en feuille, & a tenu fur la furface polie de l'émail par le moyen d'un mordant qui m'a déja étonné plufieurs fois. Il n'eft pas douteux que la pratique de dorer ainsi à froid ne foit très-ancienne. On la trouve exécutée en Egypte. Outre les Auteurs qui en

parlent,

parlent, & que j'ai cités dans un Mémoire lû à l'Académie des Belles-Lettres. On peut voir ce que le P. Sicard dit Miff. du Levant de l'éclat & de la confervation de ces dorures mêlées avec des couleurs rouges & bleues.

On verra ici fans doute avec plaifir l'explication de cette pratique des Anciens. J'en fuis redevable aux expériences & à l'amitié de M. Rouelle. La fimplicité de cette opération, que l'on a tant admirée fans la connoître, nous avertit de fufpendre notre jugement fur les chofes que nous n'avons pas examinées avec affez d'attention. Les mordans font des efpéces de vernis, de gommes, de réfines, qui n'étant pas encore fecs, ont la propriété de happer les corps légers qu'on leur préfente. Les huiles graffes qui fe defféchent à l'air, les réfines liquides, & celles qui ont befoin d'être diffoutes pour obéir au pinceau, font les matiéres qui peuvent compofer les mordans. On couvre légérement & également l'efpace de quelque corps folide que ce foit, quand on le veut dorer ou colorier. Les Anciens connoiffoient plufieurs efpéces de térébenthine, de mastic, enfin la gomme de vernis, ou le sendarak, & grand nombre de réfines. Tout cela pouvoit leur fervir de mordant, & les mettoit en état d'en varier les combinaisons ; mais les matiéres les plus communes fe trouvoient fuffifantes pour cette opération. Ce n'eft point au mordant que l'on doit la durée des couleurs : c'eft aux matiéres de ces mêmes couleurs, qui étant une fois appliquées & établies, n'ont pû fe détruire, puifqu'elles font d'une nature à n'être pénétrées ni par l'air, ni par l'humidité.

L'or, le bleu & le rouge font, comme je l'ai déja dit; les corps qui fe font confervés en Egypte durant tant de fiécles voyons par quelle raifon. Rien n'eft capable de détruire l'or, fur-tout quand la feuille a été employée avec une certaine épaiffeur; on a pû d'ailleurs mettre en poudre cet or en feuilles fur le mordant liquide, ou bien avec un pinceau imbibé de ce même mordant; & il aura tenu, Tome I. · Dd

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tom. II. & VII.

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toute la furface a été exactement couverte ; mais l'or employé de cette derniére façon eft beaucoup moins brillant.

Le bleu a la même folidité que l'or : c'est une matiére vitrefcible naturelle, c'eft l'outremer.

Le rouge eft fait avec le cinabre ou le minium des Anciens. Cette matiére, foit minérale, foit factice, eft une combinaison du soufre & du mercure: elle eft des plus durables.

La nature de ces couleurs les a donc mifes en état de résister aux injures du temps, fur-tout dans des pays auffi chauds que la haute Egypte, & dans l'intérieur de quelques maifons de la ville de Rome. L'une & l'autre fituation avoit les mêmes dégrés de féchereffe : ce que nous apprenons des Voyageurs, & en examinant des monumens tels que celui-ci, refte du luxe & de la fomptuofité des Romains. Nous pouvons donc dorer tous les corps polis que nous aurons envie d'orner; nous pouvons employer à notre gré les deux autres couleurs dont je viens de parler : & fi nos dorures ne fubfiftent pas plus long-temps, ce n'eft point la faute des mordans, il faut s'en prendre à l'humidité, au changement des faifons, à la mauvaise opération des ouvriers, à leur friponnerie fur la légéreté des feuilles d'or, enfin au peu de folidité des corps fur lefquels nous faisons appliquer ces ornemens.

No. II.

CETTE boucle ou agraffe de bronze a fept pouces dans fa plus grande longueur, & trois dans fa plus grande hauteur. Elle eft auffi forte que bien confervée. Il ne paroît point par fon volume qu'elle ait été destinée à retenir aucune pièce de l'habillement d'un homme ou d'une femme: il eft plus vraisemblable qu'elle ait fervi à relever des rideaux & des portiéres dans l'intérieur des maisons. Le reffort de fon épingle n'a rien perdu de fon élafticicé,

& il fe foumet encore avec peine à l'extrémité concave qui doit l'arrêter & le retenir.

No. III. & IV.

Je ne fuis pas trop affuré de l'ufage auquel les Romains employoient ces fortes de boutons de cuivre. Cependant on en trouve assez souvent pour croire qu'ils étoient communs ; & quoique ceux-ci n'aient ni trou ni queue, ni rien enfin qui pût les attacher, je conjecture qu'ils entroient dans la parure de l'homme ou du cheval; qu'ils ont apparemment été collés entre deux cuirs, & que celui de deffus en confervant un recouvrement, a été fendu, pour laiffer paroître le relief dont le bouton eft orné; ou plutôt ces morceaux ont peut-être été fertis dans un cuivre plus mince, & ce cuivre ayant une queue ou des trous, a été placé à une des extrémités des lambrequins pour leur ornement, comme tous les monumens nous en inftruifent. Quoi qu'il en foit, je ne les rapporte l'un & l'autre de face & de profil, qu'à cause qu'ils font faits avec goût, sur-tout celui du No. IV fur lequel on voit une tête de femme. On y peut néanmoins diftinguer un tenon, mais qui n'a point été percé. Le genre du travail fait juger que ces deux petits morceaux ne font pas du même temps, & que la tête du tigre eft de beaucoup plus ancienne, le travail en étant plus fec & plus auftère. Le N°. III a treize lignes de diamétre, & le N°. IV en a neuf : l'un & l'autre font exactement de forme circulaire.

PLANCHE LXXX.

N°. I.

On trouva en 1748, dans la fouille faite pour le potager de Choisi, deux tombeaux de pierre qui n'étoient chargés d'aucune infcription. Comme le peu de chofes qu'ils renfermoient fut diffipé, & que je ne pourrois en parler que

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