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en Iflande, pour y redreffer la Procédure, conjointement avec Paul Widalin. Ce fut en 1712 qu'il quitta pour la dernière fois fa patrie (l'Islande). Il mourut à Copenhague en 1730, après avoir, par une dispofition testamentaire, donné à l'université de cette ville un fonds, dont les rentes devoient faire deux bourses (Stipendia) pour les Iflandois qui embrafferoient la partie des antiquités Islandoifes. Il difpofa de fa bibliothèque en faveur de cette même univerfité, y joignit une fomme d'argent très-considérable, qu'il destinoit à la cenfure & à l'impreffion des écrits Iflandois. Rien n'avoit été exécuté de fa difpofition teftamentaire avant 1772. Ce fut le 24 septembre de cette année, que le gouvernement de Danemarck chargea MM. Luxdorff, Suhm, Langbeck & Erichson, auxquels furent joints MM. Kall & Moellman, de travailler conjointement, d'après l'instruction du teftateur, & de publier annuellement quelque ouvrage utile. M. Finfon fut nommé fecrétaire, place qu'il n'occupe plus, étant employé dans l'état eccléfiaftique à Skallholt. Déja ces favans ont publié les Sagas de Kristnis, à Copenhague, in-8°, 1773; Islands Landnama-Bok, in-4° Copenhague, 1774; & de Gundlaug Ormftunga, in-4o, Copenhague, 1775. Ce travail fe fait avec toute l'acti vité & le goût qu'on peut attendre d'un auffi heureux choix de directeurs.

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LETTRE XIV. *

A M. LE BARON AXEL DE LEYONHUFVUD, іргізілуі

ohár Sur la Poéfie Islandoife.

C'EST

EST avec un vrai plaifir, Monfieur, que je vais obéir à vos ordres, en vous difant quelque chofe de la poéfie Iflandoife. Je regrette feulement que mes connoiffances, trop bornées dans un fujet enveloppé d'épaiffes ténèbres, ne me permettent pas d'en donner des détails auffi circonftanciés que vous le defireriez, & qui conviendroient à l'importance de la matière. Je fens d'autant plus l'embarras où me met cette incapacité, que mes idées vont être foumiles à la pénétration d'un vrai connoiffeur. Mais fi mes obfervations ne font pas dignes du fujet, elles feront au moins une preuve de mon empreffement à faire ce qui peut vous être agréable.

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Quelque étrange que puiffe paroître d'abord

* Cette Lettre eft la dix-feptième dans l'original, & elle eft datée de Stockholm, le 12 feptembre 1775.

l'opinion de plufieurs favans, qui foutiennent que l'ufage d'écrire en vers eft antérieur en Europe à celui d'écrire en profe, fi on l'examine avec plus d'attention, on ne peut s'empêcher d'y trouver de la probabilité. Chez les Grecs & les Romains, les poëtes furent antérieurs aux plus célèbres hiftoriens ou orateurs. On peut fixer avec certitude l'époque où la profe commença chez les Grecs; mais il eft prefque impoffible de déterminer l'âge de leur poéfie, qui remonte beaucoup au-delà du fiège de Troye & des jeux Olympiques. Il en fut de même chez les Romains; leur première pièce d'éloquence en profe, eft la harangue d'Appius Cacus au Sénat & au peuple Romain, vers la cent vingt-cinquième Olympiade. L'orateur les y exhortoit à ne pas écouter les propofitions de paix de Pyrrhus. Il n'eft pas moins hors de doute que la poéfie étoit connue & cultivée chez les Romains bien long-temps avant cé temps-là

On en fera moins furpris, fi l'on confidère qu'il y avoit eu une infinité de belles actions dignes d'être confignées dans l'hiftoire & de paffer à la poftérité, avant que l'on eût en Europe aucune connoiffance des caractères de l'écriture. Lorsqu'il s'agiffoit de fauver de l'oubli

un grand événement, quelle reffource ne trouvoit la mémoire dans des mots arrangés pas

suivant un certain ordre & mesure, de forte

que l'oreille feule fuffifoit pour faire remarquer l'omiffion ou le changement de quelqu'un de ces mots ? C'est auffi par cette raifon que les lois des anciens Germains étoient écrites en vers. Elles confervent encore le nom de ftrophes, parce qu'on chantoit les odes ou les ftances qui les compofoient. La poéfie eft encore un moyen d'accréditer un ouvrage. Louis le Débonnaire, roi de France, engagé par les fuffrages qu'obtenoient les productions poétiques, fit traduire la Bible en vers dans le neuvième fiècle, vou→ Jant la divulguer parmi les Saxons. Ottfried, Bénédictin en Alface, traduifit, par la même raison & dans le même temps, en vers Allemands, les quatre Evangéliftes.

Ileft donc évident que la poéfie, chez toutes les nations, eft d'une très-haute antiquité. La Suède en eft fans doute redevable à Odin, qui l'y a introduite (a). Anciennement il n'y avoit

(a) Note de l'Editeur Allemand. M. Thunman, Suédois, Profeffeur à Hall, parlant d'Odin dans un Mémoire fur la Poefie du Nord, inféré dans le Journal de Hall, no. 32, de l'année 1775, s'exprime ainfi : Odin

pas de Roi ni d'autres perfonnes de diftinction qui n'eût fon Scalde, lequel devoit affifter à tous les événemens importans, pour remarquer ce qui s'y paffoit de digne de fouvenir, & le rendre enfuite en vers. Dans les batailles, la place du Scalde étoit marquée dans l'enceinte (Skældborg) des plus braves guerriers, pour voir de fes propres yeux les brillans exploits de chacun de ceux dont il devoit enfuite chanter les éloges. Il affiftoit auffi aux banquets, pour divertir la compagnie par des faillies ingénieuses

ou Wodan, que tous les anciens peuples de la Germanie ont regardé & adoré comme un dieu, n'a peutêtre jamais été en Scandinavie. Les peuples du Nord ayant tiré une grande partie de leur mythologie de l'ancienne Germanie, y ont auffi placé cette tradition qu'Odin, defcendu de Godheim, c'eft-à-dire, du ciel, demeure des dieux, étoit venu fur Manheim, c'eftà-dire, la terre, demeure des hommes. C'est d'après cette tradition que leurs premiers hiftoriens ont cru pouvoir placer le Manheim en Suède, & le Godheim fur la mer Noire & le Palus-Maotide, où il y avoit anciennement des Goths. C'eft ainfi qu'on a fait du' dieu Odin, un général d'armée, & la fouche de tous les Rois du Nord ; c'est ainfi enfin que, par une mythos logie mal entendue, on a élevé un fyftême hiftorique, que tous les écrivains du Nord ont adopté sur la foi de Sturlefon.

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