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prefque tous égorger fur la brèche, & Raimonet fait prifon

nier fut conduit à Maximilien, qui le fit pendre contre les AN. 140. lois de la guerre. Louis XI outré vengea cette mort hon- dernière édit. teufe par celle de cinquante des meilleurs prifonniers faits à to. 2. p. 259. Guinegate, qui furent tous pendus en différens endroits, fept des plus diftingués dans le lieu même où Raimonet avoit été exécuté, dix devant la ville de Douai, autant devant SaintOmer, Arras & Lille. Ces exécutions furent faites par le bourreau, accompagné du grand prévôt, avec huit cents lances & fix mille francs-archers, qui après s'être acquittés de leur commiffion, vinrent dans le comté de Guines, de-là en Flandre, se saifirent de dix-fept places ou châteaux ; tuèrent ou brûlèrent tout ce qui fe préfenta, emmenèrent bœufs, vaches, chevaux, & mirent tout à feu & à fang. Un corfaire Normand, nommé Coulon, punit encore les Flamands, à qui il enleva quatre-vingts vaiffeaux, qui venoient de charger des bleds en Pruffe & toute la pêche des harengs; ce qui caufa beaucoup de dommage dans le pays. La campagne finit de bonne heure, & l'on ne fit plus rien le refte de l'année. Dans la fuivante on parla de paix; & le pape, pour en être le médiateur, envoya fon légat en France.

XXV.

légat en

France.

Ce légat étoit le cardinal Julien de la Rouere, du titre de Le cardinal faint Pierre-aux-liens. Il avoit déjà paru en France avec le de Saint Piermême titre quatre ans auparavant. Sa principale commiffion re-aux-liens étoit de fe rendre l'arbitre de la paix entre le roi Louis XI & Maximilien duc d'Autriche. Il arriva à Paris dans le mois de Septembre de cette année 1480, & y fut reçu avec beaucoup d'honneur. Il trouva le roi beaucoup plus difpofé à la paix qu'il ne fe l'étoit imaginé. Ce monarqne étoit fort touché de la journée de Guinegate; il croyoit qu'il y avoit beaucoup plus de François tués qu'on ne lui avoit dit, & il ne doutoit pas que Maximilien n'eût recouvré tout ce que fon époufe avoit perdu dans les Pays-Bas, s'il eût fu user de fa victoire. Des Cordes n'avoit eu permiffion de hafarder le combat, que parce que la fuite des profpérités prefque continuelles de Louis XI, depuis la mort du duc de Bourgogne, l'avoit fait confentir, contre fon inclination naturelle, à cette bataille. Il penfoit d'ailleurs que, s'il l'eût gagnée, il auroit infailliblement conquis le refte des Pays Bas.

mines, liv.

Une autre raifon qui faifoit fouhaiter la paix à ce prince, Mém. de Coétoit que fa fanté diminuoit tous les jours. Il favoit aufli que 6. ch. 6.

tous les grands de fon royaume le haïffoit fon fils étoit AN. 1480. mineur, &, felon toutes les apparences, l'état changeant de

XXVI.

Trève entre

maître, entreroit dans une guerre civile. La raison vouloit que fon fils ne fe trouvât embarraffé d'aucune guerre étrangère; &, fans cette précaution, il ne pouvoit manquer de perdre tout ce qu'il avoit pris fur l'héritière de Bourgogne. Ces confidérations lui ôtèrent l'efpérance de conquérir le refte des Pays-Bas, & ne lui laifsèrent que l'efpoir de conferver ce qu'il y avoit acquis. Ce fut ce qui l'obligea de donner fi aifément dans les vues du légat, & de répondre au deffein qu'il avoit de ménager la paix entre lui & l'archiduc. Ce cardinal étoit l'homme du monde le plus prope à cette négociation. Quoique neveu du pape, il avoit l'inclination toute Françoife, & fembloit être né pour les grandes choses.

Il y avoit déjà une trève faite entre Louis XI& l'archiduc. Louis XI & C'étoit celui-ci qui en avoit propofé les conditions, & il pal'archiduc. roît que le roi de France les avoit acceptées. Cette trève fut Mém. de Co- conclue au mois d'Août, & devoit durer fept mois. On étoit dern, édit. p. convenu: qu'on ne la publieroit d'abord que pour trois mois,

mines, t. 5.

79.

XXVII.

duchefle

douairière à Maximilien

ve.

lefquels étant expirés, on feroit une feconde publication pour quatre mois que le roi d'Angleterre & le duc de Bretagne feroient les garants de la trève : que pendant ce temps-là on ne feroit aucune hoftilité : que les ambaffadeurs engageroient le roi à remettre au feigneur de Romont l'une de ces trois villes, Térouane, Béthune ou Péronne, fans toutefois que le refus du roi les arrêtât : & que cette trève devant être regardée comme un acheminement à la paix, le roi feroit prié d'envoyer fes ambaffadeurs, pour le quinzième d'O&obre, à Térouane, Béthune ou Arras, pendant que le duc d'Autriche enverroit les fiens à Saint-Omer, à Lille ou à Douai.

Lettre de la Marguerite, ducheffe douairière de Bourgogne, qui n'étoit pas encore de retour d'Angleterre, & qui avoit affuré que l'archiduc fe laifferoit entièrement conduire par Edouard, & fur cette trè. qu'il ne feroit rien fans fa participation, informée de toute cette négociation, en écrivit à Maximilien, & lui apprit le mécontentement du confeil d'Angleterre touchant la trève qu'il venoit de faire avec la France fans la participation du roi Edouard, l'entrevue propofée avec Louis XI, fes intelligences avec le roi d'Ecofe, le départ des troupes Angloifes pour la Flandre, & fon prochain départ. Sa lettre eft du qua

Mém. de Comines, ibid.

XXVIII. Maximillen

89.

torzième Septembre, darée de Rochester. Dans une autre lettre du troisième d'Octobre, elle lui mande qu'elle avoit AN. 1480 fait au roi d'Angleterre fes excufes de ce qu'il s'étoit engagé fans fa participation à une conférence pour les différents qu'il avoit avec Louis XI; qu'elle avoit des affaires fecrètes à lui communiquer avant cette conférence, & qu'elle lui feroit favoir la réponse d'Edouard touchant le cardinal légat. Ce cardinal s'étoit avancé jufqu'à Péronne pour traiter avec les députés de l'archiduc; mais n'ayant pu obtenir de fauf- retufe dedo conduit, il fut obligé de revenir à Paris, d'où il lui écrivit ner audience au légat. d'abord le cinquième de Septembre, pour l'informer qu'il Mém.de Coétoit arrivé en France dans le deffein d'exhorter Louis XI à mines, loco la paix, & qu'il l'y avoit trouvé tour-à-fait difpofé. Il ajoute, Sup. cit. p. qu'après avoir refté feulement quatre jours à Vendôme, il étoit venu à Paris, d'où il devoit aller le trouver en Flandre, pour l'engager à consentir à une fi bonne œuvre. Maximilien lui répondit que fon confeil n'étoit pas avec lui; qu'il vouloit le confulter, & prioit le légat de différer fon voyage jufqu'à ce qu'il eût fa réponse, qu'il recevroit dans peu de jours. Maximilien vouloit bien le recevoir comme cardinal, mais non comme légat. Le pape, qui avoit été informé d'abord de ce refus, envoya un bref à l'archiduc, où il lui repréfente que le cardinal avoit déjà fait la fonction de legat Bref du pape en France, & le prie de le reconnoître & de le recevoir en cette qualité. Ce bref eft du feizième Septembre. Comme il voir le légat. ne fit point changer de réfolution à l'archiduc, le légat lui écrivit de Péronne dans le même mois, pour le prier de ne le pas laiffer davantage en fufpens fur fon voyage dans les Pays-Bas, attendu qu'il ne peut fans déshonneur demeurer où il eft. Et en même temps il donna une lettre de créance à Marc, archevêque de Colocz en Hongrie, & à un docteur en droit qu'il envoyoit à Maximilien, pour favoir fa volonté fur le voyage des Pays-Bas auquel il fe difpofoit, & fi ce prince l'agréeroit.

Comme l'archiduc perfiftoit toujours dans fon refus, le légat fe plaignit vivement du peu d'égard qu'il avoit au brefdu pape, & le pria de l'informer du parti qu'il devoit prendre. Cette lettre eft datée de Péronne le cinquième d'Octobre. Il lui en écrivit une autre le vingtième du même mois, pour lui demander la permiffion de fe rendre auprès de lui au moins dans un lieu neutre, & fans aucune condition; efpérant que

XXIX.

à l'archiduc

pour rece

AN. 1480.

XXX.

I envoie fes
inftructions

pour enten-
dre le légat.

par cette voie il quitteroit les injuftes foupçons qu'il avoit conçus contre lui. L'archiduc envoya enfin fes inftructions à Jean d'Auffay, maître des requêtes de fon confeil, pour traiter avec le légat. Il prit ce parti fur une lettre qu'il reçut du roi d'Angleterre, dans laquelle fa majesté lui mandoit qu'il pouvoit donner audience au légat; & le prioit en même temps de ne rien conclure avec lui fans l'en avoir auparavant averti. Le légat étoit trop habile pour n'avoir pas informé la cour d'Angleterre du fujet de fa légation, & la douairière de Bourgogne des vues que le roi de France avoit de la remarier richement.

D'un autre côté Maximilien négocioit féparément pour tâcher de s'accommoder avec Louis XI, & il convint de cette conférence dont on a déjà parlé, qui pour y réuflir, devoit fe tenir le quinzième d'Octobre, & propofa même une entrevue avec le roi. Edouard n'auroit pas été fàché que le légat fût entré dans cette négociation : il croyoit fon entremife néceffaire pour fixer la légèreté de l'archiduc, qui s'obtinoit toujours à ne point recevoir ce cardinal qui lui étoit fufpect; enforte que, malgré les inftructions qu'il avoit envoyées à un de fes confeillers, il lui refufa toujours une loco audience particulière. La maladie dangereufe de Louis dérangea ces négociations: le roi d'Angleterre changea même de vues, & au lieu de travailler à la paix, comme il paroifLovis XI eft foit y être porté, il confeilla à l'archiduc d'obtenir une trève attaqué d'a- de deux ans, en attendant la mort du roi de France qui papoplexie. roiffoit certaine. Sa maladie fut une attaque d'apoplexie mines, liv. 6. qui le furprit pendant fon dîné dans un village proche la ville

Mém. de Co

mines,

citato, P.

139.

XXXL

Mém. de Co

cb. 7.

XXXII. Conduite bi

de Chinon en Touraine; il perdit dans un moment l'usage de tous fes fens, & ne reconnut plus perfonne : fes domeftiques le portèrent au lit, & avec quelques remèdes il eut le courage d'aller coucher à Forges, d'où il étoit parti le matin. Il recouvra la parole trois jours après; mais ce qu'il difoit étoit fi peu articulé, qu'il n'y avoit que fes officiers qui l'entendiffent.

Comme pendant fon attaque d'apoplexie il s'étoit efforcé farre & affec- d'approcher d'une fenêtre, on l'avoit fermée de peur qu'il ne tée de ce fe précipitât, & on le gardoit à vue. Quand il fut un peureveMém. de Co- nu à lui-même, il demanda qui étoient ceux qui l'avoient mincs, liv. 6. retiré de cette fenêtre ; à peine en cut-il fu les noms, qu'il

prince.

c. 7.

les chafla tous de fa maifon, & ôta les emplois à plufieurs.

AN. 1480.

C'est qu'il avoit honte de voir ceux qui avoient été les témoins de fa foibleffe. Ce fut par une même délicateffe, que pour perfuader au public qu'il étoit encore capable de grandes affaires, dix ou douze jours après fon attaque d'apoplexie, il assembla fon confeil pour s'informer des expéditions qu'on avoit faites pendant ce temps-là. Il fit appeler les fix perfonnes qui lui fervoient alors de miniftres, le comte Matthieu, de Beaujeu, Charles d'Amboife, l'évêque d'Autun, Pierre Hift. de Louis XI, de Rohan, maréchal de Gié, Philippe de Comines, & le liv. 10, feigneur de Lud: il les obligea tous l'un après l'autre à parler fur les matières dont il s'agiffoit ; quoiqu'il n'entendit pas trop ce qu'on difoit, il faifoit toutefois femblant de l'entendre. Il prenoit les lettres entre fes mains, & vouloit quelquefois les lire fans y rien comprendre, dit Comines: il les tournoit souvent à rebours, ajoute un autre hiftorien; mais il ne falloit pas faire connoître qu'on s'en aperçût. Enfin il n'oublioit rien pour faire accroire au public qu'il étoit parfaitement guéri, & qu'il reprenoit avec autant d'exactitude qu'auparavant le foin des affaires de fon royaume.

XXXIII.

Le légat demande la

tient.

Comines

1.

Le légat profita de cette indifpofition du roi pour lui demander la liberté du cardinal Balue, qui depuis treize ou quatorze ans languiffoit dans une étroite prifon pour expier liberté du fa perfidie & fes trahifons. Les follicitations prefque conti- cardinal Banuelles de la cour de Rome, durant un fi long-temps, n'a- lue, & l'obvoient pu le délivrer. Le légat pria le roi avec tant d'inftance de lui rendre la liberté, que Louis, qui croyoit d'ailleurs fa vengeance affez fatisfaite par la longue captivité du car- Mém. de dinal, lui en accorda enfin la délivrance. Comines dit que 6. c. 7. pag. le roi fe fit abfoudre de la conduite qu'il avoit tenue envers 403. Balue, par un bref que le pape envoya à fa requête. D'autres auteurs ont publié que ce cardinal trompa le roi & les médecins ; qu'ayant feint une rétention d'urine, il fut rendu de Cardinal. au légat qui l'emmena en Italie, fans avoir vụ Louis XI; 1. 7. c. 5. qu'il fut reçu du pape & des cardinaux avec beaucoup de bonté; & qu'auffitôt après fon arrivée, fa fainteté le pourvut de l'évêché d'Albano.

Addit. ad Ciacon.

1.

Garimbert.

XXXIV.

Réforme des

La trève que Louis venoit de faire avec Maximilien, l'obligea de réformer fes troupes. Il caffa tous les francs-archers francs-arétablis par Charles VII, parce qu'ils étoient extrêmement à chers; les charge au peuple, & qu'ils nuifoient plus qu'ils n'étoient mis à leur utiles dans un jour de bataille, étant trop ardens au pillage, place.

Suifles font

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