Imágenes de páginas
PDF
EPUB

quatorze ans, mais du foin de la perfonne du roi, jusqu'à

gouvernement du ro

yaume.

ce qu'il fût en âge de gouverner par lui-même, & pour dé- comteffe de tacher du duc d'Orléans ceux qui lui étoient trop favora. Beaujeu le bles. La comteffe n'eut l'administration des affaires qu'à deux conditions: l'une, que les princes du fang entreroient dans le confeil étroit, où le roi ne pourroit conclurre aucune chose importante fans le confentement de la plus grande partie; l'autre, que les états choifiroient douze perfonnes de leurs corps, qui y auroient voix délibérative. Enfin les fuffrages furent fi généralement pour la dame de Beaujeu, que le duc d'Orléans n'eut que ceux de fon apanage.

CLVI.

On y exa

mine les

France.

Dans une autre féance on écouta les griefs du clergé de France. Jean de Retz ou de Rely, docteur de Sorbonne & chanoine de Notre-Dame de Paris fit un long difcours, dans griefs du lequel il s'éleva beaucoup contre les vexations de la cour clergé de de Rome & fupplia le roi de délivrer l'églife Gallicane, dont obfervat. fur il étoit le protecteur des exactions onéreufes de cette cour. l'hift. de Il ajouta que le prince ne devoit point fouffrir que le pape Charles VIII, fit quelque chofe au préjudice de la pragmatique-fan&tion, contre les libertés de l'églife de France, les droits du roi & les canons des conciles de Conftance & de Bâle. Il conclut enfin, que s'il fe trouvoit quelque chofe d'injurieux au faint fiége dans les décrets de la pragmatique, les trois états du royaume étoient prêts de déférer au jugement du concile général qui devoit fe tenir. La féance ne fe paffa pas fans conteftation: l'archevêque de Lyon, qui étoit le cardinal de Bourbon, avec un autre archevêque, forma oppofition à tout ce que le docteur venoit de dire ; & l'on ne voulut rien déterminer là-deffus, parce qu'on ne vouloit pas fe brouiller avec le pape, & qu'au commencement d'un règne on ne devoit faire aucune démarche qui troublât la tranquillité de l'état.

CLVII.

On fit quelque attention à la requête de la nobleffe, qui Plaintes de fe plaignoit de la convocation trop fréquente du ban & de la nobleffe l'arrière-ban trop à charge aux gentils hommes; du refus aux états. qu'on leur faifoit de chaffer fur leurs propres terres, & dans les bois qui appartenoient au roi, des vexations qu'on leur faifoit à ce fujet. Louis XI avoit été fi jaloux de ce droit, qu'il le voulut ôter à fon avénement à la couronne & défendit, fous peine de la vie, à toutes fortes de perfonnes la chaffe & la vénerie en troupe ou feul, fans une permiffion

nouvelle & par écrit de fa majesté. Cette loi étoit fi géné AN. 1484. rale, qu'elle s'étendoit jufqu'aux princes du fang; & l'on croit que ce règlement fut la principale occafion de la guerre du bien public. La nobleffe s'en plaignit, & le roi qui ne vouloit pas l'aigrir, la rétablit dans fes droits pour la chasse, & lui accorda le rachat des rentes qu'elle demandoit encore, avec promeffe qu'à l'avenir on ne convoqueroit pas le ban & l'arrière-ban fans une extrême néceffité.

CLVIII.

Le tiers-état fut de même ouï dans fes griefs. Ilfe plaignit Le tiers-état fort de la difette d'argent dans le royaume, feplaint aufli. caufée par

CLIX.

le

gens

transport que les légats du pape en faifoient lorsqu'ils s'en retournoient à Rome. Il ajouta qu'on en faifoit auffi beaucoup paffer dans les autres pays étrangers par le moyen des foires de Lyon. Il s'étendit fort fur les continuels paffages des de guerre qui étoient à charge au peuple, fur les tailles exorbitantes qu'on exigeoit durement & fans pitié, fur la contrainte qu'on faifoit à ceux qui n'avoient aucuns fiefs de marcher à l'arrière-ban, quoiqu'ils fuffent fujets à la taille. Il demandoit auffi qu'on rétablit la gendarmerie fur le même pied qu'elle étoit du temps de Charles VII; qu'on lui permît de racheter les rentes des emprunts qu'on avoit été obligé de faire fous Louis XI, & qu'on le confirmât dans fes anciens priviléges, auxquels on avoit donné atteinte fous les règnes précédens. Le roi accorda une partie de fes demandes, & refufa l'autre ; il permitierachat des rentes, il difpenfa de l'arrièreban ceux qui n'avoient point de fiefs, il confirma les anciens priviléges, mais il ne décida rien fur ce qui regardoit les légats du pape, & fur l'argent du royaume qu'on transportoit à Rome. L'affemblée des états, après avoir été fi favorablement traitée, fe piqua de ne pas céder en civilité, & fit part de fes biens au roi en lui accordant un don gratuit de deux millions cinq cents mille livres, outre trois cents mille livres qu'on y ajouta pour fon joyeux avénement. Après quoi l'on fe fépara, en affurant le roi qu'on lui feroit toujours fidelle.

Les états ne furent pas plutôt congédiés, qu'on fit tous Sacre du roi les préparatifs néceffaires pour le facre de fa majefté, qui fut Charles VIII. fait à Reims le trentième de Mai, & où fe trouvèrent le duc d'Orléans, le duc d'Alençon, le feigneur de Beaujeu, le comte dauphin 'd'Auvergne, le comte de Vendôme, & Philippe de Savoie comte de Breffe, qui repréfentoient les fix pairs laïques, le maréchal de Gié faifant la fonction de

connétable

connétable. Après cette cérémonie le roi revint à Paris, y fit fon entrée, renouvella l'ancienne alliance avec le roi d'Ecoffe, confirma celle qu'on avoit déjà faite avec les Suiffes, rappela plufieurs feigneurs exilés, rétablit quelques familles dans leurs biens qu'on avoit confifqués, & ménagea un accommodement entre Jean de Foix comte de Narbonne, & la princeffe de Viarne, qui étoient fort brouillés enfemble, jufqu'à vouloir prendre les armes & en venir à une guerre ouverte.

AN. 1484

CLX.

On a deffein

d'arrêter le

neuil.

Le duc d'Orléans, qui étoit revenu de Bretagne pour affifter aux états & à ce facre, fupportoit avec peine que toute l'autorité fût entre les mains de la comteffe de Beaujeu; il fe duc d'Orlérendit à Tours & de-là à Paris, où il travailla à fe faire un ans, qui fe parti confidérable; il affifta avec affiduité au confeil. Mais retire à Verpour contredire la gouvernante du royaume, & afin de gagner les grands il leur repréfentoit qu'elle avoit fupplanté le duc d'Orléans, & que c'étoit un affront qui rejaillifoit fur eux. La cour étoit alors à Melun; le duc s'y rendit, & étant entré dans une partie de paume qu'on jouoit devant le roi, une conteftation qui furvint fur un coup obligea de confulter ceux qui étoient préfens. La comtesse de Beaujeu qui étoit du nombre décida contre le duc, qui en fut fi irrité, qu'il s'échappa en injures groffières contre l'honneur & la reputation de la gouvernante. Celle-ci ne voulant pas laiffer un fi mauvais traitement impuni, assembla extraordinairement le confeil, & on conclut d'arrêter le duc d'Orléans. Mais il prévint le coup, & fur l'avis que lui en donna Jean de Louvain, un de fes gentilshommes, il fe retira à Verneuil dans le Perche, auprès de René duc d'Alençon.

lui.

de

Dans fa retraite il ne penfa qu'à lever des troupes, & CLXI. fon crédit, joint à celui du duc d'Alençon, alla jufqu'à met- nombre Un grand tre fur pied cent lances & de l'infanterie à proportion. Son feigneurs fe parti devint puiffant, & le comte de Dunois y fit entrer des joignent à perfonnes dont la comteffe de Beaujeu fe défioit le moins. Celui dont l'inconftance la furprit davantage, fut le duc de Bourbon fon beau-frère, qu'on venoit d'élever à la charge de connétable de France: elle apprit qu'il affembloit pour le duc d'Orléans des troupes en Auvergne, que le comte d'Angoulême faifoit la même chofe en Poitou, & que les feigneurs de Foix & d'Albret étoient d'intelligence avec eux; enfin que le prince d'Orange & le duc de Lorraine, qui étoient Tome XVI

N

alors en cour, favorifoient fon ennemi, & étoient de for AN. 1484. complot. Il fallut en prévenir les fuites fàcheufes, & le meilleur remède qu'elle'y put apporter, fut de veiller fur les démarches de ces feigneurs, d'éloigner de la perfonne du roi ceux qui étoient contraires, & d'envoyer ordre aux gouverneurs des places des frontières de Bretagne, de prendre garde à Saint-Gelais, vie de Louis tous ceux qui pafferoient dans cette province, parce qu'on ne doutoit point que le duc d'Orléans n'y mît fa principale reffource. On arma auffi quelques vaiffeaux pour croiser sur ces côtes, & l'on envoya des troupes pour s'opposer au paffage de celles que les ducs de Bourbon & d'Angoulême avoient affemblées.

XII.

Ces démarches déconcertèrent le duc d'Orléans, qui écou ta quelques perfonnes affidées qu'on lui avoit envoyées pour le ramener à la cour; elles lui promirent de le réconcilier avec la comteffe de Beaujeu, & de lui faire expédier une amniftie pour plus de fureté. Quelque mauvaise opinion qu'il eût de cette comteffe pour croire qu'elle facrifiât de bonne foi le défir de fe venger au repos public, il ne laiffa pas de partir après avoir pris toutes fes furetés, & de la venir trouver à Evreux, parce qu'il craignoit qu'on ne l'inveftît dans Verneuil; il eut une entrevue avec la dame de Beaujeu : mais commençant à craindre pour fa perfonne, il partit brufquement & fe retira à Blois, pour y prendre avec fes amis les mesures néceffaires à fes projets. Le comte de Dunois lui confeilla de commencer par la prise d'Orléans, qui étoit la capitale de fon apanage. Ses raifons étoient que par-là les mécontens établiroient leur réputation, & que leurs troupes feroient en fureté fous le canon de cette place, jusqu'à ce qu'elles euffent été renforcées par d'autres; & ce conseil fut fuivi.

CLXII. Mais comme la cour avoit pénétré les deffeins du duc,' Il fe préfente devant Or- on envoya promptement dans cette ville Imbert de Batarnay léans, dont fieur de Bouchage, pour confirmer la bourgeoifie dans la on lui refufe fidélité du roi. Le fuccès de fa commiffion fut fi heureux, l'entrée. que quand les envoyés du duc arrivèrent pour demander qu'on y reçût fes troupes, la bourgeoifie ferma les portes de la ville, fe mit fous les armes, & affembla le confeil, où il fut réfolu tout d'une voix de ne pas entendre ces députés fans le confentement de la cour. Le duc d'Orléans y vint luimême; mais on lui fit le même compliment de deffus les

murailles: on lui répondit qu'on étoit au défespoir de l'incivilité dont on ufoit à fon égard; mais qu'on ne pouvoit fe difpenfer d'obéir au roi, dont on venoit de recevoir les ordres là-deffus. Comme le duc n'avoit pas une armée affez nombreufe pour forcer la ville, n'étant compofée que de huit mille hommes d'infanterie & d'environ trois mille chevaux, il fe retira à Baugency pour attendre les troupes qu'on lui levoit en Auvergne & en Poitou. Peu de temps après il vint à Paris, pour tâcher d'engager le parlement dans fes intérêts. Ce fut Denis le Mercier fon chancelier qui porta la parole, les chambres affemblées; il exagéra beaucoup l'ambition démefurée de la comtefle, & le plaignit qu'on eût attenté à la vie du duc. Mais Jean de la Vacquerie, premier président, bien loin d'applaudir à fon difcours, exhorta le prince à rentrer dans fon devoir, & à confidérer ce que la qualité de prince du fang exigeoit de lui; c'eft ce qui le fit retourner à Baugency, où il apprit que l'armée du roi, commandée par le feigneur de la Trimouille, s'avançoit vers Orléans.

AN. 1484

CLXIII. L'arinée du

roi va atta

quer le duc

La comteffe de Beaujeu jugea qu'il étoit abfolument néceffaire de mener le roi contre le duc d'Orléans, quand ce ne feroit que pour obliger la meilleure partie de fes troupes à le quitter, quand elles verroient qu'il leur feroit au- d'Orléans. trement impoffible d'éviter le crime de rebellion, puifqu'elles combatroient contre leur roi. La cour arriva devant Baugency avant que le duc d'Orléans eût le temps de fe fortifier. L'armée royale étoit beaucoup fupérieure à celle du duc; & le comte de Dunois fentit le befoin d'un prompt accommodement pour éviter une ruine entière. Il perfuada au duc d'envoyer un héraut à la Trimouille pour entrer en négociation. Le général y confentit, & fur ce confentement on lui envoya le comte de Dunois pour traiter au nom du duc. La Trimouiile, qui avoit reçu fes Accommoinstructions de la cour, demanda que le duc d'Orléans renvoyât ceux qui l'avoient fuivi, & qu'il remît Baugency le duc d'Oau roi : ce qui lui fut accordé. Mais avant que fa majefté léans. ratifiât le traité, on y ajouta deux autres articles : l'un, que le comte de Dunois feroit relégué de de-là les Alpes, & confiné dans la ville d'Aft en Piémont, jufqu'à ce qu'il plùt au roi de le rappeler; l'autre, que le duc d'Orléans fe retireroit dans la ville capitale de fon apanage, après avoir défarmé & renvoyé les troupes.

CLXIV.

dement en

tre le roi &

« AnteriorContinuar »