Imágenes de páginas
PDF
EPUB

AN. 1493

LXXII.

Le pape don

ce qu'il ne pouvoit ni accorder ni ôter à Ferdinand, adreffa un bref à ce prince & à Ifabelle, par lequel il leur donne à perpétuité, à eux & aux autres rois de Caftille & de Leon leurs fucceffeurs, toutes les îles & terres fermes découvertes & à découvrir vers l'Occident & le Midi, tirant une ligne du pôle arctique au pôle antarctique, c'eft-à-dire du Septentrion au Midi : foit que les terres fermes trouvées ou à trouver fuffent vers les Indes, foit qu'elles fuffent fituées en quelqu'autre endroit.

Et pour empêcher toute conteftation, le fouverain ponne aux rois tife, dans fa bulle du troisième de Mai 1493, dans une fe- . d'Espagneles conde du quatrième du même mois, & dans une troisième pays décou quelque temps après, dit que cette ligne fera diftante des verts parColomb. îles qu'on appelle communément les Açores & du Cap-vert, Bullar. to. 1. de cent lieues du côté de l'Occident & du Midi; de telle Alex. VI. manière toutefois, que toutes les îles & terres fermes qui 78. p. 42. auroient été trouvées & poffédées actuellement par quelBarros, de que roi ou prince chrétien jufqu'au jour de la Nativité de Afia. dec. 1. J. C. depuis cette ligne vers l'Occident & le Midi, demeu- ›

conft. 2. n.

1.3. 11.

reroient en fa poffeffion, fans que les rois de Castille y puffent prétendre aucun droit. Le pape ajoute, qu'il ne leur accorde ce don, qu'à condition qu'ils enverroient dans ces îles des perfonnes zélées, favantes & craignant Dieu, pour inftruire les peuples dans la foi. Ce qui fut fort mal exécuté, parce que l'on avoit plus d'ardeur pour l'or de ces habitans, que pour le falut de leurs ames, comme les effets le LXXIII. démontrèrent affez.

Conteftations entre

Portugal,

Genebr. in

[ocr errors]

Les autres précautions du pape ne furent pas mieux exéles rois de cutées. Les Portugais prétendirent que les nouvelles terres Caftille & de découvertes leur appartenoient par la conceffion que le touchant ces pape Eugene IV en avoit faite à leur roi. Les Caftillans fe découvertes. défendirent fur la bulle d'Alexandre VI, qui étoit affez nouchr. fub Alex, velle. On tint fur ces conteftations plufieurs affemblées, on Gonfal.Ferd. tira de nouvelles lignes, on en vint même quelquefois aux hift. gener. mains; mais comme il étoit de l'intérêt du pape de foutenir la prétendue donation qu'il avoit faite aux rois catholiques, ceRayn. 1493. lui de Portugal fut obligé de céder, pour ne fe pas brouiller "P. Alexand. avec le faint fiége, & Ferdinand ne penfa plus qu'à envoyerhift. ecclef. t. des miffionnaires dans ces nouveaux pays. Raynaldus dit, que 1. faculi xv. le premier qui y alla, fut Bernard Bail, religieux Francifde Alex. VI. cain & Catalan, qui partit avec douze prêtres dont il fut le

Novi Orbis.

1. 2. c. 8.

11. 24.

fupérieur. La bulle dont le fouverain pontife le chargea pour AN. 14934 cette commiffion, eft du vingt-quatrième du mois de Juin

de cette année.

LXXIV.

des cardi

naux.

Cromer. lib.

30.

Volaterran!

1. 7.

Bonfin. dec.

Alexandre VI, qui avoit élevé fon neveu Jean Borgia à Promotion la dignité de cardinal auffitôt après fon élection, fit dans de cardinaux cetre année une autre promotion de douze fujets: favoir, dre VI. par AlexanJean Morton Anglois, archevêque de Cantorberi,chancelier Meeray d'Angleterre, prêtre cardinal du titre de fainte Anaftafie. Le abreg.chron. fecond, Jean-Antoine de faint George, natif de Plaifance, Mariana live to. 4. q. 46. évêque d'Alexandrie, du titre des faints Nérée & Achilée, 26. c. 2. 26. patriarche de Conftantinople, puis évêque de Parme, d'Al- Aubery hift. bane, de Palestrine & de Sabine. Le troisième, Jean de la Grolaye-de-Villiers, François, abbé de faint Denis, puis Surita to. 5. évêque de Lombez, du titre de fainte Sabine. Le quatriè. 1. 1. c. 22. me, Bernardin de Carvajal, Espagnol, évêque de Carthagène, du titre de faint Marcellin & de faint Pierre, puis de fainte-Croix de Jérufalem, & évêque d'Oftie, doyen du facré collége. Le cinquième, Raymond Perrault, évêque 5. lib. 3. de Gurk & de Saintes, du titre de fainte Marie-la-neuve. Le fixième, Cefar Borgia, fils naturel du pape, diacre du titre de fainte Marie-la-neuve, qui remit le chapeau en 1498, fut duc d'Urbin & de Valentinois, & époufa Charlotte d'Albert. Le feptième, Hyppolite d'Eft de Ferrare, archevêque de Milan & de Narbonne, diacre du titre de fainte Lucie. Le huitième, Frederic Cafimir, fils du roi de Pologne, évêque de Cracovie, diacre du titre de fainte Lucie. Le neuvième, Julien Cefarini, Romain, évêque d'Afcoli, diacre du titre de faint Serge & de faint Bacche, puis de Saint-Ange. Le dixième, Dominique Grimani, Vénitien, diacre du titre de faint Nicolas inter imagines, patriarche d'Aquilée, puis prêtre du titre de faint Marc & évêque de Porto. Le onzième, Alexandre Farnefe, Romain, diacre du titre de faint Cofme & de faint Damien, puis de faint Euf tache, évêque d'Oftie, doyen des cardinaux, & dans la fuite pape fous le nom de Paul III. Le douzième, Bernardin Lunatie, de Pavie, diacre du titre de faint Cyriaque. Cette promotion fe fit le vingtième de Septembre, & le facré collége n'en approuva que fept.

LXXV.

Le pape ap

L'ordre des ermites de S. François, fondé par S. François prouve l'orde Paule,prenant tous les jours de nouveaux accroiffemens par dre des Miles divers établiffemens & par le nombre de fujets qui fe pré- nimes.

B. 1493.

fentoient pour y être reçu, le S. fondateur dreffaune règle AN. 1493. qu'il mit en état d'être préfentée au faint fiége; & Alexandre Raynal. hoc. VIl'ayant approuvée, confirma fon ordre dans cette année 1493. Il changea auffi le nom d'ermites que portoient ces religieux, en celui de Minimes. Vers le même temps cet ordre s'établit en Espagne sous la protection des rois Ferdinand & Ifabelle, auxquels S. François envoya des religieux de fon couvent du Pleffis; & ils y furent nommés les frères de la victoire, à cause de la prise de Malaga fur les Maures, que Ferdinand attribua aux prières & aux mérites du faint. Charles VIII, roi de France, n'étoit pas moins pénétré d'eftime pour ses vertus ; il l'honoroit d'une manière encore plus particulière que Louis XI fon père. Il alloit fouvent le vifiter au Pleffis pour recevoir fes avis dans ce qui regardoit les affaires de fa confcience; & pour faire connoître jufqu'à quel point il l'honoroit, il lui fit tenir le dauphin fon fils fur les fonts de baptême, & voulut qu'il le nommât. Il lui fit bâtir un monastère dans le parc du Pleffis près de Tours, dans le lieu appelé les Montils, avec une penfion fuffifante pour lui & pour fes religieux; & un autre à Amboise à l'endroit même où, n'étant encore que dauphin, il avoit reçu le faint à fon arrivée en France; & il voulut que les religieux de ce monastère fuffent entretenus fur les revenus annuels de fes finances. Son affection pour faint François de Paule ne se borna pas à ces deux établiffemens; car étant à Rome en 1495, pour y recevoir la couronne de CP. des mains du pape, il fit conftruire une église fur le mont Pincio, fous le titre de la fainte Trinité, & obtint du pape qu'elle feroit pour toujours deffervie par des religieux Minimes de la nation Françoise,

LXXVI.

un bref d'ab

Pic de la Mirandole s'étant foumis au jugement du faint Pic de la Mi- fiége touchant les pourfuites qu'on avoit faites contre lui, au randole e- fujet de quelques propofitions qui avoient été extraites de çoit du pape fes thèfes, & qu'on a rapportées ailleurs; le pape lui donfolution, na, le dix-huitième de Juin de cette année, un bref d'abfoSup. I. cxvI. Jution où il reconnoît fon innocence & la pureté de fes fentimens: il confondit par-là fes ennemis qui l'avoient cacollect, jud. lomnié injustement. Pic, après avoir été fi glorieusement jus 1.P.313 tifié, ne s'appliqua plus dans tout le refte de fa vie, qui fut fort court, qu'à l'étude de l'écriture fainte; qu'à combattre les Juifs & les Mahometans dans les ouvrages qu'il

n. 69.

D'Argentré

[ocr errors]

compofa; & qu'à confondre l'aftrologie judiciaire. Il renonça AN. 1493. même à fa fouveraineté de la Mirandole, & diftribua tout

fon bien aux pauvres, affligeant fon corps par les jeûnes & les auftérités de la pénitence, & ne s'appliquant qu'à la prière.

LXXVII.

la faculté de

ciaire.

to. 1. p. 3:4

En 1492, la faculté de théologie de Paris cenfura une oraison qu'on répandoit contre la pefte, comme éloignée, Cenfure de des cérémonies approuvées par l'églife, & fort fufpecte de théologie de fuperftition. Sa censure est du fixième du mois d'Août. En Paris, tou[1493, la même faculté fut confultée par le parlement, tou- chant l'afrologie judichant un certain Simon Pharès qui faifoit profeffion de l'aftrologie judiciaire. Cet homme avoit déjà été interdit par D'Argentre l'archevêque de Lyon, & arrêté dans cette ville par l'ordre collect. judic. de l'official: fes livres avoient été confifqués; & par une Ex. 1. regift. sentence on lui avoit défendu d'exercer à l'avenir l'aftrologie MS. cenfur. judiciaire, & on l'avoit condamné à quelque peine pour facra facul Parif. p. 137 l'avoir fait. Pharès avoit appelé de cette fentence au parlement, qui ne voulut point juger de cette affaire fans avoir l'avis de la faculté, à laquelle il renvoya les livres d'astrologie faifis par l'official de Lyon, afin qu'elle les examinât. La faculté nomma des députés, & fur leur rapport on dreffa un acte au nom de la faculté, qui contenoit le jugement que les députés avoient porté de tous ces livres, & par lequel elle exhortoit le parlement à s'oppofer aux progrès de cet art qu'elle déclare pernicieux, fabuleux, fans fondement, fuperftitieux, ufurpant l'honneur de Dieu, corrompant les bonnes mœurs, & inventé par les démons pour la perte hommes, Cet acte eft du deuxième de Mai 1494. On y voit les titres d'un grand nombre de livres d'aftrologie, & en peu de mots ce qu'ils contiennent. En conféquence de cet. acte, le parlement rendit un arrêt qui confirme la fentence de l'official de Lyon, fait défenses d'exercer l'aftrologie judiciaire, de confulter les devins, de débiter les livres qui traitent de cet art, de s'en fervir; & ordonne que ceux de ce Simon Pharès feront remis avec fa perfonne entre les mains de l'official de Paris.

des

LXXVIII. Autres cen

La même faculté condamna encore deux propofitions fures de-quelavancées dans la thèse appelée forbonique, par un Corde- ques propofilier nommé Henri Bancqueville, dont la première étoit tions. conçue en ces termes : l'homme a été fait Dieu; & la fe- collect. judic. conde: Jefus Chrift a commencé d'être, Celle-là eft déclarée, pag. 331.

D'Argentré

146.

12. in-4°. p. 251.

à la rigueur, fauffe & erronée; & on ne doit ni l'enseigner, AN. 1493 ni la foutenir, fi ce n'eft en exprimant le fens dans lequel Ex. 1. regift. cenfurar. fol. quelques docteurs l'avoient avancée, c'eft-à-dire qu'il est arrivé que l'homme eft Dieu. Celle-ci eft auffi déclarée Dupin tom. fauffe, fcandaleufe & hérétique, étant prife à la rigueur. La cenfure eft du dixième du mois d'Août. Sur la fin de la même année, Jean Grillot du même ordre, ayant prêché le jour de la conception de la fainte Vierge le foir & le matin dans l'églife de faint Germain l'Auxerrois, & ayant pris pour texte ces paroles de l'évangile : cette femme a été furprise en adultère; apporta des raisons pour montrer que la fainte Vierge avoit été conçue en péché, quoiqu'il eût établi le contraire dans le fermon de l'après-midi. Sur cela il fut cité devant la faculté, qui l'obligea de fe rétracter, ce qu'il fit le vingt-cinquième de Décembre, les uns difent de l'année 1495, & d'autres de 1493.

LXXIX.

Volaterran.

Surita tom.

Mém. -de

Le roi de Naples ayant épuifé toute fa politique, pour déMort de Fer- tourner l'orage qui le menaçoit, & voyant que Charles VIII dinand, roi n'avoit point été ébranlé par les offres avantageufes qu'il lui de Naples. avoit faites; qu'il ne pouvoit fe fier au pape, qui ne penfoit lib. 6. qu'à le facrifier à fon intérêt & à fon ambition; que Pierre Angel Polit. de Medicis ne pouvoit fe difpenfer d'accorder le paffage in epift. 1. 2. aux François par les états de Florence; qu'enfin fa dernière 5. l. 1. c. 23. reffource étoit Ludovic Sforce, de qui il ne pouvoit rien Mariana, efpérer d'avantageux, fe réfolut enfin d'aller trouver luihift. Hifp. 1. 26. c. 6 même ce dernier prince à Milan, & de s'humilier devant lui Guicchardin jufqu'à reconnoître qu'il tiendroit de lui fon falut. Il étoit hift. Ital 1.1. prêt de s'embarquer pour ce voyage; lorfqu'il apprit que fes ambaffadeurs en France avoient eu ordre de fortir inceffamment de ce royaume. Cette nouvelle le frappa fi vivement, qu'il fut attaqué d'apoplexie dans le moment même, & il mourut un famedi vingt-cinquième de Janvier, âgé dé plus de foixante-dix ans & après un règne de trente-fix. Tous les auteurs qui ont parlé de ce prince, difent qu'il Caractère de étoit en exécration au peuple, à caufe de fes monopoles & ce roi & de de fes cruautés, quoiqu'il fe piquât d'une profonde fageffe & d'une grande politique : auffi fut-il le moins regretté de tous les fouverains qui avoient régné depuis Neron ; & à dire le vrai, il n'avoit pas affez bien traité les Napolitains, pour qu'ils fuffent fenfibles à fa perte. Il fembloit qu'il eût affecté de régner en tyran, & non en roi ; & ce qui redoubla

Comines,

7. c. 11.

LXXX.

1.

fon fils Alphonfe.

« AnteriorContinuar »