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montagnes d'Arménie avec fon autre fils, pendant que Ma AN. 1473. homet ayant ravagé tout le pays, s'en retourna à Conftantinople, emmenant avec lui beaucoup de prifonniers. Il en faifoit couper cinq cents par le milieu du corps à chaque logement qu'il faifoit, pour répandre par-tout la terreur.

III.

fur la flotte

dec. 9.

lib.

9.

On dit alors qu'un jeune Sicilien nommé Antoine vint Entreprise trouver Mocenigo, général de la flotte Vénitienne, à Nahardie d'un poli de Romanie, ville du Peloponèse, où il paffoit l'hiver; jeune Sicilien & lui dit que les Turcs l'ayant pris à Chalais, & l'ayant de Mahomet, enfuite mené à Gallipoli où il fervoit, il s'étoit aperçu que Coriolan, la flotte de Mahomet n'y étoit point gardée, non plus qu'un lib. z. grand arfénal, qui étoit proche, & dans lequel il y avoit Sabellic. 3: de quoi équiper plus de cent galères; qu'il s'offroit d'aller Juftiniani, brûler l'un & l'autre. Mocenigo le loua de fon deffein, accepta fes offres, & lui fournit tout ce qui étoit néceffaire. Le jeune homme prit une chaloupe remplie de pommes, & ayant paffé les Dardanelles en marchand fruitier, il arriva à Gallipoli, où il commença à vendre fes pommes. La nuir fuivante il mit le feu à l'arfénal, qui fut confumé. Mais ayant voulu faire la même chofe à la flotte, le fuccès ne fut pas fi heureux; on accourut au bruit, on éteignit le feu : & le Sicilien voyant que fon entreprife avoit échoué, prit la fuite dans la crainte d'être arrété, & tâcha de paffer l'Hellefpont; ce qu'il ne put faire, parce que fa chaloupe coula à fond. II fut donc obligé de fe fauver dans la forêt prochaine, où il fut reconnu pour l'auteur de l'incendie, par le moyen du refte de fes pommes qui flottoient fur l'eau. On le faifit, & on le conduifit à Mahomet, qui le fit couper par le milieu du corps; ce qu'il fouffrit avec beaucoup de conftance. Le fénat de Venife fit une pension à son père, & maria sa sœur des deniers publics.

IV.

un traité de

Pendant que les Vénitiens faifoient ainfi la guerre aux On projette Turcs, le pape eut avis que Mahomet follicitoit fort Matpaix entre le thias, roi de Hongrie, à faire la paix, & à tourner toutes roi de Hon- fes forces contre le roi de Perfe; que déjà Matthias avoit grie & Ma- envoyé fes ambaffadeurs à Conftantinople pour convenir

homet.

des articles du traité, & qui demandoit entre autres la reftitution de la Bofnie & de la Servie, ou du moins de l'une de ces deux provinces, promettant de fon côté de faire la Papienf. ep. guerre au roi de Perfe, fi le Turc lui fourniffoit l'argent néceffaire. Sur ces nouvelles, le pape écrivit promptement

516. 517.

à

à Matthias pour le détourner d'un deffein fi pernicieux; & manda à Louis, évêque de Ferrare, fon nonce en Hongrie, AN. 1473. d'examiner foigneufement fi cette paix dont on parloit, n'étoit point une feinte controuvée par Matthias, pour tirer de l'argent du faint fiége: ce qui pouvoit bien être, puifque la paix ne fe fit pas, à moins qu'on ne dife que Mahomet ayant battu le roi de Perse, se mit enfuite peu en peine du roi de Hongrie.

V.

Mort de Jac

de

Coriolan >

Jacques, ufurpateur du royaume de Chipre, mourut cette année. Il étoit fils naturel de Charlotte, reine légitime de ques, ufurpaChipre, qui étoit mariée à Louis, duc de Savoie ; mais le teur du rodéfir de régner lui fit tout entreprendre pour chaffer l'un & yaume l'autre, & il y réuffit par le fecours que lui procura le fou- Chipre. dan d'Egypte. Charlotte obligée de fuir fe retira à Rhodes, 1. 1. & 3. & tenta en vain de rentrer dans fes états. Elle vint enfuite à Rome pour implorer l'affistance du pape : mais tous les projets que l'on fit pour fon rétablissement échouèrent. Voyant fon ennemi mort, fes efpérances fe renouvellèrent, mais Jacques avoit pris des mefures pour empêcher qu'elle ne rentrât dans fes états. Il avoit fait un teftament, par lequel il inftituoit fes héritiers Catherine fon époufe, fille de Marc Cornaro, fénateur Vénitien, qui étoit enceinte, & l'enfant qui en naîtroit. Et avant de mourir, il recommanda l'un & l'autre au fénat & au général Mocenigo. Si l'enfant que l'on attendoit de Catherine mouroit, Jacques ordonnoit par le même teftament que Jean fon fils bâtard fuccéderoit; au défaut de ce dernier, un autre bâtard de même nom, & à leur défaut, Charlotte fa fille bâtarde: & que fi tous ceux-là mouroient fans poftérité, l'île de Chipre pafferoit au plus proche de la maifon de Lufignan. Le fénat, qui avoit adopté Catherine, confentit à toutes les claufes du teftament; & le général Mocenigo prit le gouvernement de cet état. Ce fut à lui que Charlotte s'adreffa : elle lui remontra fes droits, le preffa de lui rendre juftice, & de la rétablir dans fon royaume ; fes prières furent inutiles. Mocenigo lui répondit que le royaume étoit acquis par le droit des armes à Catherine, veuve de Jacques, & à l'enfant qui en naîtroit, & qu'on ne pouvoit en reconnoître d'autre: & Charlotte ceffa fes poursuites, ne pouvant faire autrement. Peu de temps après Catherine accoucha d'un fils qui fut nommé comme fon père, & couronné deux mois après.

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VI.

L'archevê

fercndre maî

tre du royau

me.

Etienne de
Lufignan
List. de Chi

Mais il s'éleva contre elle un ennemi beaucoup plus à AN. 1473 craindre que Charlotte. L'archevêque de Chipre, Catalan de nation, qui étoit alors ambaffadeur auprès de Ferdinand, que de Chi- roi de Naples, n'eut pas plutôt appris la mort du roi, qu'il pre fonge à penfa férieufement à fe rendre maître de la couronne, avec le fecours des Catalans qui y poffédoient beaucoup de fortereffes. Pour y réuffir, il engagea Ferdinand de marier fon fils bâtard avec Charlotte, autre bâtarde de Jacques, & après cet accord il partit avec un envoyé du roi de Naples. A leur arrivée ils firent affaffiner un oncle & un coufingermain de la reine Catherine. L'archevêque fiança le fils de Ferdinand avec la fille de Jacques qui n'avoit encore que fix ans, & on lui donna la qualité de prince de Galilée fuivant la coutume des Cypriots, qui croyant leur fouverain roi de Jérufalem, donnoient ce premier titre à celui qui devoit fuccéder au royaume. Les deux conjurés s'emparèrent des places & de tous les forts de l'île. Ils voulurent contraindre la reine Catherine d'écrire à Venife qu'elle avoit plein pouvoir de commander avec fon fils, & que fon oncle n'avoit été tué qu'à caufe de fon ambition démefurée & fon avarice fordide; mais elle ne le voulut point.

pre.

VII.

Charlotte l'ancienne reine, voyant qu'elle ne pouvoit Cenion des plus efpérer de rentrer dans le royaume de Chipre, y reétats de Chi- nonça folennellement en préfence du fouverain pontife & pre en faveur des cardinaux, en faveur d'Amedée IX, duc de Savoie du duc de Sa- frère de Louis fon mari: elle prit le parti de rester à Rome, Aneas Sylv. & le pape lui affigna une penfion honnête. Elle y mourut le Afia cap. 97. feizième de Juillet 1487, & fut enterrée dans l'église de S. & comment. Pierre.

voie.

Lib.7.

Concile de

Mariana,

L'ignorance régnoit tellement en Espagne, même parmi VIII. les eccléfiaftiques, qu'à peine s'en trouvoit-il quelques uns Madrid & de qui fuffent le latin. La bonne chère & la débauche étoient Toléde en leurs plus ordinaires occupations; le concubinage étoit prefEspagne. que public parmi eux, & le moindre de leurs déréglemens hift. Hifpan. étoit de porter les armes & d'aller à la guerre. Rien n'étoit 1. 23. c. 18. plus commun que de vendre & d'acheter des bénéfices : ε19 on ne s'en faifoit pas même de fcrupule. Le cardinal de Borgia, légat du pape, étant encore à Madrid, on tint une affemblée extraordinaire des prélats du royaume & des plus confidérables eccléfiaftiques, pour les affaires de fa légation; & dans cette affemblée on propofa auffi des moyens

Conc. t. 13.

P. 1449.

pour réformer les abus dont nous venons de parler. On réfolut entre autres de demander à fa fainteté qu'elle permit AN. 1473déformais qu'il y eût dans toutes les églifes cathédrales deux canonicats, dont l'un fe donneroit à un théologien, & l'autre à un jurifconfulte ou à un canonifte, & que ces deux chanoines feroient choilis par l'évêque & le chapitre conjointement. Le pape fit auffitôt expédier une bulle pour confirmer cette demande.

Mais comme ce règlement ne fuffifoit pas pour remédier à tous les défordres, dom Alfonfe de Carillo, archevêque de Tolède, convoqua un concile provincial des évêques fes fuffragans dans la ville d'Aranda. Ce concile fut très-nombreux. On dit que l'intention fecrète de l'archevêque en l'affemblant, étoit de fortifier le parti de Ferdinand & d'Ifabelle auxquels ce prélat étoit entièrement dévoué, en cherchant les moyens d'attirer dans leurs intérêts ceux qui fe trouveroient à cette affemblée. Quoi qu'il en foit, on y fit vingt-neuf règlemens fur la difcipline eccléfiaftique dont les principaux font: que les archevêques tiendroient des conciles provinciaux au moins tous les deux ans, & les évêques des fynodes tous les ans : que les pafteurs auront foin d'avoir par écrit les articles de foi, & de les faire connoître au peuple : qu'on ne conférera point les ordres facrés à ceux qui ne fauront pas le latin : qu'on ne recevra point les clercs d'un autre diocèfe fans des lettres de leurs évêques que les eccléfiaftiques ne porteront point de deuil : que les évêques ne paroîtront jamais en public qu'en rochet & en camail: qu'ils ne porteront jamais d'habits de foie, & qu'ils fe feront lire l'écriture fainte à leur table pendant leur repas qu'ils célébreront la meffe au moins trois fois l'année, & les autres prêtres quatre fois : que l'on obfervera les dimanches & les fêtes en s'abftenant de toute œuvre fervile: que les eccléfiaftiques ne ferviront point de foldats, ni n'en fourniront point aux feigneurs temporels à l'exception du roi qu'on ne célébrera point les noces dans les temps défendus. Les autres canons contiennent des règlemens contre les eccléfiaftiques concubinaires, contre les mariages clandestins, la fimonie, les spectacles qu'on représentoit dans les églifes, les jeux défendus aux gens d'églife, les duellistes, les raviffeurs & autres.

IX.

Le dix-feptième de Juin le pape écrivit au vicaire de Lepape con

firme la bulle

Boulogne pour s'informer de lui s'il étoit vrai que quelques AN. 1473. religieux Carmes euffent eu la témérité de foutenir dans les de Paul II für difputes & dans leurs fermons, que ce n'étoit point une héla réduction réfie de confulter les démons. Le vingt-neuvième d'Août il du jubilé. confirma la conftitution de Paul II fur la réduction du jubilé Papienf. ep. à vingt-cinq ans, & fit publier qu'il le commenceroit la

$48.

X.

veille de Noël de l'année suivante 1474, voulant que tou

tes les indulgences accordées dans toute l'église fufsent fufpendues pendant tout le temps que dureroit le jubilė.

Le neveu du pape, Pierre Riario, Cordelier & cardinal Le cardinal de faint Sixte, faifoit toujours des dépenfes exceffives à Riario nom- Rome: il donna dans cette année deux repas fi fomptueux, mé légat de toute l'Italie. que le cardinal de Pavie ne fait pas difficulté de dire qu'on

XI.

Minimes.

n'en avoit jamais donné de pareils dans les fiècles précédens, même parmi les païens. Il donna le premier aux ambaffadeurs de France, & l'autre à la fille de Ferdinand, roi de Naples, épouse d'Hercule d'Eft, duc de Ferrare, à laquelle il fit des préfens confidérables, qui marquoient l'exceffive prodigalité du cardinal. Celui de Pavie gémit de ces excès dans fes lettres. Riario fut nommé cette année par le pape fon oncle à la légation de l'Ombrie, & enfuite de toute I'Italie on lui fit des entrées magnifiques dans les principales villes, où l'on étoit bien aife de flatter fa vanité, pour fe ménager les bonnes grâces du faint père.

:

Le vingt-troisième de Mai le pape confirma la règle des Le pape con- religieux Minimes, inftitués par François de Paule, comme firme la règle on a dit ailleurs. Ce faint, retiré dans un rocher fur le bord des religieux de la mer, n'avoit point d'autre lit que le roc, point d'auBullar tom. tres alimens que des herbes & des racines, point d'autre 1. Sixt. IV. vêtement qu'un rude cilice fous un habit fort vil. Il comconflitut. 5. mença à avoir des difciples à l'âge de vingt ans ; il les affembla dans un petit ermitage qu'on bâtit en ce lieu. Là ils chantoient ensemble les louanges de Dieu, & un prêtre de la paroiffe voifine venoit de temps en temps dire la meffe. Mais le nombre de fes difciples augmentant, avec la charité des fidelles qui contribuoient au foutien de ce nouvel institut, François fit conftruire un plus grand monaftère & une églife, avec la permiffion de Pyrrho, archevêque de Cofenza. Ce bâtiment étant achevé, il établit dans fa communauté un régime uniforme, en affujettiffant fes difciples par un quatrième vœu à l'obfervance d'un carême continuel

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