Imágenes de páginas
PDF
EPUB

PARVENU,

OU LES

MEMOIRES

DE M***

Par Monfieur DE MARIVAUX,

SECONDE PARTIE. ‹

JA

A FRANCFORT,

AUX DEPENS DE LA COMPAGNIE,

M DCC XXXVII.

[blocks in formation]

'ai dit dans la premiere partie de ma vie, que Mademoiselle Haberd la Cadette m'appella pendant que fa Sour s'endormoit.

Mon fils, me dit-elle, nous vous retenons; j'y ai fait confentir ma fœur, & je lui ai répondu de votre fagefle; car je crois que votre phyfionomie & vos difcours ne m'ont point trompée; ils m'ont donné de l'amitié. pour vous & j'efpere que vous la mér terez. Vous ferez avec Catherine, qui eft une bonne & vertueufe fille, & qui m'a paru auffi vous

A 2

voir

voir de bon œil; elle vous dira de quoi nous fommes convenus pour vous; je pense que vous aurez lieu d'être content, & peut-être dans les fuites, le ferez-vous encore davantage; c'est moi qui vous en affûre. Allez, mon fils, allez dîner, foyez toujours auffi honnête garçon que vous le parouffez; comptez que je vous éftime, & que je noublierai point avec quel bon cœur vous m'avez secourue ce matin dans ma foibleffe.

Il y a des chofes dont on ne peut rendre ni l'efprit ni la maniere; & je ne faurois donner une idée bien complette, ni de tout ce que fignifioit le difcour de Mademoiselle Haberd, ni de l'air dont elle me le tint. Ce qui eft de fûr, c'eft que fon vifage, fes yeux, fon ton, difoient encore plus que les paroles, ou du moins, ajoûtoient beaucoup au fens naturel de fes termes; & je crus y remarquer une bonté, une douceur affectueufe, une prevenance pour moi, qui auroient pû n'y pas être, & qui me furprirent en me rendant curieux de ce qu'elles vouloient dire.

Mais attendant, je la remerciai presque dans le même goût, & lui répondis avec une abondance de cœur, qui auroit merité correction, fi mes remarques n'avoient pas été juftes; & apparemment qu'elles l'étoient, puifque ma façon de répondre ne déplut

point.

« AnteriorContinuar »