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DIALOGUE

D'HERCULE, D'ESCULAPE,ET DE JUPITER,

JUPITER. N'Avez-vous point de

honte de vous entre

battre comme des coquins, & de vous quereller jufqu'à la table de Jupiter? HERCULE. Eft-il jufte, mon pere, que ce Charlatan paffe devant moy? ESCULAPE. Non pas Charlatan ; mais le Dieu de la Medecine, qui vaut mieux cent fois que toy, & tous tes femblables.

HERCULE. En quoy eft-ce, impof teur, que tu vaudrois mieux que moy, Eft-ce pour avoir efté frappé de la foudre pour ton beau fçavoir : car on ne t'a mis dans le Ciel que par pitié.

ESCULAPE. Il te fied bien de me reprocher ma mort, aprés avoir esté bruslé tout vif fur le Mont Oëta comme un criminel!

HERCULE. C'a efté volontairement

lorfque j'eus purgé l'Univers de monftres. Mais pour toy, qu'as-tu jamais fait que l'empirique, comme ces affronteurs qui vantent de vains fecrets par où ils fe font admirer ?

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ESCULAPE. Tu as raifon; car c'est moy qui te donnay de l'onguent pour la bruflure, lorfque tu montas icy tout grillé. Mais je n'ay jamais efté comme toy, efclave d'une impudique, qui te faifoit filer, & te fouffletoit lorfque tu manquois à ton devoir. D'ailleurs, je n'ay point tué ma femme, ny mes enfans comme tu as fait.

HERCULE. Si tu ne te tais, tu porteras la peine de ton infolence, & je te feray faire une culebute du Ciel en terre, dont tu auras bien de la peine à guerir, quelque habile que tu fois dans la Medecine.

JUPITER. Et moy, fi Vous ne vous arreftez, je vous mettray tous deux dehors par les épaules. Qu'Efculape paffe le premier, puis qu'il eft le plus ancien.

Et te fouffletoit: Il y | employée, & la repea au Grec, feffoit avec tition n'en feroit pas un patin d'or; mais agreable. certe phrafe eft déja

DIALOGUE

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DIALOGUE

DE MERCURE ET D'APOLL ON.

MERCURE.

Q

U'as-tu,Apollon,d'eftre

ainfi trifte?

APOLLON. Qui ne le feroit, eftant fi

malheureux en amour ?

MERCURE. Quel malheur t'eft-il arrivé depuis la perte de Daphné? APOLLON. La mort d'Hyacinthe. MERCURE. Qui l'a tué?

APOLLON. Moy-mefme.

MERCURE. Eftois-tu en fureur comme tu y es quelquefois ?

APOLLON. Non; mais comme je joüois au palet avec luy, Zephyre jaloux de noftre amitié, a emporté le palet, & luy en a caffè la tefte. Je lay poursuivy vainement jufqu'aux Montagnes; car qui pourroit atteindre le vent ? Mais au retour Pay efté contraint de faire les funerailles de mes amours avec celles d'Hyacinthe. Toutefois, pour me confoler, j'ay fait naiftre une fleur de fon fang, qui eft illuftre pour fon odeur & pour fa beauté,

Ie l'ay poursuivy vainement: Je le trouve plus joly de la forte, Tome I.

que de dire qu'il s'en et vangé..

K

& qui porte la marque de mes regrets & de mes plaintes ; mais je ne laifferay pas de le regretter toute ma vie.

MERCURE. Tu as tort, Apollon; car ceux qui aiment les chofes mortelles, fe doivent réfoudre à les perdre.

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AUTRE DIALOGUE

D'APOLLON ET DE MERCURE. MERCURE. 'Eft une chose étrange,

CApollon, que Vulcain

ait époufé les plus belles de toutes les Déeflès; & je ne fçay comme elles ont le courage de l'embraffer, lors qu'au retour de fa forge il eft tout couvert de fuye & de fueur.

APOLLON. Ilya dequoy s'en eftonher,& principalement à un Amant infortuné comme moy,qui fuis un peu mieux fait que luy, pour ne rien dire davantage.

MERCURE. Vante maintenant ta beauté & ton harmonie, & moy ma force & mon adreffe: lors qu'il fe faudra coucher, nous nous trouverons toutfeuls; tandis qu'un miferable courtaut de boutique tout eftropié careffera Venus &

les Graces.

Careffera Venus les Graces: Le Grec dit

:

APOLLO N. Encore as-tu eu quelque bonne fortune en ta vie, ce qui peut fervir à te confoler; car tu n'as pas autrefois déplû à Venus, & en as eu l'hermaphrodite Mais moy de deux perfonnes que jay fervies, l'une a mieux aimé estre changée en arbre, que de me fouffrir; & j'ay tué l'autre, par malheur, en me jouant. Mais, dy-moy; comment ces Déeffes ne font -elles point jaloufes les unes des autres ?

MERCURE. C'eft que Venus paffe fon temps dans le Ciel, tandis que les Graces font dans l'Ifle de Lemnos avec Vulcain.

APOLLON. Penfes-tu qu'il fçache les débauches de fa femme ?

MERCURE. S'il les fçait il n'en faut point douter; mais il n'en oferoit rien dire, car il craint la colere de Mars: Tu fçais comme les gens de guerre font infolens, & particulierement envers les Artifans comme luy.

APOLLON. On dit pourtant qu'il leur dreffe quelque piége.

la Grace, mais on ne diroit pas en François careffer la grace, puifque les Graces ne fe feparoient point.

Qu'il leur dreffe quelque piége: Je fais dire cela à Apollon, afin que Mercure dife le refte, qui luy vient

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