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erucifiez celuy qui eft caufe que vous mere leur avez des Autels & des Hecatombes. Mais donne. c'eft affez de cela; parlons maintenant du larcin du feu. Et premierement, vous l'ay-je dérobé, pour l'avoir donné aux hommes ? N'eft-ce pas la nature de cet élement de fe communiquer fans fe perdre ? C'eft donc une jaloufie toute pure, indigne de ceux que les Poëtes appellent des Bienfaicteurs. D'ailleurs, quand j'au rois dérobé tout le feu du Ciel, je ne vous aurois fait aucun tort. On ne fait roftir ni bouillir l'Ambroifie; au lieu que les hommes en ont befoin tous les jours pour leurs petites neceffitez, quand ce ne feroit que pour vous faire des Sacrifices. N'eft-il pas vray que vous n'eftes jamais plus aife, que quand vous pouvez aller humer la fumée de quelque ho locaufte? de forte que vos plaintes fon contraires à vos defirs. Je m'eftonne que vous n'ayez défendu au Soleil de leur envoyer la lumiere, qui eft un feu beaufa coup plus brillant & plus pur, & que vous ne l'accufez de prodiguer vos trefors, & de diffiper voftre bien. Voilà tout ce que j'avois à dire pour ma défense. C'eft à vous d'y répondre fi vous pouvez ; mais je demande fa replique.

MERCURE, Il n'est pas aifé de ré

pondre à un fi impudent Sophifte: tu es bienheureux que Jupiter ne t'a point ouï; car je fuis affuré qu'il t'envoyeroit une douzaine de Vautours au lieu d'un, tant tu l'as vilainement outragé fous prétexte de te défendre. Mais dy-moy, pourquoy estant Prophete, n'as-tu point fçû ce qui te devoit arriver?

PROMETHE E. Je l'ay bien fçû, Mercure: mais j'ay fçû auffi que je ferois délivré par un Heros de tes amis, qui viendra de Thébes, & qui tuëra mon Vautour. MERCURE. Je voudrois qu'il fuft déja arrivé, & que nous fuffions à table enfemble comme auparavant, pourveu que tu ne fiffes point les parts.

PROMETHEE. Patience, tu m'y reverras encore; car Jupiter me délivrera pour un fervice important que je luy rendray.

MERCURE. Quel eft-il?

PROMETHE'E. Tu connois Thetis: mais je ne veux point divulguer un fecret qui doit faire ma délivrance.

Un Heros de tes amis; Cela eft contraire à ce qu'il dit aprés, & qui eft confirmé par la fuite; car c'eft Jupiter qui le délivre : mais on

peut
dire que c'eft
par
l'entremile d'Hercule;
toutefois il met Vul-
cain dans le Dialogue
fuivant, qui eft une
contradiction,

MERCURE. Si cela eft, tu as raifon de n'en rien dire. Allons, Vulcain, je vois déja l'oifeau qui vient fondre fur fa proye, & je voudrois que le liberateur fuft aufli proche que le danger,

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DIALOGUES

DES DIEUX.

Le Sujet est touché dans Largument du Dialogue precedent: Au reste une partie des Fables eft expliquée icy, d'une façon agreable, & qui aide beaucoup

à les retenir.

DIALOGUE

DE PROMETHE'E ET DE JUPITER.

PROMETHE'E.

Dje n'en puis plus.

Elivre-moy, Jupiter,

JUPITER. Que je te délivre, méchant? Eft-ce pour avoir fait ce beau chefd'œuvre qui nous caufe tant de mal, ou pour avoir dérobé le feu du Ciel, & trompé ton Maiftre dans un festin?

Est-ce pour avoir fait ce beau chef-d'œuvre ? Il ne falloit pas l'expliquer davantage, aprés

l'avoir efté au Dialogue précédent ; le refte cft touché plus bas.

PROMETHEE. N'ay-je pas affez fouffert, attaché depuis fi long-temps au Caucase, & nourriffant de mes entrailles le plus cruel de tous les Vautours?

JUPITER. Ce n'eft pas la centiéme partie de ce que tu as mérité. Tu devrois eftre écrafé du Caucafe, & non pas y eftre attaché; & n'avoir pas feulement le foye rongé par douze Vautours, mais encore les yeux & le cœur.

PROMETHEE. Tu ne te repentiras point de m'avoir fait cette grace.

JUPITER. C'eft que tu as envie de me tromper encore une fois.

PROMETHEE. A quoy cela ferviroit-il ? As-tu oublié où eft le Caucase? & n'as-tu point d'autres moyens de me punir, quand celuy-là te manqueroit? JUPITER. Mais encore que me veuxtu dire?

PROMETHEE. Si je te dis où tu vas, me croiras-tu?

JUPITER. Pourquoy non?
PROMETHEE. Tuvas, coucher avec

une Nereide.

Nereide; Son nom

eft exprimé au Dialogue-cy-deffus: quel ques-uns ne croyent pas que Thetis la Decl

fe de la mer, foit la mefme que la Nereïde, mais Lucien les con fond...

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