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de réparer l'injure & la honte de fon NOTHUS. exil par la gloire de fon rappel, & d'effacer le fouvenir des anathêmes qu'eux-mêmes avoient ordonnés, par les vœux & les priéres qu'ils faifoient en fa faveur. Tous les Eumolpides & les Hérauts étant occupés à révoquer leurs imprécations, le principal d'entre eux, nommé Théodore courage de dire,Mais moi je ne l'ai point maudit, s'il n'a point fait de mal à la ville; infinuant par cette parole hardie, que les malédictions, étant conditionnelles, ne pouvoient ni tomber fur la tête des innocens, ni être détournées de celle des coupables.

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eut le

Au milieu de cette gloire & de cette profpérité brillante d'Albiciade, la plus grande partie du peuple ne laiffoit pas d'être troublée quand on confidéroit le tems de fon retour. Car il étoit arrivé justement le jour où les Athéniens célébroient une fête en l'honneur de Minerve, adorée fous le nom d'Agraule. Les Prêtres ôtoient à la ftatue de la déeffe tous fes ornemens pour la laver, ce qui fit appeller cette fête Plunteria, & la cou vroient ensuite; & ce jour étoit regardé comme un des plus funeftes &

DARIUS Eumolpides & les Hérauts de fe préparer, envoie des fentinelles fur les hauteurs, détache quelques coureurs dès la pointe du jour, & prénant les Prêtres, les Initiés, & les Confreres avec ceux qui les initioient, & les couvrant de fon armée, il conduit toute cette pompe avec un ordre merveilleux, & dans un très grand filence. Jamais il n'y eut, dit Plutarque, de fpe&tacle plus augufte, ni plus digne de la majefté des dieux, que cette proceffion guerrière & cette expédition religieuse, où ceux qui ne portoient point d'envie à la gloire d'Alcibiade, étoient obligés d'avouer qu'il ne réuffiffoit pas moins à faire les fonctions de Grand-Prêtre, que celle de Général. Aucun des ennemis n'ofa paroître, ni troubler cette pompeufe marche; & Alcibiade ramena la facrée troupe dans Athénes avec une entiére fûreté. Ce fuccès lui éleva encore plus le courage, & augmenta fi fort la fierté & l'audace de fon armée, qu'elle fe regardoit comme invincible pendant qu'il la commanderoit.

Il

gagna tellement l'affection des pauvres & de tout le bas peuple, qu'ils fouhaitoient avec une paffion démé

furée de l'avoir pour Roi. Plufieurs NOTHUS. s'en expliquoient hautement, & il y en eut qui s'adreffant à lui-même l'exhortérent à fe mettre au deffus de l'envie, à ne s'embarraffer ni des loix, ni des décrets, ni des fuffrages, à écarter les brouillons qui troubloient l'Etat par leurs vains difcours, & à fe rendre entiérement maître des affaires pour gouverner avec une pleine autorité, fans craindre les délateurs. Pour lui, on ne fauroit dire quelle étoit fa pensée fur la tyrannie, ni quel étoit fon deffein: mais les plus puiffans, craignant un embrafement dont ils voioient déja des étincelles, le prefférent de partir fans différer, en lui accordant tout ce qu'il demanda & en lui donnant pour collégues les Généraux qui lui étoient les plus agréables. Il mit donc à la voile avec cent vaiffeaux, & dirigea fa course vers l'île d'Andros qui s'étoit révoltée. Sa haute réputation,& le bonheur qu'il avoit toujours eu dans toutes fes entreprises, faifoient qu'on n'attendoit rien de lui que de grand & d'extraordinaire.

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DARIUS

Xenoph. Hel

P. 440-442.

§. IV.

Les Lacédémoniens nomment pour Amiral
Lyfandre. Il devient fort puissant au-
près du jeune Cyrus qui commandoit en
Afie. Il bat près d'Ephefe la flote des
Athéniens pendant l'absence d' Alci-

biade. On ôte le commandement à celui-
ci, & l'on nomme dix Généraux à fa
place. Callicratidas fuccéde à Lyfan-

dre.

LES LACEDEMONIENS, justement len. lib. 1. allarmés du retour & des heureux fucPlut. in Lyf cès d'Albiciade, comprirent qu'un tel P. 434-435 ennemi demandoit qu'on lui opposât P. 192-197. un habile Général, capable de lui te

Diod. 1. 13.

nir tête. Dans ce deffein ils choisirent Lyfandre, & lui donnérent le commandement de la flote. Quand il fut arrivé à Ephéfe, il trouva la ville très favorablement difpofée pour lui, & très affectionnée pour Sparte, mais d'ailleurs dans une trifte fituation.Car elle étoit en danger de devenir barbare en prenant les mœurs & les coutu mes des Perfes, qui y avoient un grand commerce tant à cause du voifinage de la Lydie, que parce que les Généraux du Roi y paffoient pour l'ordi

naire leurs quartiers d'hiver. Cette NOTHUS. vie oifive & voluptueufe, pleine de luxe & de fafte, ne pouvoit pas manquer de déplaire infiniment à un homme tel que Lyfandre, élevé dès fon enfance dans la fimplicité, la pauvreté, & les durs exercices qui étoient en ufage à Sparte. Aiant conduit fon armée à Ephéfe, il commanda qu'on y affemblât de tous côtés des vaiffeaux de charge, y fit un arsenal pour la conftruction des galéres, en ouvrit les ports aux marchands, en abandonna les places publiques aux ouvriers, mit

tous les arts en mouvement & en

honneur ; & par ce moien il remplit la ville de richeffes, & jetta dès lors les fondemens de cette grandeur & de cette magnificence qu'on y vit dans la fuite: tant l'induftrie & l'habileté d'un homme feul eft capable d'apporter de changement dans une ville & dans un Etat !

Pendant qu'il donnoit ces ordres, il apprit que Cyrus, le plus jeune des fils du Roi, étoit arrivé à Sardes: ce Prince ne pouvoit alors avoir plus de feize ans, étant né depuis l'avéne ment de fon pere à la couronne, qui étoit dans la dix-feptiéme année de

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