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tomba mort, plutôt accablé par le NOTHUS. nombre que vaincu. L'aile droite qu'il commandoit, aiant perdu fon Amiral, fut mise en déroute. La gauche, compofée des Béotiens & de ceux de l'Eubée, fit encore une longue & vigoureuse réfiftance par l'intérêt preffant qu'ils avoient de ne pas tomber entre les mains des Athéniens contre qui ils s'étoient révoltés: mais enfin elle fut obligée de plier, & de fe retirer en defordre. Les Athéniens fe retirérent aux Arginuses, & y drefférent un trophée. Ils perdirent dans ce combat vingt-cinq galéres, & les ennemis plus de foixante & dix, parmi lefquelles de dix qu'avoient fourni les Lacédémoniens il en périt neuf. Plutarque égale Callicratidas, Gé- Plut. in Lyf. néral Lacédémonien, pour fa jufti- Pag. 436. ce, fa magnanimité, & fon courage, à tous ceux qui dans la Grèce s'étoient rendu le plus dignes d'admira

tion.

Cependant il le blâme extrêmement Plut. in Ped'avoir hazardé mal à propos aux Ar- lop. pag. 278. ginuses le combat naval, & il montre que pour éviter le reproche d'avoir lâchement pris la fuite, il avoit, par ce point d'honneur mal entendu,manqué

DARIUS au devoir effentiel de fa charge. En ef

Athéniens.

fet, dit Plutarque, fi, pour me fer* C'étoit un vir de la comparaifon d'Iphicrate *, Général des l'infanterie légére reffemble aux mains, la cavalerie aux piés, le corps de bataille à la poitrine, & fi le Genéral tient lieu de la tête; ce. Général qui s'abandonne témérairement à l'impétuofité de fon courage, n'expofe & ne néglige pas tant fa vie, qu'il expofe & néglige celle de tous ceux dont le falut eft attaché au fien. Notre Commandant Lacédémonien avoit donc tort (c'est toujours Plutarque qui parle ) de répondre au Pilote qui l'exhortoit à fe retirer, Sparte ne tient pas à un feul homme. Car il eft bien vrai que Callicratidas, combattant fous les ordres de quelqu'un fur terre ou fur mer, n'étoit qu'un feul hom~ me: mais commandant une armée, il raffembloit en lui tous ceux qui lui obéiffoient: & celui en la perfonne du quel tant de milliers d'hommes pouvoient périr, n'étoit plus un feul bomme. a Cicéron, avant Plutarque, avoit

a Inventi multi funt, qui non modò pecuniam, fed vitam etiam profundere pro patria parati effent, iidem gloriæ jacturam ne minimam qui

dem facere vellent, ne republica quidem poftulante: ut Callicratidas qui, cùm Lacedæmonio tum dux fuiffet Pelopon nefiaco bello, multaque

per

porté le même jugement. Après avoir NOTHUS. dit qu'il s'étoit trouvé bien des fonnes prêtes à facrifier à la patrie leurs biens & même leur vie, mais qui, par une fauffe délicateffe de gloire, n'auroient pas voulu pour elle hazarder le moins du monde leur réputation, il cite en exemple Callicratidas, qui répondit à ceux qui l'exhortoient à fe retirer des Arginuses, Que Sparte pouvoit équiper une nouvelle flote fi celle-ci périffoit, mais que pour lui il ne pouvoit prendre la fuite fans fe couvrir de honte & d'infamie.

Je reviens aux fuites du combat livré près des Arginuses. Les Généraux des Athéniens ordonnérent à Théramene, à Thrafybule, & à quelques autres Officiers, de retourner avec environ cinquante galéres enlever les debris, & les corps morts, pour leur donner la fépulture, tandis qu'on vogueroit avec le refte contre Etéonice, qui tenoit Conon affiégé devant Mityléne. Mais une rude

feciffet egregiè, vertit ad | extremum omnia, cùm confilio non paruit eorum, qui claffem ab Ar. ginuffis removendam

nec

cum Athenienfibus dimicandum putabant.

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Quibus ille refpondit, La-
cedæmonios, claffe illa
amiffa, aliam parare pof-
fe; fe fugere fine fuo de-
decore non poffe. Cic. de
Offic. lib. x. n. 48.

& que

DARIUS tempête qui furvint dans le moment empécha d'exécuter cet ordre. Etéoni ce, averti de la défaite, & craignant que cette nouvelle ne jettât l'allarme & le découragement parmi fes troupes, renvoia ceux qui l'avoient apportée, avec ordre de revenir couronnés de chapeaux de fleurs, & de crier que toute la flote d'Athénes avoit péri, Callicratidas avoit remporté la victoire. A leur retour, il fit des facrifices d'action de graces, & aiant fait prendre de la nourriture à ses troupes, il fit partir promtement les galéres, parce que le vent étoit favorable, tandis qu'il gagna Méthymne avec l'armée de terre, après avoir brûlé fon camp. Conon, délivré ainfi du blocus, fe joignit à la flote victorieufe, qui regagna auffi-tôt Samos. Cependant, quand on eut appris à Athénes que les morts avoient été laiffés fans fépulture, le peuple entra dans une grande colére, & fit tomber tout le poids de fon indignation fur ceux qu'il croioit coupables de cette faute. C'en étoit une grande, dans l'efprit des anciens, que de ne pas procurer aux morts la fépulture; & nous voions qu'après toutes les ba

tailles, le premier foin des vaincus, NOTHUS. malgré le sentiment actuel de leurs maux & la vive douleur d'une far glante défaite, étoit de demander au vainqueur une fufpenfion d'armes, pour rendre à ceux qui étoient reftés fur le champ de bataille les derniers devoirs, d'où ils étoient perfuadés que dépendoit leur bonheur pour l'autre vie. Ils avoient peu d'idée de la réfurrection des corps. Mais cependant les Paiens, par l'intérêt que l'ame prenoit au corps après le trépas, par le refpect religieux qu'on lui portoit, par les honneurs folennels qu'on s'empreffoit de lui rendre, quoientqu'ils en avoient un sentiment confus, qui fubfiftoit parmi toutes les nations, & qui venoit de la plus ancienne tradition, quoiqu'elles ne le démélaffent pas bien clairement.

mar

Voila ce qui mit en fureur le peuple d'Athénes. Il nomma fur le champ de nouveaux Généraux, fans conferver de tous les anciens que Conon, à qui l'on donna pour collégues Adimante & Philoclès. Des huit autres, deux s'étoient retirés & fix feulement étoient revenus à Athénes. Théraméne, le dixiéme des Généraux, qui

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