les Difcours actions militaires, comme le re- par marque M. Boffuet, avoient mil- louanges & par les le récompenfes, qui ne coutoient récomrien au public, & qui étoient in penfes. finiment précieuses aux particuliers, fur l'Hiparce qu'on y avoit attaché la gloi. Aoire univerfelle. re fi chére à ce peuple belliqueux. Une couronne d'or très mince, & le plus fouvent une couronne de feuilles de chêne, ou de laurier, ou de quelque herbage plus vil encore, devenoit ineftimable parmi les foldats, qui ne connoifsoient de plus belles marques que celles de la vertu, ni de plus noble diftinction que celle qui venoit des actions glorieuses. Quel effet penfe-t-on que produififfent dans l'efprit des foldats & des Officiers des louanges données à la tête de l'armée par le Général après un combat où ils s'étoient distingués d'une maniére particuliére! Et ces louanges étoient accompagnées de monumens glorieux & Tome 1. de de preuves fenfibles & permanentes de leur mérite, qu'ils laiffoient à leur poftérité comme un précieux héritage. C'étoient-là pour eux de véritables lettres de nobleffe: c'étoient d'ailleurs des titres affurés pour monter à des places plus avantageufes & plus honorables, qui n'étoient accordées qu'au mérite, & non enlevées par la brigue & par la cabale. De fimple foldat, on pouvoit en paffant fucceffivement par différens degrés, arriver jufqu'au Confulat. Quelle agréable perspective pour un bas Officier d'envisager dans le lointain les premiéres charges de l'Etat & de l'armée comme autant de récompenfes auxquelles il pouvoit aspirer! C'est par là que l'on relève le courage des moindres foldats, qu'on les intéreffe à la gloire & aux fuccès des entreprises, & qu'on en fait, j'oferois prefque dire, autant de héros. C'eft par là qu'on fe dispense des des récompenfes pécuniaires, qui chargent un Etat, & l'épuifent; & qui ne fuffifant jamais pour récompenfer tous les fervices, font néceffairement des mécontens, & caufent un découragement prefque général. Ce foin induftrieux de mettre la vertu & le mérite en honneur, eft le véritable caractére de la République Romaine, & le moien qui a contribué le plus efficacement & en même tems le plus gratuitement à fa grandeur. Quelques branches de chêne ou de laurier, comme je l'ai déja obfervé, lui ont fuffi pour paier les fervices de ceux qui lui ont procuré la conquête de l'univers. Pour ce qui regarde les Généraux, quelle impreffion l'honneur du Triomphe ne devoit-il pas fai re fur l'ame d'un particulier, au devant duquel venoit le Sénat en corps avec tous les Ordres de l'Etat, pour qui tous les temples fu moient c 2 moient des facrifices offerts aux dicux en action de graces de fa vitoire, & qui montré en fpectacle fur un char fuperbe, voioit marcher devant lui les glorieufes dépouilles qu'il avoit remportées, & étoit fuivi de l'armée victorieufe, qui fefoit retentir toute la ville de louanges non fufpectes, & juftement méritées! Une fi augufte cérémonie fembloit élever le Triomphateur au deffus de l'humanité. Sévérité LES ROMAINS, dans la guercipline, re, favoient faire usage des châtimens, auffi bien que des récomLiv. lib. penfes. La fermeté d'un Dictateur à l'égard de fon Général de la Cavalerie, qui ne put être fauvé de la mort que par les priéres & les inftantes fupplications du Peuple entier; l'inexorable sévérité du Conful Manlius contre fon propre fils, qu'il fit impitoiablement mourir quoique victorieux, parce qu'il avoit combattu contre fon ordre: de la dif 8.cap.35. Ibid cap.7. ces ces exemples firent fur les efprits i une terrible impreffion de crainte, qui devint pour toujours le ferme lien de la difcipline militaire. Auffi n'a-t-elle jamais été obfervée chez aucun peuple auffi inviolablement que chez les Romains ; & a c'est ce qui contribua plus que toute autre chofe à les rendre victorieux de tous leurs ennemis. COMMENT ne l'auroient-ils pas été avec des troupes formées, comme nous l'avons vû, & fur tout dirigées dans leurs opérations par les principes les plus propres à faire des conquérans ? C'en étoit un Conftan chez les Romains de b ne connoi- les plus tre d'autre terme de la guerre que dangers grands la victoire, & pour cela de furmon- & les plus ter avec une perfévérance infatiga grands ce dans ble tous les obftacles & tous les mal dangers qui la pouvoient retarder, heurs, a Difciplina mili- Liv. c 3 Les b Nec finem ullum alium belli quam vi&toriam noverit, Liv. lib. 5. cap. 6 |