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verrons de quel prétexte elle fe fervir, pour ne pas tenir des engagemens pris, de fon aveu, avec le Seigneur de Rofoi. Que je vois de rifque pour Alix, dit douloureufement Ma demoiselle de Rocheville, dans la réuffite même de ce que vous projettez ! Que je crains pour elle! Je ne puis m'expliquer davantage; mais fi l'on vouloit m'en croire, on attendroit, du tems & de mes confeils, ce que j'en ofe efpérer.

Je ne puis vous exprimer, mon cher Raoul, quel étoit mon défefpoir, de ne trouver, de tous côtez, que des difficultez infurmontables. La timidité de Mademoiselle de Rofoi m'affligeoit fenfiblement. Elle refufoit, avec obftination, de me voir: je regar dai ce cruel refus, comme une défiance d'elle-même. Cette idée

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augmenta encore le defir que j'avois de lui parler, & me fit redoubler mes inftances pour obtenir cette grace. Enfin, Mademoiselle de Rocheville & plufieurs lettres lui dépeignirent fi vivement ma douleur, qu'elle fe rendit.

C'en eft donc fait, lui dis - je en l'abordant, je vais être lá viatime de la réfiftance que vous moppofez. Madame de Rofoi và faire un choix pour vous: fa fu neste paffion m'en affure, & votre cruelle obéiffance à fes ordres, m'aflure auffi que vous irez à l'Autel y jurer ma perte, & peutêtre la vôtre. Ah! vous me fai tes trembler, s'écria Mademoifelle de Rofoi ! Non ; ma mere n'ajoutera point cette affreufe violence à celle qu'elle me fait aujourd'hui ! Ne vous flattez pas, lui dit Mademoiselle de Roche

ville, pour l'intimider; le Comte
ne prévoit que trop, un coup iné-
vitable: ce malheur vous mena-
ce. Jufte Ciel dit Alix avec
transport, ce malheur me mena-
ce! Pouvez-vous en douter, re-
pris-je, fi vous reftez au pouvoir
de Madame de Rofoi? Ah! divi-
ne Alix, pourfuivis-je en me jet-
tant à fes pieds, par pitié pour
vous-même, arrachez-vous aux
perfecutions où vous expose une
fauffe délicateffe. Sauvez-moi la
vie. Au nom de toute ma ten-
dreffe, ne vous oppofez plus à
ce que j'exige de la vôtre. Son-
gez que c'eft un époux que vous
fuivrez; un époux choifi
par un
pere. Quoi, Mademoiselle
joutai-je, voïant qu'elle ne me
répondoit rien, pouvez-vous re-
fufer de vous jetter entre les bras
du mien? N'est-il pas le vôtre?
Votre amitié ne lui a-t'elle

a

pas

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donné ce nom que mérite sa tendreffe? Quelle feroit fa joie ! Venez, divine Alix, lui dis-je vivement, en lui preffant les mains, venez : plus de tempête à effuïer. L'Amour,ofez le fuivre,vous conduit au port. Hé quel Amour! Il ne differe plus de vos devoirs. Quoi! me repliqua-t'elle,je m'arracherois des bras d'une mere! Quoi ! je ferois une démarche qui la couvriroit de honte! Non; fon injuftice même ne pourroit me justifier; elle en feroit deshonorée, & j'aurois à rougir, en même tems de voir fa gloire & la mienne flêtries à jamais. Quelle eft, Mademoiselle, votre cruauté, repris-je ! votre refus eft l'arrêt de ma mort. L'excès de ma paffion vous est un garant, que je ne furvivrai pas au coup que Madame de Rofoi me portera par vos propres mains. Raffurez

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vous, Comte, me dit-elle ; je vous jure, par ma tendreffe & par la vôtre, de ne jamais être qu'à vous. Ma mere voudra en vain me contraindre; je lui oppoferai une ferme résistance: voilà l'inftant feul où ma foumif fion & mon respect oferont se révolter. Sur cette parole, foiez tranquile, & attendons du tems, ce que j'ofe en espérer. Après avoir emploïé trois heures pour vaincre les fcrupules, la délicateffe, & la timidité de Mademoiselle de Rofoi, il me fallut la quitter avec moins d'efpérance que jamais; il ne me fut même plus poffible de la voir. Madame de Rofoi toujours inquiéte, malgré la confiance qu'elle avoit en Mademoiselle de Rocheville, redoubloit d'attention: il ne s'en fallut même que d'un inftant, qu'elle ne me furprît en fortant

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