Imágenes de páginas
PDF
EPUB

mens auprès de la fœur du Maréchal. Toutes ces réfléxions me déterminerent à lui parler naturellement; je lui appris donc tout ce que vous venez d'entendre. Notre confiance réciproque mit le fceau à notre amitié. રે

Madame de Rofoi exécuta ce qu'elle avoit projetté; mais des Barres me fervit à merveille: il lui dit, que fi je n'étois traversé dans mes deffeins que par lui, je pourrois facilement arriver au comble de mes vœux ; que fon amitié pour moi le lui faifoit defirer, & qu'il voudroit même pouvoir contribuer à mon bonheur. Il eft aifé de comprendre quelle fut la mortification de Madame de Rofoi ; je ne fçais même ce que lui auroit fuggeré fa jaloufe rage, fans ce qui arriva. Depuis que

Madame de Rofoi

étoit à Paris, j'allois rarement chez elle; je prenois même si bien mes mefures, que je ne la trouvois jamais feule. Un jour que j'avois dîné avec le Maréchal, il me demanda fi je voulois aller avec lui chez Madame de Rofoi; j'y confentis. Un moment après être entrez, le Maréchal fe fouvint qu'il avoit un rendez-vous : il fortit, & me laiffa vis-à-vis de Madame de Rofoi. Nous reftâmes tous deux embarraffez, & gardâmes quelque tems le filence. Elle le rompit pour me demander fi j'avois véritablement des deffeins fur Mademoiselle du Mez. Si mes foins & ma tendreffe, répondis-je, peuvent ne lui pas déplaire, Madame la Maréchale& Alberic feront bien-tôt les maîtres de me rendre le plus fortuné des hommes. Me voilà par votre aveu, me dit-elle, libre

des engagemens que j'avois avec vous. J'ai défapprouvé l'injuftice de ma fille; mais elle eft toujours ma fille : ma tendreffe pour elle, que je violentois dans le deffein de la ramener infenfiblement à vous, m'ordonne à préfent de lui choifir un époux, & ce choix fera bien-tôt fait. Ce difcours, mon cher Raoul, fut pour moi un coup de foudre: il me fit oublier tous mes projets; que disje! j'oubliai que c'étoit un piége que Madame de Rofoi me tendoit qu'Alix m'avoit promis d'oppofer à fa mere une ferme résistance, fi elle vouloit difpofer d'elle. Enfin, que vous diraije? L'efprit, le jugement, la raifon, tout céda à l'effroi mortel de perdre Alix. Ah! Madame, m'écriai-je, que voulez-vous faire? Voulez-vous que je meure?Quoi vous voulez m'enlever

Mademoiselle de Rofoi? Un autre la poffederoit Non, ajoutai-je d'un ton furieux, la mort de mon Rival ou la mienne préviendra ce malheur. Madame de Rofoi, prefque perfuadée qu'une nouvelle paffion avoit fuccedé dans mon cœur à celle qu'Alix m'avoit infpirée, furprise de mon emportement, me dit d'un air troublé Eft-ce-là votre indifférence pour Alix? Que devient votre tendreffe pour Mademoifelle du Mez? Sans répondre à cette question, je me jettai à fes pieds, & lui dis: Madame, au nom du plus tendre amour, rendez-moi heureux; vous le pouvez. Mademoiselle de Rofoi obéïra quand vous l'ordonnerez: fa vertu m'eft un garant de fon obéiffance. Faites-vous un peu de violence; rappellez votre courage; foïez mere. Souvenez-vous

>

des volontez d'un mari, qui, du Tombeau vous reproche une foibleffe dont je fuis la victime. Alors je me tus ; je regardai fixement Madame de Rofoi. Voïant l'extrême émotion où elle étoit, & qu'elle verfoit quelques larmes: D'où naît, Madame, le défordre où je vous vois, lui dis-je? Vous répandez des pleurs! Qui peut vous les arracher? Etesvous fenfible à ma douleur? Eftce un mari dont vous offenfez la mémoire ? Est-ce un Amant à vos pieds, qui vous demande ou Mademoiselle de Rofoi ou la mort ? Eft-ce enfin une fille qui les fait couler ? Parlez, Madame, parlez. Vous ne répondez point? Quel eft donc ce miftere? N'ofezvous prononcer que vous m'accordez ou me refufez Alix? Hé bien: Madame, poursuivis - je, je ne quitterai point vos genoux

« AnteriorContinuar »