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Ah!

voix baffe & tremblante: Quoi! c'est vous, Comte ? Quoi! c'est vous, divine Alix, repliquai-je en m'avançant vers elle Comte, reprit-elle ; à quoi m'expofez-vous ? ma mere est ici. Je le fçais, lui dis-je; mais ne craignez rien, écoutez-moi. Que je vous écoute, me répondit-elle ! pouvez-vous l'exiger? Si j'étois furprise feule avec vous, fi l'on foupçonnoit votre déguisement, que deviendrois-je! que penferoit-on! Vos craintes Mademoifelle, repartis-je, feront-elles toujours plus fortes que votre tendreffe? Ne lui facrifierez-vous jamais rien? Eft-ce là comme on aime? Je ne me plains pas de vous trop aimer, reprit-elle, quelques maux que j'endure pour vous; mais vous, pouvez-vous vous plaindre fans injuftice, que je ne vous aime pas affez: Hélas!

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ajouta-t'elle, ma tendreffe, malgré les malheurs qui la fuivent fait le bonheur de tous les inftans de ma vie ! Mais, Comte, malgré le plaifir que je fens à vous voir, il faut que je vous quitte; je vous écouterois avec trop d'inquiétude. Ma mere va partir; je vais revenir avec Rocheville, attendez-moi dans cette même allée. Je ferai bien-tôt de retour, dit-elle, en me regardant avec une tendreffe, qui me fit fentir, qu'accablé des plus grands malheurs, il peut être pour l'homme des inftans heureux.

Vous m'intéreffez toujours davantage pour Mademoiselle de Rofoi, dit le Sire de Couci ; je hui trouve, dans toutes les occafions, une vertu & une fimplicité qui me charment. Sa vertu n'eft point farouche, & fa fimplicité montre un fi beau naturel &

tant d'efprit, qu'il feroit à fouhaiter , pour le bonheur des hommes, que toutes les femmes fuffent d'un caractére femblable à celui de votre divine Alix. Nous refpecterions leur vertu, & nous n'aurions jamais à nous défier de leur efprit, lorfque leur beauté nous afferviroit mais, fi j'admire Alix dans fa fimplicité, l'artifice de Madame de Rofoi m'étonne. Quelle adreffe! Quel art! Cependant je lui fçais gré d'avoir pû vous taire fa paffion. La mienne dont elle voioit toute la violence, reprit le Comte de Rethel; l'horreur que la fienne m'auroit infpirée, les reproches outrageans qu'elle craignoit d'effuier, la honte de prononcer un je vous aime, au moment que j'étois à fes pieds pour lui demander ou Alix ou la mort fa vanité enfin, qui la

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propre foi bleffe, voilà les raifons qui onr donné à Madame de Rofoila force de fe taire, & ce font auffi celles qu'elle dit à Mademoiselle de Rocheville.. Sans fe croire aimé, continua Roger, on peut avouer qu'on aime,fi nous croions ce que nous aimons, libre de tout engagement; alors l'efpérance triomphe de la vanité: mais la certitude d'une forte paffion dans le cœur de ce que nous adorons, en irritant la nôtre, nous donne la force de nous taire. Il eft vrai, répondit Raoul; cependant ce pouvoir fur elle-même dans Madame de Rofoi, pouvoit bien être l'effet d'une vertu dont l'amour n'avoit pas entierement triomphé mais je vous interromps mon cher Roger retournons promptement retrouver Alix dans cette allée, où elle doit revenir.

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Elle y revint, reprit le Comte de Rethel, avec la fidelle Rocheville. Aurez-vous la patience, nous dit cette amie, d'écouter ce que j'ai à vous dire, & qu'il faut que vous fçachiez l'un & l'autre Parlez, lur dîmes-nous tous les deux en même tems.

Alors Mademoiselle de Rocheville nous apprit, que Madame de Rofai ne pouvoit fe pardonner le défordre où je l'avois vûë; que le défefpoir où j'étois tombé, portoit le fien au dernier excès; qu'elle craignoit que je n'euffe pénétré fa tendreffe; qu'elle venoit de prendre, malgré elle, la réfolution de marier Mademoifelle de Rofoi, pendant que je ferois au Camp de Bourgogne pour que je ne fuffe inftruit de mon malheur que lorsqu'il feroit, fans remede. Je veux plus, m'at'elle dit, ajouta Mile de Roche

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