de Sefto, qu'alors la caiffe pafferoit fans danger le Tefin avec fon 1522. efcortè, qu'après cette expédition l'on fe rapprocheroit de Milan, & que s'il le falloit, on marcheroit aux Ennemis, mais qu'il n'étoit ni prudent ni utile de les attaquer dans le camp de la Bicoque, que c'étoit s'expofer à une défaite certaine. Le Bâtard de Savoye, le Maréchal de Chabannes, tous les Officiers dont la prudence ne pouvoit être foupçonnée de timidité, joignirent leurs inftances à celles de Lautrec. Il paroît qu'on ne peut difculper les Suiffes d'un peu d'humeur & d'impatience dans cette occafion, ils n'écouterent rien, ils s'obftinerent à vouloir combattre ou être payés fur le champ, ils menacerent de quitter l'armée. Ce même Albert de La Pierre, autrefois fi attaché à la France, mais qui alors paroiffoit tendre à la défection, fut chargé de porter à Lautrec les dernieres propofitions des Suiffes, qui fe réduifoient à ces trois mots. Argent, Congé ou Bataille. Lautrec n'ayant point d'argent, puifqu'on 1522. l'empêchoit d'en aller chercher choifit des deux derniers inconvéniens celui qui lui parut le moindre, celui qui d'ailleurs étoit le plus conforme à fon caractère bouillant & audacieux, il livra les Suiffes (1) à toute leur ardeur, & dif pofa tout pour le combat ou plutôt pour fa défaite. L'équitable Hiftoire doit à Lautrec le témoignage que non-feulement il céda malgré lui à la violence des Suiffes, mais encore qu'il fit pour cette funefte bataille où on le forçoit, les meilleures difpofitions que le génie & la prudence pouvoient fuggérer. Il obtint d'abord des Suiffes qu'ils allaffent eux-mêmes reconnoître le Camp ennemi; c'étoit un moyen adroit de leur faire abandonner le projet de combattre, pour peu qu'ils euffent été capables de réflexion ; (1) » Il les devoit très-bien & beau laiffer aller & les recommander à tous les diables, dit Brantôme....., car jamais le fait ne va bien, quand il faut que le Général obéisse à ses Soldats, & combatte à leur volonté. mais leur opiniâtreté ne fçut point fléchir; fix mille hommes de leur 15220 Nation & quatre cens Chevaux commandés par Pontdormy, firent le tour des retranchemens de la Bicoque, ils obferverent tout, & le compte qu'ils rendirent de leurs découvertes, ne fervit qu'à confirmer de plus en plus les Généraux François dans la conviction qu'on alloit le lendemain mener les Troupes à une boucherie horrible & infructueuse. Il le fallut enfin, & le lendemain matin, jour de Quafimodo toute l'armée fut prête à combattre. La Gendarmerie placée à l'avantgarde & commandée par le Maréchal de Foix, devoit attaquer un pont de pierre qui avoit été reconnu la veille, C'étoit le feul endroit par qùil fût poffible à force de courage & de bonheur de pénétrer dans le camp ennemi. Montmorenci à la tête de huit mille Suiffes devoit faire fon attaque du côté diamétralement oppofé à ce pont, Comme il n'y avoit là aucune ouverture par où l'on pût s'intro 7522. duire dans le camp, & qu'il falloit percer ou franchir les retranchemens même, cette attaque devoit être la plus meurtriere, & il étoit jufte d'y envoyer les Suiffes, puifque c'étoient eux qui vouloient combattre malgré tout le monde ; mais Lautrec n'eut à fe reprocher d'avoir négligé aucun Mém. de des moyens qui pouvoient faciliter Du Bellay le fuccès de leur attaque, & le choixqu'il avoit fait d'un favori tel que Montmorenci pour les conduire, prouvoit affez qu'il ne vouloit pas les facrifier; il les fit appuyer de fon artillerie, tandis qu'un vallon, dont Lautrec avoit bien apperçu toute l'utilité, les mettoit hors de la portée de l'artillerie des ennemis. Liv. 2 Il fe plaça lui-même avec le Maréchal de Chabannes, le Bâtard de Savoye & le Grand-Ecuyer S. Severin au corps de bataille, qui devoit attaquer par où il pourroit. Sa conduite avec les Vénitiens fut encore extrêmement fage; il voulut qu'ils n'euffent à fe plaindre ni d'avoir été trop expofés au danger, ni d'en avoir été trop écartés par des ménagemens injurieux, il leur offrit 15224 l'attaque d'un des quartiers du camp, & lorfque leur prudence eût refufé ce périlleux honneur, il les mit à l'ar riere-garde fous le commandement du Duc d'Urbin, qui, après avoir reconquis fes Etats, étoit revenu à l'armée. Pierre de Navarre dirigea les tra vaux des Pionniers destinés à applanir les chemins. Pontdormy à la tête d'une espece de corps de réferve devoit tout obferver, fe porter par-tout, empêcher toutes les forties que l'ennemi voudroit faire. A cet ordre admirable, où le Maréchal de Lautrec s'étoit montré fi fupérieur à lui-même, & qui méritoit d'être couronné par le fuccès, Colonne n'oppofa que l'affiette de fon camp, & qu'une fage diftribution de fes troupes dans les différens pof tes. Le Capitaine Allemand Geor- Belcar. liv. ges Fronfberg avec toute l'Infanterie Allemande & toute l'artillerie, fut chargé de repouffer l'attaque deMont 17.3.3. |