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On a déja dit qu'il n'avoit point contribué à élever Charles-Quint au 152 Trône de l'Empire, parce qu'il ne vouloit point un Empereur puiffant. S'il n'avoit pu réuffir à traverser fon Election, il pouvoit du moins l'embarraffer beaucoup, en refufant de le reconnoître, où en exigeant qu'il renonçât au Royaume de Naples. Il parut d'abord difpofé à prendre ce dernier parti; on crut qu'il fe tourneroit du côté du Roi de France, il, Guicciard. fit avec lui un Traité fecret par lequel il promettoit non-feulement de ne plus reconnoître Charles - Quint pour Roi de Naples, mais encore d'aider François I à conquérir ce Royaume, fous trois conditions à la vérité un peu dures:

La premiere, que le Roi céderoit au S. Siége la Ville de Gaëte, & toute la partie du Royaume de Naples renfermée entre le Gariglian & les confins de l'Etat de l'Eglife.

La feconde, que le refte du Royaume de Naples feroit poffédé, non par le Roi, mais par fon fecond fils Henri.

liv. it.

La troifiéme, que le Roi donne1521. roit du fecours aur Pape contre les Feudataires rebelles au S. Siége, c'eft-à-dire, que le Roi, qui avoit déja fi mal défendu le Duc de Ferrare fon allié contre le Pape, devoit encore prêter les mains à fon oppreffion, car c'étoit le Duc de Ferrare en particulier que cette claufe regardoit ainfi que le Duc d'Urbin, & en général les Feudataires rebelles au S. Siége, étoient ceux qui défendoient leurs Etats contre le Pape.

De ces trois conditions, la premiere & la derniere concernoient l'intérêt préfent du Pape, celui de s'étendre & de jouir; la feconde fon intérêt éloigné, celui de placer fur le Trône de Naples déja fort affoibli, un Prince foible qu'on pût en chaffer plus aifément dans la fuite, encore avoit-il rapporté cette clause à fon intérêt préfent, en ftipulant que la partie du Royaume de Naples où regneroit le jeune Henri, feroit gouverné par un Légat Apoftolique, réfidant à Naples, jufqu'à ce que ce Prince fût majeur.

Le Roi fit en même-tems avec le

Pape une Ligue pour la défense de 1521.
l'Italie, & il fe chargea d'y faire
entrer les Vénitiens, qui perfeve-
roient toujours dans fon alliance,
dont ils s'étoient fi bien trouvés.

On prenoit cependant des mefures
pour entrer au Royaume de Naples,
& le Roi devoit dans l'efpace de
trois femaines donner une réponse
décifive fur les arrangemens de dé-
tail que le Pape lui avoit propofés
pour cette expédition; mais foit que
le Roi commençât dès-lors à négli
ger fes affaires, foit que par égard
pour la médiation du Roi d'Angle-
terre, qui par jaloufie travailloit au
rétabliffement de la paix, il aban-
donnât le projet fur Naples, foit
qu'enfin il ne crût point le Traité fin-
cere de la part du Pape, deux mois.
fe pafferent fans que le Pape reçût de
fes nouvelles ; les Vénitiens n'en-
troient point dans la Ligue conclue Commentar.
pour la défense de l'Italie. De plus,
les intelligences ou connues ou foup-
çonnées du Pape avec le Roi, ayant
attiré quelques troupes Napolitai-

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Sleidan.

liv. 3,

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liv. 14.

nes fur les terres de l'Eglife, le Pape 1521. avoit été obligé de faire venir un Guicciard, corps de fix mille Suiffes pour le leur oppofer, ou plutôt, fi l'on en croit Guichardin, le Pape ayant commencé par faire venir les Suiffes avant qu'il y eût aucun mouvement dans l'Italie, les Napolitains qui avoient pris ombrage de l'arrivée de ces troupes étrangeres, entrerent fur les terres de l'Eglife. Quoi qu'il en foit, le Pape & le Roi devoient foudoyer ces Suiffes à frais communs ; cependant le Roi ayant fourni fon contingent le premier mois, difcontinua de payer, parce qu'on lui fit entendre, non fans quelque apparence de vérité, que ces Suiffes étoient moins deftinés à la conquête du Royaume de Naples, qu'à quelque entreprise fecrette fur le Milanès. Cette ceffation de payement jetta le Pape dans l'embarras & dans la défiance. Il foupçonna quelque Traité fecret ou conclu ou médité entre l'Empereur & le Roi, il fit des plaintes amères de l'infidélité de ce dernier, il lui reprocha tout ce qu'il prétendoit

avoir fait pour lui, le Roi fit auffi quelques reproches, les efprits s'ai- 1521. grirent, les griefs Eccléfiaftiques fe joignirent aux griefs politiques; d'un côté Lautrec & l'Evêque de. Tarbes qui gouvernoient les affaires de l'Eglife dans le Milanès, ne recevoient pas avec affez de refpect les Bulles du Pape pour la distribution des Bénéfices, de l'autre le Pape avoit refufé quelque Chapeau demandé par le Roi.

Le Pape, comme le plus irrité, paffa rapidement de la défiance à la haine, & de la haine à la défection. En vain le Prince de Carpy, Ambaffadeur du Roi auprès du Pape, excufoit fon Maître, interprétoit tout, ce qu'il avoit fait & tout ce qu'il avoit négligé de faire, flattoit le Pape, promettoit, conjuroit, le Pape ne put jamais être ramené. Ses plaintes contenues dans une lettre écrite par le Prince de Carpy au Roi le 14 Juin 1521, font remarquables par le ton que le Pape (1) y prend par

(1) Manufcrits de Béthune, no: 8493, fol. 3

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