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bre de fois, & pendant un long temps, il reste à favoir fi elle peut être produite dans un tuyau qui aura été déchargé & rechargé, peut-être cinq ou fix fois. Il eft vrai que l'on n'a befoin ici que d'une faleté infenfible.

Si la conjecture de M. Amontons étoit vraïe, un tuyau d'une matiere plus poreufe que le verre, & chargé de Mercure comme un Barometre, devoit laiffer paffer un air moins fubtil, ou en laiffer paffer une plus grande quantité que le tuyau de M. le Chancelier. Ce fut dans cette

veüe que M. Amontons prit un moyen canon de fufil, long d'un peu plus de 34 pouces, & en fit une efpece de Barometre. Mais le fer n'étant pas tranfparent, la diffi culté étoit de favoir à quelle hauteur se tiendroit le Mercure dans ce Barometre nouveau. On verra dans le Memoire de M. Amontons un expedient affés ingenieux qu'il imagina. Cela fait, il fe trouva que le Mercure étoit dans le tuyau de fer 52 lignes plus bas que dans les tuyaux de verre ordinaires,

Ce tuyau ayant été laiffé en experience comme un Barometre, le Mercure y baiffa toûjours, mais lentement, c'eft à dire qu'il en fortoit toûjours, deforte qu'au bout de 30 ou 31 heures, il n'y en reftoit qu'à peu près la onziéme partie de ce qu'il y en avoit eu immédiatement aprés le renversement. Peut-être y avoit-il dans ce canon quelque fente ou quelque ouverture imperceptible, par où l'air s'infinuoit toûjours; mais enfin on ne pouvoit attribuer à cette caufe le peu de hauteur où s'étoit tenu le Mercure auffitôt aprés le renversement du tuyau, puifque les diminutions de hauteur qui fuivirent ne se faifoient que dans de certains temps, & avec affés de len

teur.

M. Amontons qui avoit, obfervé dans cette experience la durée des écoulemens du Mercure, & leur diffe. rente quantité en certains temps, avoit deffein de recommencer le tout plufieurs fois, & de voir fi les écoulemens n'auroient pas été plus lents en hiver qu'en été, qui auroit pu avoir fon usage par rapport à la Transpi

се

ration, & fût peut-être devenu plus important que la premiere recherche, mais, ainfi que nous l'avons déja dit, il mourut, au milieu de tant d'entreprises, que l'on peut dire qui avoient befoin de lui.

Il ne faut donc pas encore trop conter fur l'experience du tuyau de fer qui n'a été faite qu'une fois. Peut-être même a-t'on suppofé trop legérement que le fer fût plus poreux,& plus facilement pénetrable à l'air que le verre. Enfin plufieurs Academiciens ne convinrent point du Siftême de M. Amontons.

Ils foutenoient que l'experience du Barometre de M. le Chancelier étoit trop finguliere, pour devoir rendre fufpectes une infinité d'experiences précedentes, dans lefquelles on avoit toûjours fuppofé qu'aucun verre ne laiffoit paffer aucune matiere capable de pefer fur le Mercure. M. Homberg en particulier rapportoit tout le Phenomene à l'Esprit de vin dont le tuyau avoit été lavé. Plufieurs goutelettes de cette liqueur fubtile s'étoient logées dans les pores du verre, d'où elles étoient forties dans l'inftant que le vuide s'étoit fait, & s'étant extrêmement rarefiées, avoient abaiffé le Mercure. Il prétendoit que le tuyau ayant été lavé avec de l'eau on voyoit le même effet, & que des particules aqueuses se rarefioient de la même maniere, & devenoient vapeurs; & pour preuve de cela, fi ces tuyaux aprés avoir été lavés étoient bien fechés au feu, le Mercure y reprenoit fa hauteur

naturelle.

M. Amontons oppofoit à ce raifonnement, qu'il étoit incroyable que quelques goutelettes d'Esprit de vin ou d'eau, extrêmement rarefiées, & par confequent extrêmement affoiblies quant à leur force de reffort, en euffent cependant une égale à 18 lignes de Mercure ; qu'en inclinant ces tuyaux, où l'on prétendoit qu'étoient contenuës ces matieres rarefiées, & en faifant venir le Mercure jufqu'au haut, on auroit donc dû voir ces mêmes matieres recondensées par le poids du Mercure, former des bulles, pareilles à celles que forme l'air, pour peu qu'il

en foit resté dans le tuyau, & que cependant on ne voyoit
rien defem blable; qu'afin que de l'air laiffé dans le tuyau
abbaiffat le Mercure de 18 lignes, il en faloit laiffer und
quantité fort confiderable, & entierement difproportion-
née à celle de ces goutelettes, aufquelles on attribuoit le
même effet. Enfin M. Amontons montroit deux tuyaux
neufs, pris chés le fieur de Ville Emailleur, que
l'on ne
pouvoit foupçonner d'avoir jamais été lavés ni avec de
l'Eau ni avec de l'Esprit de vin, & où le Mercure se te-
noit 6 à lignes plus bas que dans les autres Barometres.
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Ce qui eft encore favorable au Siftême de M. Amon-
tons, c'est que cette différence de hauteur diminuoit, à
mefure qu'il les déchargeoit & rechargeoit de Mercure.

Que conclurre de tout cela? rien encore. L'Academie remer la décifion aux experiences qu'elle fera, & peut'être en faudra-t'il une longue fuite. Elle ne prétend pas ne faire au Public que l'Hiftoire de fes découvertes, elle croit lui devoir auffi celle de fes doutes, & elle verra avec une extrême fatisfaction que fes doutes contribuent aux découvertes d'autrui.

SUR LES TUYAUX CAPILLAIRĖS.

V. Ies M.

U Tuyau ouvert par les deux bouts, étant à demi plongé dans une liqueur, elle yentre, & s'y met au P. 241. niveau du refte de fa furface, à moins que le Tuyau ne foit Capillaire, c'est-à-dire d'un fort petit diametre, alors il arrive ordinairement qu'elle monte au deffus de fon niveau. Je dis ordinairement car la liqueur peut être telle, & le Tuyau d'un fi petit diametre, qu'elle demeurera au deffous, ou même n'entrera point du tout dans le tuyau. C'est ce qu'on a éprouvé avec du Mercure. Mais il ne s'agit maintenant que de l'élevation des liqueurs au deffus de leur niveau dans les Tuyaux Capillaires, le fecond cas viendra fans peine à la fuite du pre

mier.

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Cette élevation des liqueurs n'eft point une exception peu importante de la regle générale, & la recherche des caufes n'eft point une vaine curiofité. Le corps humain est une Machine hydraulique, & dans le nombre prefque ́infini de tuyaux qui la compofent, celui des Capillaires eft fans comparaison le plus grand, & c'est par confequent la connoiffance de cette efpece de tuyaux qui nous intereffe le plus.

Quelques Philofophes ont prétendu que l'air n'exerçant pas librement l'action de fa pefanteur fur l'eau dans un Tuyau capillaire à cause de la petiteffe de l'efpace, l'Eau exterieure plus preffée par le poids de l'air devoit faire monter celle qui répondoit à l'ouverture du Tuyau. D'autres ont cru qu'elle s'y foutenoit jufqu'à une certaine hauteur, en s'attachant, & en fe colant, pour ainfi dire, aux parois interieures, & que le diametre étant fuppofé fort petit, il faloit regarder toute la colonne d'eau comme fufpenduë de cette maniere. Ces deux differentes causes font les feules que l'on ait imaginées, & même, à ce qu'il paroît, les feules que l'on ait pû imaginer.

M. Carré, aidé de M. Geoffroy, a cherché à décider entre-elles par un grand nombre d'experiences qu'il a faites fur cette matiere. En voici deux qui semblent ne laiffer plus aucun doute.

1. L'eau s'étant élevée au deffus de fon niveau dans un Tuyau capillaire, fi enfuite on pompe l'air, auffi exactement qu'il foit poffible, elle ne redefcend point, au contraire, elle s'éleve encore un peu.

2. Si l'on enduit de fuif le dedans d'un Tuyau capillaire, l'eau ne s'y met que de niveau au refte de fa furface. Mais fi ce Tuyau n'est enduit de fuif que jufqu'à une hauteur moindre que celle où il eft plongé dans l'eau elle monte à fon ordinaire au deffus de fon niveau, & s'il n'eft enduit de fuif que d'un côté, l'eau de ce côté-là fe met de niveau, & monte au deffus de l'autre côté.

Ce n'eft donc pas l'inégalité de la preffion de l'air qui cause l'élevation de l'eau, puifque dans un lieu vuide

d'air cette élevation fubfifte, & même augmente, & en même temps, il faut rapporter cet effet à l'adherence de l'eau aux parois interieures du Tuyau capillaire, puifqu'elle s'élevé dans la partie où l'on ne l'empêche pas.

Mais on doit bien remarquer ici que l'adhérence n'eft pas une force mouvante, elle ne fait que donner lieu à une force mouvante d'exercer fon action. Toutes les colonnes d'eau tendent par leur pefanteur à defcendre, & à s'élever par confequent les unes les autres ; & ce n'est que l'égalité de leurs forces qui les met toutes de niveau. Si quelqu'une fe trouve moins pefante que les autres, auffitôt elle doit être élevée, jufqu'à la hauteur neceffaire pour l'équilibre. Quand on met fur la furface de l'eau contenue dans un vaiffeau un Tuyau capillaire, les gouttes d'eau comprises dans fon ouverture s'attachent au dedans du petit cercle qui la forme, en font foutenuës en partie, & par consequent d'autant moins pefantes par rapport à toute l'eau exterieure qui pefe librement fur le fond du vaisseau. La colonne d'eau à laquelle apartiennent ces gouttes ainfi foutenues, c'est à dire la colonne qui répond à l'ouverture du Tuyau capillaire, eft donc dans fon tout plus legere, ou, pour parler plus précisément, exerce moins fa pefanteur fur le fond du vaiffeau, que les autres colonnes dont elle est environnée, & par confequent elles la doivent élever dans le Tuyau capillaire jufqu'à une hauteur où elle regagnera par une plus grande quantité d'eau ce qu'elle perd par être en partie foutenuë. Ce raisonnement que M. Carré a tiré des loix de la Mechanique, & qui feul met dans fon jour le Siftême de l'adhérence de l'eau, le lui rend en quelque forte particulier, parce que ceux qui l'ont imaginé avant lui, n'avoient pas été jusque-là, & que faute de cette explication, leur opinion, quoique vraye, pouvoit être aifément combatuë, & même détruite. Il ne fuffit pas d'être dans le vrai, il faut y être arrivé par le vrai chemin.

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Il fuit manifeftement de cette Mechanique, que plus tuyau eft d'un petit diametre, ou plus il eft plongé dans

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