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l'eau, plus l'eau s'y doit élever. Dans le premier cas, un tuyau d'un petit diametre a plus de furface à proportion, & par confequent un plus grand nombre de gouttes d'eau font foutenues par fes parois interieures, & d'ailleurs les gouttes du milieu font d'autant plus foutenues par celles que les parois foutiennent, qu'elles font en plus petite quantité, ou, ce qui eft la même chofe, que le tuyau eft plus étroit. Dans le fecond cas, une plus grande partie de la colonne d'eau qui entre dans le tuyau eft foutenuë. Ce cas là feroit inexpliquable par l'inégalité de la preffion de l'air.]

Ce n'eft pas cependant que l'air n'entre jamais pour rien dans ces fortes de phenomenes. Si l'eau élevée dans un tuyau capillaire, s'éleve encore une ligne de plus, lorfqu'elle eft transportée dans le vuide, cet effet vient de l'air contenu dans l'eau, & qui foulagé du poids de l'air exterieur s'étend un peu, & fouleve l'eau où il demeure enfermé.

De même, fi l'on retire de l'eau un Tuyau capillaire où l'eau ne fe foit pas élevée autant qu'elle auroit fait, fi on l'avoit plongé, elle n'en fort point, & y demeure fuspenduë, parce que le peu de pefanteur qu'elle a & par fa petite quantité, & par l'appui que lui donnent les parois du Tuyau, n'est pas capable de vaincre la resistan ce que l'air apporte à la divifion, ou, fi l'on veut, la preffion par laquelle il repouffe en enhaut les corps plus legers que lui.

Cette resistance des liqueurs à leur divifion fait que le Mercure ne monte pas même au niveau dans les tuyaux extrêmement étroits que l'on y plonge.

M. Carré en faisant les experiences des Tuyaux capillaires avec un grand nombre de liqueurs differentes, a trouvé que l'eau eft celle qui s'éleve le plus haut, non pas qu'elle foit plus aifément divifible que toutes les autres, car il ne paroît pas qu'elles le doive être plus que l'Esprit de vin, mais parce que les furfaces de fes petites parties font d'une telle configuration, qu'elles touchent

en

en un plus grand nombre de points la furface du verre. C'eft cette conformité & cette homogeneïté des furfaces qui fait une plus grande facilité, & même une plus grande force de l'adhérence. Et comme les parties de l'eau ont encore plus d'homogeneïté entre-elles qu'avec celles du verre, l'eau s'unit plus aifément à l'eau, & de-là vient que dans un Tuyau capillaire mouïllé en dedans avant l'experience, l'eau s'éleve davantage.

Par la même raison, fi l'on approche d'une goutte d'eau pofée fur un plan, l'extrêmité inferieure d'un tuyau ca. pillaire où l'eau demeure fufpenduë, quoiqu'on l'ait retirẻ du vaisseau, ainsi que nous l'avons dit, on voit l'eau du tuyau qui defcend un peu, fi elle étoit à une grande hauteur, ou qui s'éleve un peu, fi elle n'étoit qu'à une hauteur mediocre, C'eft qu'alors l'eau du plan s'uniffant à celle du tuyau, & ne faifant plus avec elle qu'une même colonne, elle la rend trop pefante, fi cette eau fufpenduë étoit fur le point de n'être plus en équilibre avec la pression de l'air, ou bien dans le cas oppofé, elle est pouffée en enhaut avec elle.

Par la facilité que les parties d'une même liqueur ont à s'unir, M. Carré explique pourquoi un filtre imbibé de vin, & un autre imbibé d'huile, feparent du vin & de l'huile mêlés ensemble le mieux qu'il eft poffible, chacun n'attirant que la liqueur dont il a été imbibé.

par

De-là s'enfuivra, fi l'on veut, une explication affés fimple & affés naturelle des filtrations du corps. Puifque felon la plus faine Philofophie, il faut fuppofer que tous les corps organifés ont été formés immediatement les mains du fouverain Ouvrier, long-temps avant ce qu'on appelle leur naiffance, il n'y a qu'à fuppofer auffi que les filtres de ces machines imperceptibles ont été dés cette premiere formation abreuves des liqueurs qu'ils devoient féparer. Ce n'eft point là faire entrer Dieu mal à propos dans la Phifique, c'est ramener la Phisique à fa premiere fource.

1705.

Ꭰ .

V. les M.

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SUR UN NOUVEL INSTRUMENT

APPELLE MANOMETRE.

DED

E toutes les nouvelles Machines que la Philofophie moderne a entre les mains, & qu'elle employe à les recherches, il n'y en a peut-être aucune qui ait produit plus d'experiences utiles & curieufes, &, pour tout dire, plus de verités, que la Machine du Vuide. On ne fauroit donc trop en perfectionner l'ufage, ni trop s'appliquer à rendre plus fûres & plus exactes les connoiffances qu'on en peut tirer. Comme il refte toûjours de l'air dans le Recipient ou Balon de cette Machine, & qu'il ne faut pas conter fur un Vuide parfait, mais feulement fur un air beaucoup plus rarefié que celui que nous refpirons, il eft quelquefois important de favoir le dégré de cette rarefaction, & M. Varignon en donna la Regle generale dans les Memoires de l'Academie imprimés en 1693. Les capacités de la Pompe & du Balon étant connues d'un côté, & de l'autre le nombre des coups de pompe qu'on avoit donnés pour vuider l'air, il déterminoit geometriquement le rapport de la rarefaction de l'air refté dans la Machine à celle de l'air de dehors. Si, par exemple, un Animal meurt dans la Machine, on fait par-là à quel coup de pompe, & par confequent à quel degré de rarefaction, l'air qu'il refpiroit auparavant ceffe d'être refpirable pour lui, & propre à entretenir sa vie.

Mais il faut bien prendre garde que l'on n'a cette connoiffance que pour le temps & pour le moment, où l'experience a été faite. L'air que refpiroit cet Animal a cessé d'être refpirable à un certain dégré de rarefaction, mais comme la rarefaction de l'air qui nous environne varie inceffamment & par l'inégalité de chaleur, & par celle du poids de l'Atmosphere, le même Animal pris dans un au

tre temps auroit peut-être foutenu un plus grand nombre de coups de pompe fans mourir, ou n'en auroit pas tant foutenu, parce qu'on auroit enfermé d'abord avec lui dans la Machine un air qui de lui-même auroit été plus ou moins rarefié, & qui par confequent auroit demandé plus ou moins de coups de pompe pour venir à un certain degré de rarefaction determiné. Et fi, comme il eft fort aife que cela arrive, l'experience rouloit fur quelque chofe de plus délicat que la vie d'un Animal, cette observation feroit encore plus neceffaire.

Il faudroit alors un Instrument qui mefurât les differens degrés de la rarefaction de l'air en differents temps, & l'on fauroit non seulement combien l'air primitif enfermé dans la Machine auroit été rarefié par un certain nombre de coups de pompe, mais encore de combien un air primitif qu'on y auroit enfermé dans un certain temps, auroit été plus ou moins rarefié de lui-même, que celui qu'on auroit enfermé en un autre temps, ce qui donneroit le moyen de comparer trés-exactement les expe. riences qui auroient befoin de cette précision.

Le Barometre & le Thermometre marquent tous deux les differents degrés de la rarefaction de l'air, l'un ceux qui viennent de la variation du poids de l'Atmosphere, l'autre ceux qui viennent de la variation du chaud, mais ces deux caufes agiffant toûjours ensemble, & fe modifiant l'une l'autre, foit qu'elles conspirent au même effet, foit qu'elles fe combattent, mettent l'air dans un degré de rarefaction qui n'eft ni celui que marque le Barometre, ni celui que marque le Thermometre. Ces deux Instruments ont leurs fonctions separées, & d'autant plus feparées qu'ils font plus excellents, & pour les veues qui viênnent d'être expofées on auroit befoin d'un troifiéme Inftrument qui eût les deux fonctions à la fois, & qui marquât le degré de la rarefaction de l'air, tel que le produisent à chaque moment les deux causes differentes, qui ont part à cet effet.

C'est cet Instrument que M. Varignon a imaginé, &

qu'il a appellé Manometre, c'est à dire, Mesure de la rarefaction. Voici les principes fur lefquels il est construit.

Que l'on conçoive un Tuyau de verre recourbé par en bas qui ait fes deux branches de telle longueur qu'on voudra, & toutes deux ouvertes; fi l'on verfe par l'autre quelque liqueur qui ne faffe que remplir la partie inferieure des deux branches, il est visible qu'elle fe mettra de niveau. Si enfuite on fcelle hermetiquement une des deux branches, l'air qui y demeurera enfermé fera precifément au même degré de rarefaction que l'air exterieur du lieu où cette operation a été faite.

Maintenant fi l'on fuppofe que dans ce même lieu le poids de l'Atmosphere vienne à augmenter, l'air qui pefe fur la branche ouverte devenu plus fort que celui qui eft enfermé dans la branche fcellée, fera baiffer la liqueur dans la branche ouverte, la fera monter dans l'autre & par confequent en condensera l'air, mais il ne le mettra pas au même degré de condensation où il eft lui-même, car l'air exterieur porte feul tout le poids de l'Atmosphére, & l'air enfermé ne le porte qu'avec le fecours, pour ainfi dire, de la quantité de liqueur qui eft montée dans sa branche au deffus du niveau. Il s'en faut donc le poids de cette quantité de liqueur que l'air enfermé ne foit auffi condenfé que l'air exterieur; fans cela l'un auroit marqué précisément le changement arrivé à l'autre.

Pour remedier à cette difference, ou plutôt pour la prévenir, il ne faut qu'imaginer que la branche fcellée, n'eft plus droite ni verticale, mais repliée en zic-zac. La liqueur y paffera toûjours par la même cause qui l'y faifoit paffer, mais elle ne montera prefque pas à caufe de l'obliquité des parties ou plis du zic-zac, & ces plis peuvent être fi obliques, & d'ailleurs fi ferrés les uns contre les autres, qu'en quelque quantité que la liqueur vienne, elle ne s'élevera que d'une hauteur infenfible, & qui pourra n'être contée pour rien. Or ce n'étoit que par fa hauteur verticale que la liqueur aidoit à l'air enfermé à porter le poids de l'Atmosphere; parconsequent

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