C'est pour completter la claffe des laves poreufes, que j'ai fait mention de cette dernière, qui, dans le fait, n'étant qu'une lave décolorée par l'acide fulphureux, devroit être placée dans la fection des laves décomposées; mais quoiquelle ait perdu fa couleur, fa forme eft fi bien confervée qu'on ne fauroit l'exclure de la fuite des laves poreufes, dont elle forme une variété trèsremarquable; rien n'empêche d'ailleurs que la même lave poreufe décolorée ne retrouve une place parmi les produits volcaniques décompofés. Car, je le répète, l'on ne doit pas s'attendre à trouver une marche fyftématique invariable & facile à faifir, dans la manière dont la nature a opéré dans des momens de crife & de convulfion.

1

CHAPITRE XV.

DES PIERRES PONCES.

LES véritables pierres ponces ont été confondues par la plupart des Naturaliftes, avec les fcories & les laves cellulaires des Volcans; perfonne n'avoit rien dit de pofitif fur les variétés de cette pierre, & fur les matières qui paroiffent avoir donné lieu à fa formation, avant M. le Chevalier Deodat de Dolomieu qui, dans le Voyage qu'il vient de publier fur les Ifles de Lipari, entre les dans détails les plus fatisfaifans fur cette fingulière production des Volcans. Ses obfervations font fi importantes, que je m'emprefferai d'y puifer des faits qui ne peuvent que répandre un grand jour fur cette matière.

» L'Isle de Lipari, dit M. le Chevalier de » Dolomieu, eft l'immenfe magasin qui » fournit les pierres ponces à toute l'Euro"pe; cette production volcanique eft un » objet d'exportation néceffaire à plufieurs » arts, & quelque quantité qu'on en ait

J

» enlevée, elles ne paroiffent pas diminuées; » plufieurs montagnes en font entièrement » formées, on les trouve en morceaux ifo» lés au milieu des cendres blanches, fari» neufes, (qui ne font elles-mêmes que des » ponces pulvérulentes); on en a ouvert des » carrières d'une grande étendue en fouillant » aux pieds des montagnes, & dans les val» lées qui les féparent, & l'Ifle entière pa» roît avoir pour ban cette fubftance fin» gulière «. Voyage aux Ifles de Lipari, pag. 60 & fuiv.

"

Les pierres ponces ont été produites par un feu tel, que la matière dont elles font formées, fur-tout dans les ponces légères, eft dans un état de frite très - rapproché d'un verre parfait. Leur tiffu eft fibreux, leur grain est rude & fec, & ces pierres ont une apparence foyeuse luifante qui leur eft propre. Elles font beaucoup plus légères que les laves cellulaires ordinaires, moins dures & plus friables.

M. le Chevalier de Dolomieu étant à portée de les examiner en grande masse fur les lieux, en a distingué quatre espèces qui différent par le grain plus ou moins ferré, par la pefanteur, par la contexture, & par la difpofition des pores. Comme il a eu la

"

complaifance de m'apporter des échantillons de ces différentes pierres ponces, elles feront décrites dans ce Chapitre; mais il eft bon auparavant de rapporter quelques paffages du livre de M. le Chevalier de Dolomieu.

"Les pierres ponces, obferve ce Natura"lifte, paroiffent avoir coulé à la manière » des laves, avoir formé comme elles de » grands courans que l'on retrouve à diffé»rentes profondeurs les uns au-deffus des » autres autour du grouppe des montagnes » du centre de Lipari; elles fe font ainfi »entaffées en grands maffifs homogènes fur » lefquels on cherche toujours à ouvrir les » carrières pour l'exploitation des pierres bon»nes à bâtir; les pierres ponces pefantes oc» cupent la partie inférieure des courans ou » des maffifs, les pierres légères font au-dessus; » arrangement qui leur donne une nouvelle » conformité avec les courans de laves ordi"naires, dont les laves poreuses occupent » toujours la partie fupérieure. Cette difpo» fition prouve encore l'identité de nature » entre les pierres ponces pefantes & foli» des, & celles qui font légères & peu con» fiftantes, & elle démontre que cette gran» de raréfaction, ou cette légèreté n'est » point un caractère effentiel à ce genre de

picrres. Les pierres ponces qui font au milieu des cendres repréfentent les mor» ceaux de laves ou compactes ou porcuses ›› que les Volcans vomiffent & rejettent en pierres ifolées.

39

"La fibre prolongée de la pierre ponce, »eft toujours dans la direction des courans. » Elle est dépendante de la demi-fluidité de » cette lave qui file comme le verre. M. » Daubenton eft le premier qui ait observé » que les filets foyeux des pierres ponces » légères étoient un verre prefque parfait. » Lorsqu'on trouve des morceaux de pierres » ponces qui ont la fibre contournée dans » tous les fens, ils ont sûrement été lan»cés ifolés, & ils ne dépendent d'aucuns » courans". Voyage aux Ifles de Lipari, pag. 64

& 65.

"

Les Naturaliftes croient affez généralement, que les pierres ponces font peu communes dans les Volcans. M. le Chevalier de Dolomieu lui-même dit: » qu'il eft bien » fingulier que l'Ifle de Lipari & celle des » Vulcano foient les feuls Volcans de l'Eu» rope qui produifent en grande quantité la » pierre ponce, l'Ethna n'en donne point, » le Véfuve très-peu, & en morceaux ifolés. » On n'en trouve point dans les Volcans