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Ainfi donc vous aigriffez encore Philamir contre moi!.... Quand je ferois en effet capricieufe, déraisonnable, mon amie devroitelle en convenir, & avec qui ?.... Vous oubliez, Madame, que nous fommes dans le Palais de la Vérité. Si je pouvois cacher ce que je penfe, je ne m'occuperois que du foin de perfuader au Prince qu'il a toujours tort, lorsqu'il eft mécontent de vous.

Zéolide n'eut rien à répondre, elle prit de l'humeur, & garda le filence. Philamir & Palmis n'ofoient prononcer une feule parole; enfin la Princeffe, pouffant un profond foupir : en vérité, dit-elle, vous êtes l'un & l'autre d'une fociété tout-à-fait aimable!.... A quoi pensez-vous, Philamir ?.... A Mirza - Mirza!.... Qu'eft

ce que Mirza?....

Une jeune & charmante

veuve que j'ai rencontrée aujourd'hui par hafard

Et fans doute vous êtes amou

chez Gélanor,

reux d'elle?

Je n'aime que vous,

Zéolide....

Mais vous reverrez cette Mirza fi charmante?

Non, je vous facrifie le plaifir que j'aurois à m'entretenir avec elle.

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Quoi donc ! me croyez

Il eft vrai.... Hélas!

que j'ai trop de fierté

pour

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que

éprouver un femblable mouvement. Il faut malgré moi vous connoiffiez toutes mes foibleffes!.... En difant ces mots, la Princesse ne put retenir fes larmes. Toujours des reproches & des .. s'écria Philamir.

pleurs ! ....

A peine eut-il prononcé ces paroles, qu'il fentit l'effet qu'elles devoient produire fur le cœur de Zéolide, & il tomba à fes genoux. Zéolide le repouffa avec colère: vous êtes, lui dit-elle, d'une dureté revoltante!.... Non Vous ne m'aimez pas, ou du moins vous êtes incapable d'aimer, comme je vous aime. . ... Ofez dire le contraire?....-Hélas, fi je le pouvois !.....

,

Vous m'avouez donc que vous ne m'aimez pas?....O Zéolide, n'achevez point de m'accabler!.... Je n'ai point une ame auffi pure, auffi délicate que la vôtre; mais je reffens pour vous tout ce que je puis éprouver d'attachement.... J'entends. Vous n'avez plus pour moi que

....

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de l'eftime.. Si je n'ai point prononcé le
mot d'amour, c'eft que vous m'aviez vous-même
interdit cette expression...
Oui, avant que
nous fuffions dans ce Palais..... En pronon-
çant ces paroles, Zéolide rougit, & fe détourna
pour cacher fa confufion. Philamir fourit, & fai-

fiffant une des mains de la Princeffe, il la ferra tendrement dans les fiennes ; Zéolide retirant fa main: dites-moi, je vous prie, comment il est poffible qu'ayant vu une seule fois cette personne fi belle, vous desiriez fipaffionnément de la revoir? Je ne le defire point paffionnément. Mais

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Enfin

vous avez dit qu'en renonçant à la voir Vous feriez un facrifice? Cela eft vrai; fi j'avois été le maître de me fervir d'une autre expreffion, je n'aurois point employé celle - la. vous ferez un facrifice, en ne cherchant point cette étrangère. Oui, elle est aimable, fpirituelle, fa fociété m'auroit paru agréable ; je la regrette, & je ne puis m'empêcher de trouver votre jaloufie. Ma jaloufie! interrompit Zéolide, avec un extrême dépit, quelles expreffions! quel langage!.... Mais, hélas ! il n'eft que trop vrai, je vous ai montré une jaloufie ridicule, je condamne moi-même ce mouvement; fi nous n'étions pas dans ce funefte Palais, vous ne l'euffiez jamais connue !

...

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Quelques jours après cette converfation, Philamir, fe promenant un matin comme à fcn ordinaire, dans une allée de palmiers, apperçut de loin la belle Mirza qui paroiffoit fort agitée.

Elle

Elle s'approcha du Prince, & d'un air inquiet & timide: Ah, Seigneur, dit-elle, pardonnez..... Je fais dans un trouble!.... Je cherche depuis une heure un portefeuille que j'ai perdu; ne l'aŭriez-vous point trouvé?.... Non, répondit le Prince, & je m'en afflige, puisque je vois à quel point vous le regrettez..... — Il contient mon fecret.... Votre fecret!....J'ai eu l'indifcrétion d'écrire dans ce livre le détail de mes fentimens..... Mais je n'en veux pas dire davantage. Adieu, Seigneur. Si par hafard vous trouvez mon portefeuille, daignez me promettre de me le rendre, & furtout de ne point l'ouJe m'y engage; mais fi j'ai le bonheur

vrir.

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de le trouver, où pourrai-je vous rencontrer

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pour vous le rendre ? Je reviendrai demain dans cette même allée. En difant ces mots, Mirza s'éloigne ; & en s'en allant, elle retourna deux fois la tête pour regarder le Prince qui la fuivoît des yeux, & qui foupira en la perdant de vue.

Cependant Philamir fe mit à chercher le portefeuille; il parcourut tous les Jardins, mais inutilement, il ne trouva rien, & à midi il reprit le chemin du Palais; il rencontra les trois Courtifans, Ariftée, Chrifal & Zoram, qui s'entreTome III. Bb

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tenoient ensemble. Surpris de les voir en auffi bonne intelligence, il s'approcha d'eux, & leur en fit compliment. Ah! Seigneur, s'écria Chrifal, c'est notre danger commun qui nous réunit. - Comment donc ? Quand nous aurions trahi l'État,

nous ne ferions pas dans un plus grand péril............

Rien ne peut nous fauver, nous fommes perdus fans reffource!... Mais expliquez-vous...

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pour

La

Le Génie veut nous raffembler ce foir nous lire un Drame de fa compofition.... Pièce peut-être fera bonne. -Elle eft détestable par malheur; nous l'avons entendue, il y a fix mois, & nous perfuadames alors à Phanor qu'il avoit fait un chef-d'œuvre. Maintenant je conçois votre embarras. C'est apparemment pour vous éprouver, que le Génie veut que vous affiftiez à une nouvelle lecture.-Point du tout; ce qu'il y a de pis, c'eft qu'il eft à cet égard dans une parfaite fécurité ; il croit que nous l'avons flatté fur tous les points, excepté fur celui ci. Et pourquoi veut-il vous lire un Ouvrage que vous connoiffez? - Il y a fait plufieurs changemens; d'ailleurs deux Auteurs célèbres viennent d'arriver, il a le projet de les étonner, de les confondre en leur lifant cette production.

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