Imágenes de páginas
PDF
EPUB

8 pag. 577

$79.

cib. pag. 204.

164. 165.

DARIUS Alcibiade y contribuoit beaucoup. Agis, qui étoit déja fon ennemi à Thucyd. lib. caufe de l'injure qu'il en avoit reçue, ne pouvoit fouffrir la gloire qu'il acPlat. in Al- queroit. Car rien ne fe faifoit que par Diod. pag. l'avis d'Alcibiade, & on difoit communément que c'étoit lui qui faifoit réuffir tout ce qu'on entreprenoit. Les plus puiffans & les plus ambitieux des Spartiates, animés des mêmes fentimens de jaloufie, le regardoient de mauvais œil ; & enfin ils firent tant. par leurs menées, qu'ils obligerent les principaux Magiftrats d'écrire en Ionie qu'on le fit mourir. Alcibiade, fecrettement informé de cet ordre, ne laiffa pas de rendre encore de bons fervices aux Lacédémoniens; mais il fe tint fi bien für fes gardes, qu'il évita tous les piéges qu'on lui tendoit.

AN. M.3599.
Av.] C. 411.

pas

Pour plus grande fûreté, il fe jetta entre les bras de Tiffapherne, Satrape du grand Roi à Sardes ; & il ne fut lontems fans fe voir au premier degré de crédit & d'autorité à la Cour de ce barbare. Car ce Perfan, plein de fraude & de rufe, grand ami des fourbes & des méchans, & qui ne faifoit nul cas de la fimplicité & de la fincérité, ne fe laffoit point d'admirer la.

foupleffe d'Alcibiade, la facilité avec NOTHUS. laquelle il prenoit toute forte de mœurs & de caractéres, & fa grande habileté dans le maniement des affaires. Auffi n'y avoit-il point de cœur fi dur, ni de naturel fr fauvage, qui pût tenir contre les graces & les charmes de fa converfation & de fon commerce. Ceux même qui le craignoient le plus, & qui lui portoient le plus d'envie, enchantés en quelque forte par fon air affable & fes maniéres prévenantes, ne pouvoient diffimuler le plaifir infini qu'ils fentoient à le voir & à le fréquenter.

Tiffapherne donc, quoique d'ailleurs très féroce, & celui de tous les Perfes qui haiffoit le plus les Grecs, fut tellement féduit par les complaifances & par les flateries d'Alcibiade, qu'il fe livra entiérement à lui, ne cherchant qu'à lui plaire, & le flatant encore plus qu'il n'en étoit flaté; jufques-là qu'il donna le nom d'Alcibia de à celui de fes jardins qui étoit le plus beau & le plus délicieux, tant par l'abondance de fes eaux, & par la fraîcheur des bocages, que par la beauté furprenante des retraites & des folitudes que l'art & la nature

DARIUS embelliffoient à l'envi, & où éclatoit une magnificence roiale.

Alcibiade, qui ne trouvoit plus de fûreté pour lui dans le parti des Spartiates, & qui craignoit toujours le reffentiment d'Agis, commença à leur rendre de mauvais offices auprès de Tiflapherne, pour l'empécher de les fecourir de toutes fes forces, & de ruiner entiérement les Athéniens. Il n'eut pas de peine à faire entrer le Satrape dans fes vûes, qui étoient conformes aux intérêts de fon maître, & aux ordres qu'il en avoit reçus. Car, depuis le fameux traité conclu fous Cimon, les Rois de Perfe n'ofant plus attaquer ouvertement les Grecs, travaillerent à les ruiner par une autre voie. Ils chercherent à exciter fous main parmi eux des divifions, & à les fomenter par des fommes confidérables d'argent qu'ils faifoient couler tantôt à Athénes, & tantôt à Lacédémone. Ils s'appliquerent à balancer fi bien les forces des deux Républiques, que l'une ne pût pas opprimer tout-à-fait l'autre. Ils n'accordoient que de légers fecours & qui n'étoient point décififs, afin de miner infenfiblement & de confu

mer peu à peu les deux partis, en les NOTHUS. affoibliffant l'un par l'autre.

[ocr errors]

C'eft dans cette forte de conduite que la politique fait confifter l'habileté des Miniftres, qui du fond de leur cabinet, fans fe donner de grands mouvemens fans faire de grandes dépenses, fans mettre fur pié des armées nombreuses, parviennent à affoiblir les Etats dont la puiffance leur donne de l'ombrage, foit en femant des divifions dans le fein même de ces Etats, foit en entretenant des jaloufies parmi les peuples voifins, pour les mettre aux prifes les uns contre les autres.

Il faut pourtant avouer que cette politique ne donne pas une idée bien avantageufe des Rois de Perfe. Se réduire, puiffans comme ils étoient, à ces voies baffes, obfcures, & détournées, c'étoit avouer leur foibleffe, & l'impuiffance où ils fe croioient d'attaquer à force ouverte leurs ennemis, & d'en tirer raifon par des voies d'honneur. D'ailleurs eft-il permis d'emploier de tels moiens à l'égard de peuples contre lefquels on ne forme aucune plainte, qui vivent en paix fous la foi des traités, & dont tout le

DARIUS Crime eft la crainte qu'on a qu'ils ne puiffent nuire un jour ? Peut-on, par des corruptions fecrettes, tendre des piéges à la fidélité des fujets, & fe rendre complice de leur trahifon en armant leurs mains contre leur propre patrie?

Quel nom, quelle réputation ne se feroit point acquis un Roi de Perfe, si, content des vastes & riches Etats que la providence lui avoit donnés, il eûr emploié fes bons offices, fa puiffance, fes richeffes même, pour concilier entr'eux les peuples voifins, pour diffiper leurs jaloufies, pour empécher les injuftices; & fi,redouté & refpecté de tous, il s'étoit rendu le médiateur de leurs différens, le lien de la paix, & le garand des traités ? Y a-t-il conquête, quelque grande qu'elle foit, qui approche de cette gloire?

Tillapherne agilfoit felon d'autres principes, & il ne fongeoit qu'à mettre les Grecs hors d'état d'attaquer les Perfes leurs ennemis communs. Il entra donc volontiers dans les vûes d'Alcibiade; & dans le tems même qu'il fe déclaroit ouvertement pour les Lacédémoniens, il ne laiffoit pas d'affifter sous main & par mille voies

« AnteriorContinuar »