Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Agis licentia fon armée. Lyfandre, NOTHUS. avant que de congédier la fienne, s'avança vers Samos, qu'il preffa fi vivement, qu'il l'obligea enfin de capitu ler. Après y avoir rétabli les anciens habitans,il fongea à retourner à Sparte avec les galéres des Lacédémoniens, celles du Pirée, & les éperons des autres qu'il avoit prises.

Il avoit envoié devant lui Gylippe, qui avoit commandé l'armée en Sicile, pour porter à Lacédémone l'argent & les dépouilles, qui étoient le fruit de fes glorieufes campagnes. L'argent, fans compter les couronnes d'or fans nombre que les villes lui avoient données, montoit à quinze cens talens, c'est-à-dire à quinze cens mille écus. Gylippe', porteur d'une fomme fi confidérable, ne put réfifter à la tentation de s'en approprier quelque partie. Les facs étoient fcellés d'un cachet, & fembloient ne laiffer aucun lieu au vol. Il les découfit par le fond, & après avoir tiré de chacun l'argent qu'il voulut, qui montoit à Trois cond trois cens talens, il les recoufit fort proprement, & fe crut bien en fureté. Mais, quand il fut arrivé à Sparte, les bordereaux qu'on avoit mis dans cha

mille écus.

DARIUS que fac le décélérent. Pour éviter le fupplice, il se bannit lui-même de Sparte, en portant par tout la honte d'avoir terni par une fi baffe & fi fordide avarice la gloire de toutes fes belles actions.

Sur ce fâcheux exemple, les plus fages & les plus fenfés des Spartiates, craignant cette force impérieufe de l'argent, qui fubjuguoit, non feulement les hommes du commun, mais auffi les plus grands perfonnages, blamérent extrêmement Lyfandre de vouloir donner ainfi atteinte aux loix fondamentales de Sparte, & repréfentérent vivement aux Ephores qu'il étoit de leur devoir, de chaffer de Sparte tout cet or & tout cet argent, & de le charger de malédictions & d'anathêmes, comme une pefte fatale qui ravageoit tous les autres Etats & qu'on vouloit introduire dans Sparte pour corrompre la faine constitution du gouvernement, qui depuis tant de fiécles l'avoit heureufement maintenue dans un état de force & de vigueur. Les Ephores, fur le champ, firent un Décret pour profcrire cet or

3 Αποδιοπομπείθαι ] τίον, ὥσπερ κήρας επα πᾶν τὸ ἀργύριον και το χρυ- η ζωγμός

[ocr errors]

& cet argent, & ordonnérent que NOTHUS. l'on continueroit à ne fe fervir que de la monnoie reçue, c'est-à-dire de la monnoie de fer. Mais les amis de Lyfandre s'étant oppofés à ce Décret, & aiant mis tout en œuvre pour faire retenir cet or & cet argent à Sparte, l'affaire fut mife de nouveau en délibération. Il femble que naturellement il n'y avoit que deux partis à propofer, qui étoient de donner un libre cours aux espéces d'or & d'argent, ou de les décrier abfolument & de les profcrire. Les prudens, les politiques, en trouvérent un troifiéme, qui, felon eux, concilioit les deux autres par un heureux tempérament, en prenant un fage milieu entre les deux excès vicieux de trop de févérité, ou de trop de relâchement. Il fut donc ordonné que la nouvelle monnoie d'or & d'argent ne feroit emploiée que par le tréfor public, qu'elle n'auroit cours que pour les feules affaires de l'Etat, que tout particulier qui s'en trouveroit faifi, feroit mis à mort fur l'heure.

&

Etrange expédient, s'écrie Plutarque! Comme fi Lycurgue avoit craint les efpéces d'or & d'argent, & non

DARIUS pas l'avarice que ces efpéces font naître: avarice, que l'on éteignoit bien moins en défendant aux particuliers d'en avoir, qu'on ne l'enflammoit en permettant à la ville entiére d'en amaffer & de s'en fervir. Car il étoit impoffible qu'en voiant cette monnoie en honneur & en eftime dans le public, on la méprifât en particulier comme inutile, & que chacun regardât comme de nulle valeur pour fes affaires domeftiques, ce que la ville eftimoit & recherchoit fi fort pour les fiennes, les mauvais ufages autorifés par les mœurs publiques, étant mille fois plus dangereux pour les particuliers, que les vices des particuliers ne le font pour le public. Ainfi, dit encore Plutarque, les Lacédémoniens, en infligeant peine de mort contre ceux qui feroient ufage en particulier de la nouvelle monnoie, furent affez imprudens & affez aveugles pour croire qu'il fuffifoit de placer comme en fentinelle à la porte des maisons la loi & la crainte du fupplice, pour empêcher l'or & l'argent d'y entrer; pendant qu'ils laiffoient le cœur de leurs citoiens ouvert à l'ad miration & au defir des richeffles, & qu'ils

Av. J.C.404.

qu'ils y introduifoient eux-mêmes NOTHUS. une violente paffion d'en amaffer, en faifant regarder comme une chofe grande & honorable de devenir riche. Ce fut vers la fin de la guerre du AN.M.3600. Péloponnéfe que mourut, après un régne de dix-neuf ans, Darius Nothus Roi de Perfe. Cyrus étoit arrivé à la Cour avant,fa mort; & Paryfatis fa mere, dont il étoit l'idole, non contente d'avoir fait fa paix malgré tou tes les fautes qu'il avoit commifes dans fon Gouvernement, preffoit encore le vieux Roi de le déclarer fon fucceffeur à l'exemple de Darius premier de ce nom, qui avoit donné la préférence à Xerxès fur tous fes freres, parce qu'il étoit né, comme celuici, depuis l'avénement de fon pere à la couronne. Mais Darius ne pouffa pas jufques-là fa complaifance pour elle. Il donna la couronne à Arface fon aîné, & fils auffi de Paryfatis: il eft appellé Arficas dans Plutarque ; & ne laiffa à Cyrus que le gouvernement des provinces qu'il avoit déja.

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »