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ville de l'Oreftide, contrée de la Macédoine, felon Tite - Live. Cette ville étoit fituée dans une péninfule; car, fes murailles étoient entourées d'un lac; & du côté de la terre on n'y pouvoit aborder que par un chemin fort étroit. C'est ce qui fit que les habitans, fiers de leur fituation, fermerent les portes de la ville aux Romains, lorfqu'ils allerent l'affiéger deux cens ans avant l'Ére Chrétienne. Mais, voyant qu'ils ne laiffoient pas d'avancer, & que s'étant rendu maîtres du chemin, ils venoient à l'abri de la tortuë, pour les enfoncer; ils n'attendirent pas la dernière extrêmité, & fe rendirent.

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CÉLÉUS, Celeus, Kexéos, Κελέος, (a) roi d'Éleufis. Cérès , ayant appris l'enlèvement de fa fille par Pluton, résolut de demeurer errante parmi les hommes, fous la figure & les habits d'une fimple mortelle. Dans ce déguisement, elle arriva aux portes d'Éleufis, & s'affit fur une pierre, où elle s'abandonnoit à toute fa trifteffe, quand Céléus roi des Éleufiniens, qui revenoit à la ville avec fa femme & fa fille, l'aborda, & l'engagea à venir prendre chez lui le repos, dont elle paroiffoit avoir befoin. Céléus, de fon côté, n'étoit guere moins affligé; fon fils étoit extrêmement malade; le fom. meil depuis longtems n'avoit fermé fes paupières, & on n'en efpéroit plus rien. Cérès daigna le baifer en arrivant; ce feul bai

fer le rappella à la vie & lui rendit fes forces.

La Déeffe voulut reconnoître l'hofpitalité de Céléus par d'autres bienfaits; elle fe chargea de l'éducation de fon fils, & fe propofa de le rendre immortel en le nourriffant, pendant le jour, de fon lait divin, & le mettant la nuit fous la braise ardente pour le dépouiller de tout ce qu'il avoit de terreftre. Le jeune Triptolème [car c'étoit le nom de l'enfant] croiffoit à vue d'œil, & d'une façon jufqu'alors inconnue aux mortels. Céléus & Métanire fa femme, étonnés des talens de leur hôteffe, eurent la curiofité de l'observer. Métanire vit Cérès prête à mettre Triptolème dans le feu; elle fit un cri, & le priva ainfi de l'avantage que la Déeffe lui préparoît. » Il fera donc mor»tel, dit-elle, puifque le deftin » l'ordonne; mais, il fera le pre«mier d'entr'eux qui labourera » la terre, qui la femera, & qui » recueillera le plus doux de fes » fruits. « Alors, Cérès prit un air majeftueux qui la fit reconnoî

tre.

Virgile attribue à Céléus l'invention de plufieurs inftrumens d'ofier, comme les claies & autres. Ovide nous représente ce Prince rapportant chez lui dans un panier, du gland & des mûres de buiffon, nourriture ordinaire des hommes dans ce tems de fimplicité. Les filles de Céléus, & après elles, celles de leur race fu

(a) Pauf. pag. 25, 71, 110. Virg. Mém. de l'Acad. des Infcript. & Bell. Georg. L. 1. v. 166. Myth. par Lett. Tom. IV. pag. 649. & fuiv. Tom. M. l'Abb. Ban, Tom. VI, pag. 158.|XXI. p. 85, 98.

165,

rent confacrées aux mystères d'Éleufis.

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niens avec les Ithaciens. CÉLEUSME, Celeufma, (b) nom que l'on donnoit au cri, lequel on exhortoit chez les Grecs les rameurs à redoubler leurs efforts. Ce cri, étoit felon Ariftoph ne, rhippape ou oop.

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Le Céleufme étoit auffi à l'ufage des gens de mer chez les Romains. Les commandans avec leurs Céleufmes, dit Arrien, ordonnoient aux rameurs de commencer ou de ceffer; & les rameurs répondant par un cri, plongeoient tout à la fois leurs rames dans le fleuve.

Ce terme fe trouve dans l'Écriture. Jérémie l'emploie en trois endroits, felon la Vulgate. Céleufme fe met pour les cris de joie des vendangeurs, &, par proportion, pour les cris de joie des vainqueurs, qui infultent aux vaincus. Il femble que Jérémie le met pour un cantique de victoire. L'Hébreu heidad fe dit propre ment des vendangeurs, qui crient hedad, hedad, hedad.

CÉLEUSTE, Celeufte, (c) forte de danfe ridicule des Anciens. Nous n'en fçavons pas davantage.

(a) Myth. par M. l'Abb. Ban. Tom. VI. p. 99. T. VIII. p. 42.

(b) Jerem. c. 25. v. 30. c. 48. v. 33. c. 51. v. 14. Antiq. expl. par D. Bern. de Montf. Tom. IV. p. 271, 272.

CÉLIBARIS, Celibaris, forte de javelot, avec la pointe duquel fe faifoit la coëffure des nouvelles mariées. Il falloit que ce javelot eût été dans le corps d'un Gladiateur. Il y a des Écrivains qui croyent que l'on vouloit marquer par-là que les premiers mariages avoient été faits à la pointe de l'épée & par des combats. C'eft ainfi que les filles des Sabins furent enlevées & portées par force dans la maison des premiers Romains. Ne pourroit-on pas ajoûter que c'étoit peut-être pour marquer à la mariée, qu'elle devoit partager avec fon mari toutes fortes de dangers?

CELIBAT, (d) c'est l'état d'une perfonne, qui vit fans s'engager dans le mariage.

Le Célibat, dans tous les tems, a eu, dit M. Morin, des partifans & des cenfeurs paffionnés. Notre intention, ajoûte M. Morin, n'est pas de prendre parti, ni pour ni contre, ce ne font pas-là nos affaires. Nous ne prétendons pas non plus en donner une hiftoire complette; le deffein feroit trop vafte; & le plus laconique des Chinois, avec fes monofyllabes entreprendroit inutilement de la réduire dans les juftes bornes d'un article de Dictionnaire. Trois propofitions en feront voir d'un coup-d'oeil toute l'étendue. Le Célibat eft auffi ancien que le monde, auffi étendu que le mon

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(c) Antiq. expl. par D. Bern, de Montf. Tom. III. p. 311.

(d) Mém. de l'Acad. des Infcript. & Bell. Lett. Tom. I. p. 66. T. IV. p. 308. 16 fuiv.

de, & durera autant & infiniment plus que le monde.

Hiftoire du Célibat.

le

L'on ne fçauroit douter que Célibat ne foit auffi ancien que le monde. Il eft clair, par l'histoire de la création, que nos premiers parens l'observerent exactement pendant tout le tems qu'ils furent dans le Paradis terreftre. Il y a eu même des Auteurs confidérables & de l'ancienne & de la nouvelle Loi, qui ont prétendu que s'ils avoient répondu fidelement au premier deffein du Créateur, ils auroient continué de vivre dans ce bienheureux état ; qu'ils ne perdirent leur innocence que lorfqu'ils cefferent d'en garder les régles, & que la manducation du fruit défendu, dans le ftyle modefte & figuré de l'Écriture, ne défigne autre chofe que l'acte de cette infraction. Ils ne manquent même ni d'exemples facrés & profanes pour appuyer leur explication grammaticale, ni de raifons plaufibles pour juftifier leur opinion, tirées du fentiment de leur nudité, à laquelle ils n'avoient fait aucune attention jufque-là, & qui fuivit immédiatement leur péché; de l'idée d'irrégularité, qui eft attachée à cette action naturelle chez toutes les nations de la terre, de la pudeur qui s'y oppofe, de la honte qui l'accompagne, du remords qui la fuit, du péché originel qui fe communique par cette voie ; & enfin de ce que dans l'autre vie, qui doit ramener toutes les créatures à leur véritable principe, il ne fera quef

tion ni de maris ni de femmes ; ce fera un Célibat éternel. Il ne nous appartient pas de donner à ce fentiment les qualifications qui lui conviennent; il eft fingulier, il paroît oppofé à la lettre de l'Écriture, c'en eft affez pour le rejet ter. Elle nous apprend que nos premiers parens vécurent enfemble dans le Paradis terreftre comme frere & fœur, comme les Anges vivent dans le Ciel & comme nous y vivrons un jour. Cela fuffit pour notre fujet. Voilà le premier & le parfait Célibat.

Sçavoir combien il dura, c'eft une queftion purement curieufe, qui ne fait rien à la chose. Les uns ne le font durer que quelques heures ; les autres, que quelques jours. Il y en a de plus hardis qui pouffent cet intervalle jufqu'à 30 ans, fondés fur des raisons mystiques, fur je ne fçais quelles anciennes traditions de l'Églife Grecque; & fur l'époque de la naiffance de Cain, qui, fuivant leur calcul chronologique, ne dut venir au monde que 30 ans après la

création.

Quoi qu'il en foit, à ce premier Célibat, les Docteurs Juifs en font fuccéder un autre qui dura bien davantage; car, ils prétendent qu'Adam & Eve, confus de leur crime, en firent pénitence pendant cent ans, fans avoir aucun commerce enfemble; conjecture qu'ils établiffent fur la naiffance de Seth, leur troisième fils, que Moïfe ne leur donne qu'à l'âge de cent trente ans. Caïn & Abel, dans leur fystême, ayant été les fruits gémeaux de leur premier

aveuglement. Mais, n'eft-ce point faire trop d'honneur à leurs rêveries que de les rapporter. ?

A parler jufte, il n'y a qu'Abel à qui l'on puiffe attribuer, avec fondement, l'honneur d'avoir gardé le Célibat pendant toute fa vie avant le Déluge. L'Auteur facré ne lui donne ni femme ni enfans; on eft en droit de fuppofer qu'il n'en eut point; auffi eft-il traité de apferos, par les Grecs, & de premier vierge & martyr par quelques Auteurs, qui fuppofent que la conteftation qu'il eut avec fon frere au fujet de leurs facrifices, intéreffoit la Religion; fça voir, fi fon exemple fut fuivi dans les générations fuivantes, & fi les fils de Dieu qui fe laifferent corrompre par les filles des hom

mes >

n'étoient point une espèce de religieux qui tomberent dans le défordre, c'eft ce que l'on ne fçauroit dire; la chofe n'eft pas impoffible. S'il eft vrai qu'il y eût alors des femmes, qui affectoient la ftérilité, comme il paroît par un fragment du prétendu livre d'Enoch, cité par Cafaubon; il pouvoit bien y avoir eu auffi des hommes qui en fiffent profeffion. Mais, à dire la vérité, les appatences n'y font pas favorables. Il étoit question alors de peupler le monde; la loi de Dieu & celle de la nature impofoient à toutes fortes de perfonnes une espèce de néceffité de travailler à l'augmentation du genre humain. Il est à préfumer que ceux, qui vivoient alors, fe faifoient une affaire principale d'obéir à ce précepte. Tout ce que l'Histoire nous dit des Pa

triarches les plus confidérables de ce tems-là, c'eft qu'ils prenoient des femmes & qu'ils en donnoient, c'eft qu'ils mirent au monde des fils & des filles, & puis moururent, comme s'ils n'euffent eu rien de plus important à faire.

Ce fut à peu près la même chofe dans les premiers fiecles qui fuivirent le Déluge. Il y avoit beaucoup à défricher & peu d'ouvriers; c'étoit à qui en auroit le plus. Alors, l'honneur, la nobleffe, la puiffance des hommes confiftoient dans le nombre des enfans. On étoit fûr par-là de s'attirer une grande confidération, de fe faire respecter de fes voifins, & d'avoir une place dans l'Hiftoire. Celle des Juifs n'a pas oublié le nom de Jaïr, juge d'Ifraël, qui avoit trente fils dans le fervice; ni celle des Grecs, ceux de Danaus & d'Égyptus dont l'un avoit cinquante fils, & l'autre cinquante filles. La ftérilité paffoit alors pour une espèce d'infamie dans les deux fexes, & pour une marque non équivoque de la malédiction de Dieu; au contraire, ils regardoient comme un témoignage authentique de fa bénédiction, d'avoir au tour de fa table, un grand nombre d'enfans rangés comme de jeunes oliviers. Ajourd'hui, ce n'est plus la même chofe.

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On avoit en vue alors les colonies, & de répandre fa famille au long & au large; préfentement nous craignons que la terre ne nous manque. Dans ces tems-là, le Célibat étoit une espèce de péché contre nature; ceux qui

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ofoient l'obferver, étoient regardés comme des mifanthropes, ennemis du genre humain, méprifés, infultés impunément de tout le monde. Certainement les anciens Législateurs ne les prenoient pas fous leur protection, à commencer par Moïfe, dont les ordonnances ne laiffoient & ne laiffent pas encore trop aux particuliers la liberté de fe marier ou non. Ses Commentateurs foûtiennent qu'à la réferve de certaines perfonnes, ils y font tous obligés en confcience, dès l'âge de vingt ans. C'eft un de leurs fix cens treize préceptes. De-là viennent ces maximes fi fréquentes de leurs Cafuiftes , que tout homme qui ne prend pas les mefures néceffaires pour fe donner des héritiers, n'eft pas un homme, & qu'il doit être regardé comme homicide.

Lycurgue ne les traitoit pas plus favorablement par fes loix. Ils étoient notés d'infamie, exclus de toutes charges civiles & militaires, même des fpectacles & des jeux publics; ils étoient obligés d'en fervir eux-mêmes dans certaines fêres folemnelles, où ils étoient exposés à la rifée du peuple, & promenés tout nus autour des places publiques. Il y avoit même une folemnité où les femmes avoient la bonté de les produire dans cet état aux pieds de leurs autels, où elles leur faifoient faire amende honorable à la nature, accompagnée de foufflets & de coups de verges à difcrétion; & pour comble de mortification, elles leur faifoient chanter des chanfons infamantes compofées à

cette intention contr'eux. Ces Républicains zélés poufferent encore leurs précautions plus loin, en publiant des réglemens févères contre ceux qui fe marioient trop tard, & contte les mauvais maris qui n'en ufoient pas bien avec leurs femmes.

Dans la fuite des tems, quand les hommes furent moins rares, ces loix pénales furent mitigées. Platon, dans les fiennes, toléroit le Célibat jufqu'à l'âge de trente-cinq ans; & il fe contenta d'ordonner que ceux qui voudroient le pouffer plus loin, feroient interdits des emplois, & qu'ils auroient les derniers rangs dans les cérémonies publiques. Les loix Romaines, qui fuccéderent aux Grecques, furent auffi moins rigoureuses. Les Cenfeurs étoient chargés d'empêcher, autant qu'ils pouvoient, ce genre de vie folitaire préjudiciable à l'État. Un des articles de leurs inftructions, rapporté par Cicéron, leur enjoignoit expreffément de ne pas permettre aux citoyens de vivre dans le Célibat. Pour les en détourner, ils fe fervoient de différens moyens. Ils ne les recevoient ni à tefter ni à rendre témoignage. La premiè re queftion que le juge faifoit à ceux qui le préfentoient pour prêter ferment en juftice, étoit celle-ci: Ex animi tui fententia, tu equum habes, tu uxorem habes! » A votre ame & confcience, » avez-vous un cheval, avez>> vous une femme? « S'ils ne répondoient pas pertinemment fur ces deux articles préliminaires, ils n'étoient pas écoutés; on les ta

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