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Khouma

Benbatrick,

Elmacin.

Khoumarouiah. Ce dernier fongea alors à porter la guerre chez les Grecs. Son Général Thougdge fils de Dgiouph, Après J.C. gouverneur de Damas fe rendit à Tharfe ; de-là il fe repan- rouiah. dit dans le voisinage avec fes troupes & fit un grand nom- L'an 895. bre de prifonniers. Khoumarouiah ne jouit pas long-tems de la paix qu'il avoit faite avec le Khalif, il avoit quitté l'Egypte & étoit venu demeurer à Damas (a) où il avoit fait bâtir un palais_proche le monaftére de Maran au bord de la riviere Toura; quelques-unes de fes Concu- Aboulfedha bines avoient eu des intrigues avec des efclaves; Khou- Tabreselmarouiah en avoit été informé pour prévenir le châti- manfouri. ment qu'elles méritoient, elles le furprirent pendant qu'il dormoit, & le maflacrerent de concert avec quelques ef- L'an 986. claves (b). Les affaffins furent auffi-tôt arrêtés & punis; on porta leurs têtes en Egypte & leurs corps furent expofés à Damas. Khoumarouiah fut tranfporté en Egypte & enterré au Mont Mocattham. Sa mort repandit la confternation' dans tous fes Etats.

Ce Prince en parvenant au thrône, ce Prince avoit fait Aboulma faire de nouveaux bâtimens dans la ville de Mefr, dont hafen. la magnificence eft capable d'étonner ceux qui se repréfentent les Mahométans comme des barbares qui negligeoient les arts. Le fuperbe palais qu'il avoit fait conftruire étoit accompagné de grands jardins dans lefquels on étoit à l'abri des chaleurs exceffives que l'on reffent en Egypte. On y trouvoit tout ce qui peut flatter la moleffe des Princes Orientaux. Les parterres étoient formés de Jafmin & d'autres fleurs qui représentoient des defseins & des paffages de l'Alcoran que l'on pouvoit lire. Il y avoit fait planter des palmiers dont le tronc étoit entouré de cuivre doré; en dedans étoient des tuyaux de plomb qui reffortoient en dehors & produifoient autour de l'arbre plufieurs fontaines. D'un autre côté on voyoit une grande tour de bois, remplie de toutes fortes d'oifeaux. Plus loin on appercevoit un falon dont les murailles n'étoient

(a) L'an de l'Hegire 282.
(b) Dans le mois Dzoulhedge.

Khoumarouiah.

Après J.C. qu'or & azur; là étoit le portrait du Prince & celui de toutes les femmes, en bois peint. Ces ftatues portoient fur leurs têtes des couronnes d'or enrichies de pierreries; elles avoient des pendans d'oreilles, & étoient habillées des plus riches étoffes du pays. Tel étoit le gout du Prince, quoique fa Religion deffendit les images. Les arts fleuriffoient fous fon regne: ces fortes de bâtimens ne nous permettent pas d'en douter, ils étonnoient par leur grandeur & leur magnificence, le gout feul n'y regnoit pas. On y admiroit un baffin fingulier qui avoit cinquante coudées de largeur & autant de longueur. Il étoit rempli de vif argent & avoit couté des fommes immenfes. Il étoit environné de colomnes de marbre dont le chapiteau étoit d'argent. On y avoit attaché des anneaux du même métal, dans lefquels on paffoit des cordons de foye qui fervoient à foutenir un lit ou fopha, dont l'interieur étoit rempli d'air, de forte que quand Khoumarouiah étoit couché deffus, l'air en fortoit & faifoit agiter le vif argent. Le foleil, la lune & les étoiles qui refléchiffoient dans ce oaflin leurs rayons produifoient un effet fingulier & merveilleux. Dans un autre endroit il y avoit un petit pavillon fort élévé environné de tapis pour fe garantir de la chaleur ; de-là on découvroit tout le palais, les jardins, la ville de Mefr, le défert, le Nil & la campagne.

Khoumarouiah avoit fait conftruire encore une grande ménagerie dans laquelle on nourriffoit toute forte d'animaux féroces. Ils avoient chacun leur loge avec des baffins de marbres, dans lefquels l'eau venoit fe rendre par de petits canaux faits de bronze. Au milieu de ce bâtiment il y avoit une très-grande place couverte de fable, avec un grand baffin. Plufieurs hommes étoient deftinés à foigner ces animaux. Les loges s'ouvroient par en haut & l'on n'y entroit qu'après que l'animal s'étoit retiré dans la grande place. De tems-en-tems Khoumarouiah faifoit combattre ces animaux les uns avec les autres, en préfence de toute fa Cour. Il y avoit entre autres un lion qui étoit tellement. apprivoifé, qu'il venoit s'affeoir à côté du Prince quand il étoit à table; on le lachoit ordinairement dans le Palais, & il ne

Khouma

faifoit de mal à perfonne. Quand Khoumarouiah dormoit, il faifoit fentinelle devant lui & empêchoit qu'on appro- Après J. C. chất. Les écuries de ce Prince répondoient à la grandeur rouiah. & à la richeffe de tous ces bâtimens. Il avoit aufli formé une compagnie de foldats choifis qui étoient vêtus fuperbement. On ne les prenoit que quand ils étoient d'une grande taille, qu'ils avoient donné des preuves de leur courage & qu'ils étoient de bonnes mœurs.

On peut juger par-là des richesses immenfes de Khoumarouiah & des revenus de l'Egypte. Ces travaux font dignes des anciens Rois du pays ; il femble que l'Egypte n'ait Befoin que d'un maître qui y réfide, pour produire toujours des merveilles. La vûe des piramides, ces maffes énormes qui nous étonnent encore, ne peuvent infpirer à un Prince qui les a toujours devant les yeux que des idées de grandeur & de magnificence, & le gout pour les vaftes édifices.

Auffi-tôt que ce Prince fut mort, les Emirs affemblés Dgifch. mirent fur le thrône Dgisch fon fils qui étoit encore enfant ; mais plufieurs s'oppoferent à fon installation & Elmacin. vouloient qu'on donnât la couronne à fon oncle. Il y eut à cette occafion quelques tumultes ; l'oncle de Dgisch fut tué & on jetta fa tête à ceux qui s'obftinoient à le vouloir pour leur Prince; alors ce parti fut diffipé: mais le regne de Dgisch n'en fut pas pius tranquile. L'année suivante (a) Thougdge fils de Dgiouph gouverneur de Damas dépofa Dgisch. Cet enfant fut tué avec fa mere; la capitale de P'Egypte fut brûlée & Haroun fils de Khoumarouiah fut mis fur le thrône. Il étoit âgé de dix ans, il s'obligea d'en- Haroun, voyer tous les ans au Khalif un tribut d'un million cinq cent mille piéces d'or.

Sous fon regne l'Egypte vit des phénomenes extraor- L'an 897. dinaires (6). Un vent violent renverfa les maifons & couvrit tout le monde d'un fable rouge, extrêmement fin. Il dans le foleil quatre colonnes de feu, le lendemain le vent diminua ; mais l'air, la terre, les arbres & tout ce

parut

(4) L'an 283 de l'Hegire.

(6) Un Jeudi 25 de Rabiclaoual de l'an 284.

Après J. C.
Haroun.

L'an 898.

Elmacin.

que l'on voyoit, paroiffoient de couleur rouge. Vers le mi-
di
tout fembla jaune ; & enfin noir le lendemain à midi.
Deux ans après (a) il arriva un tremblement de terre,
on vit dans l'air des feux qui s'agitoient violemment.

La puiffance des Thoulounides en Egypte diminuoit Aboulfedha confidérablement. Tharfe fe fouleva & demanda (b) un L'an 899. gouverneur au Khalif Motaded qui enleva à Haroun Emed, & Kennaferin; mais l'année fuivante (c) Haroun lui fit redemander les territoires de cette derniere place & d'Aouafem,offrant de payer tous les ans quatre cens cinquante mille piéces d'or. Le Khalify confentit & lui renouvella l'inveftiture de l'Egypte en lui envoyant la robe & l'épée.

Aboulfedha

L'an 900.

L'an 901.

Novairi.

Tabrefel

mansouri.

Haroun fit quelques tentatives dans la Syrie (d), mais la révolte (e) des Carmathes dans cette contrée, donna beaucoup d'occupation à fes troupes,& principalement à Thougdge fon gouverneur dans Damas. Čet officier étoit un Turc originaire de Phergana dans la Tranfoxiane. Les Carmathes contre lefquels il fut obligé de prendre les armes, étoient une espèce d'Hérétiques dont le fondateur qui porD'Herbelot toit le nom de Carmath, étoit originaire, fuivant quelques-uns, d'un village des environs de Koufa, appellé Hamadan-carmath. Le nom du village étoit devenu dans la fuite celui de l'Héréfiarque; quelques autres Hiftoriens prétendent qu'il a été ainfi nommé, à caufe de fa figure petite & contrefaite, qui fe dit en Arabe Carmath. Yahreselmanfouri le fait originaire du Khorafan,& dit qu'il vint dans le village de Nahraïn proche Koufa où il fervoit les marchands. Ceux-ci ayant été mécontens de lui, le battirent, & l'abandonnerent dans le chemin. Comme il étoit malade,un homme appellé Hamadan & furnommé Karamitha, c'està-dire en Nabathéen,qui a l'œil rouge, le retira. On regarde ses fectateurs comme des impies & des athées, ils infecterent en peu de tems toute la Syrie & les provinces voisines, & furent caufe que l'on répandit beaucoup de fang pour les

(a) L'an 286 dans le mois Dzoulcaada.

(b) L'an de l'Hegire 285.
(c) L'an de l'Hegire 186.
(d) L'an 283 de l'Hegire.
(e) L'an 229 de l'Hegire.

Haroun.

Soyouthi

détruire. On eft affez incertain de l'année dans laquelle cette Secte a commencé à paroître : Soyouthi place cette époque Après J. C. à l'an 271. de l'Hegire, de J. C. 884, d'autres la mettent quelques années plus tard, c'eft-à-dire, en 278 de l'Hegire, de J. C. 891. Quoiqu'il en foit, la doctrine que les Carmathes enfeignoient l'épée à la main, étoit entierement oppofée à celle de Mahomet. Carmath que l'on regardoit comme un Prophête, s'attira à dos les habitans du lieu où il demeuroit & fe fit renfermer dans une prifon. Ses Sectataires firent courir le bruit qu'il étoit reffufcité; il avoit trouvé le moyen de fe fauver, & il étoit paffé dans la Syrie. Il choisit douze de fes difciples qu'il envoya prêcher fa doctrine. Il avoit commencé par une vie fort auftere, moyen qui réuffit toujours à celui qui veut en impofer. Au lieu de cinq prieres que les Mahométans faifoient par jour; il en ordonna cinquante. Il profcrivit les fréquentes ablutions, permit le vin, n'ordonna que deux jours de jeunes dans l'année, le Newrouz & le Mihirjan, c'est-à-dire le premier jour des deux équinoxes. Il voulut que l'on regardât comme l'Apôtre de Dieu & comme Gabriel & Jefus-Chrift, Mohammed fils d'Hanifa, que le pélerinage se fit à Jérufalem, & que l'on fe tournât vers cette ville en faifant fa priere, & il inftitua le Lundi pour être le jour de fête & de priere, comme le Sabbat chez les Juifs, & le Vendredi chez les Musulmans. En adouciffant ainfi une partie des cérémonies obfervées par les Mahométans, il encherit fur quelques autres. Il exigea le cinquiéme des biens au lieu de la diyme. Elle fe donnoit à leur Imam qui étoit tout à la fois Pontife & Souverain, & qu'ils appelloient Maaffum, c'est-à-dire préféré de Dieu. Ils allégo- Tabrefet rifoient tous les préceptes de Mahomet; la fornication mansouri défendue dans l'Alcoran étoit pour eux le précepte d'une obéissance aveugle à leur chef. Le jeune fe réduifoit à garder envers les étrangers un profond filence fur les Myftères de la Religion.

Dans la fuite ces Carmathes fe partagerent en plufieurs branches, dont les plus confidérables font les Batheniens, autrement nommés Ifmaeliens ou Affaffins. Quelques

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