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que les

L'an 1163.

Cothbed

din.

ptiens s'étoient engagés de donner au Roi Baudouin', & qu'ils refufoient alors de payer. Dargham qui en étoit venu aux Apr. J. C. mains avec Amaury, & qui avoit été battu, s'étoit retiré Noureddin dans la ville de Bilbeis ou Pélufe, & dans la crainte Francs ne vouluffent pénétrer plus avant, il avoit fait rompre les digues qui retenoient les eaux du Nil. Le Roi de Jérufalem après cette victoire s'en étoit retourné dans fon pays, & Dargham étoit refté maître abfolu dans l'Egypte.

C'eft pendant ce tems-là que Schaour s'étoit retiré auprès L'an 1164. de Noureddin, & que Schirkouh fut chargé de le rétablir. Schaour offroit de donner à Noureddin la troisieme partie des revenus de l'Egypte. Noureddin avoit un autre deffein en entreprenant cette guerre, c'étoit celui de connoître à fond les forces de l'Egypte, afin de s'en rendre maître par la fuite. Schirkouh, accompagné de fon neveu Saladin partit (a) pour l'Egypte avec une armée. Noureddin le fuivit jufques fur les frontieres de fes Etats, tant pour l'escorter, que pour faire croire aux Francs qu'il méditoit contre eux quelque entreprife. En effet, ceux-ci ne fongerent qu'à se garantir, & laifferent Schirkouh pénétrer dans l'Egypte. Il y arriva fans aucun accident. Cet Emir étoit déja dans un âge affez avancé ; il étoit d'une petite taille, mais fort gros, ce qui ne l'empêchoit pas de fupporter avec beaucoup de patience toutes les fatigues de la guerre. Dargham, en apprenant fa marche, avoit eu recours aux Francs, & leur avoit offert le double des tributs qu'il leur payoit auparavant, s'ils vouloient le fecourir. Mais avant que ce traité eût été conclu, Dargham avoit déja été vaincu par Schirkouh; il avoit été tué, & Schaour étoit rentré dans le Caire, où il avoit été rétabli dans toutes fes dignités.

Schaour ne tarda pas à pénétrer les deffeins de ceux qui venoient pour le fecourir, & il chercha les moyens de les éloigner au plutôt de l'Egypte. Il refufa de s'acquitter de toutes les promeffes qu'il avoit faites à Noureddin, & ordonna même à Schirkouh, qui étoit campé hors du Caire, de retourner en Syrie. Schirkouh le fomma plufieurs fois de (a) Dans le mois Dgioumadi elaoual de l'an 559.

L'an 1164.

il

tenir parole; & lorfqu'il vit qu'il n'étoit point écouté, Apr. J. C. détacha, par le confeil de Saladin, quelques corps de trouNoureddin pes qui allerent s'emparer en fon nom de la ville de BelCothbed- beis ou Pélufe. Cette démarche intimida tellement Schaour,

din.

qu'il fe hâta de renouveller les traités que Dargham avoit faits avec les Francs, afin de chaffer promptement un ennemi fi redoutable. Il fit entendre au Roi de Jérufalem qu'il· étoit également à craindre pour les Francs & pour les Egyptiens, que Noureddin fe rendît maître de l'Egypte, ce qui augmenteroit tellement fa puiffance, qu'il feroit en état de s'emparer facilement de la Syrie entiere. Amaury qui ne fongeoit intérieurement qu'à faire la conquête de l'Egypte, accepta les propofitions de Schaour, pafla dans ce pays à la tête d'une armée, & joignit fes troupes à celles de Schaour. Ils allerent affiéger Schirkouh dans Pélufe, où ce Général en apprenant l'arrivée des Francs s'étoit retiré. Il s'y étoit retranché avec fes troupes. Les Francs & les Egyptiens referent devant cette place pendant quelques mois (a). Ils y étoient encore quand ils apprirent que Noureddin avois pris Harem, & qu'il fe difpofoit à marcher vers Paneas. Ils furent abbatus de ce coup, & ne fongerent plus qu'à s'en retourner pour défendre leur pays. Ils propoferent à Schirkouh de le laiffer fortir de l'Egypte, à condition que cet Emir leur rendroit tous les prifonniers. Schirkouh qui ignoroit les grandes conquêtes de Noureddin confentit à faire la paix, & elle fut auffi-tôt fignée. Il fortit de Pélufe, en marchant en bon ordre; il fe mit lui-même à la queue de fon armée, ayant en main une espece de hache d'arme. Les Egyptiens & les Francs le regardoient paffer. Un Franc s'approcha de lui, & le voyant ainfi armé, lui dit: Eft-ce que vous craignez que nous ne vous attaquions: Il vous en coûteroit cher, répondit Schirkouh, fi vous le faifiez, il n'y a pas un de mes foldats qui ne tuât un des vôtres avant que de mourir. Schirkouh retourna en Syrie.

Noureddin, comme nous l'avons dit, cherchant à réparer l'affront de la défaite qu'il avoit effuyée quelque-tems aupa

(b) Depuis le commencement de Ramadhan jufqu'au mois Dzoulcaada.

Apr. J. C.

Cothbed

favant proche Hemeffe, avoit demandé des troupes à fon frere Cothbeddin, Roi de Mouffoul, à Phakhreddin cara l'an 1164. arflan, Roi du château de Khipha, à Nodgemeddin albi, Noureddin Roi de Maredin, & à plufieurs autres Princes des environs. din. Cothbeddin lui envoya Zein eddin aly avec une armée Nodgmeddin fit de même, Phakhreddin vint en perfonne avec les troupes. Elles marcherent toutes vers Harem dans la contrée d'Antioche. Noureddin battit cette place avec plufieurs machines. Tous les Francs fe raffemblerent pour yenir au fecours, Boemond III. fils de Raimond, Prince d'Antioche, Raimond le jeune, Comte de Tripoli, Calaman (a) Gouverneur de Cilicie pour l'Empereur, Jofcelin que les Hiftoriens Orientaux appellent le plus brave des Francs; Hugues de Lufignan, Toros Roi d'Arménie, tous ces Princes accoururent avec leurs troupes. Cette armée étoit innombrable. A leur approche Noureddin leva le fiége de Harem, & fe retira vers Artah ou Artéfie, afin de faire croire aux Francs qu'il prenoit la fuite. Ceux-ci n'écoutant que leur courage, attaquerent l'aile droite de Noureddin qui étoit formée des troupes d'Alep & de celles de Phakhreddin. Elle feignit de prendre la fuite, & dans le tems qu'ils étoient le plus occupés à la pourfuivre, le refte de l'armée fondit fur eux le fabre à la main, & en fit un affreux carnage. Les Francs fe battirent en défefpérés, dix mille des leurs furent tués fur le champ de bataille, le nombre des prifonniers fut plus grand. Parmi eux étoient Boemond, Raimond, CaTaman, Jofcelin, Hugues de Lufignan. Ils furent tous conduits à Alep. Après cette grande victoire, Noureddin revint devant Harem & s'en empara (b). On lui confeilloit de marcher de fuite vers Antioche, mais outre qu'il regardoit cette place comme très-difficile à prendre à caufe de fes fortifications, il craignoit encore que les Francs fe voyant. affiégés, ne la remiffent à l'Empereur de Conftantinople,. Manuel Commène, & il aimoit mieux avoir pour voifin Boemond, que ce Prince. Son armée fe répandit dans tous les

(a) Les Hiftoriens Orientaux le nomment Donc, ou Doucas. Il étoit Duc de Cilicie.

(b) Le 21 de Ramadhan de l'an 559. Guillaume de Tyr place mal-à-propos cet événement en 1165.

A a iij

Apr. J. C.
L'an 1164.

Benelathir.

environs jusqu'à Laodicée & Souaïda, après quoi il s'en re

tourna.

que

&

Noureddin Pendant Noureddin rendoit fon nom immortel parCothbed- mi les Mufulmans, par les grandes victoires qu'il remportoit din. fur les Chrétiens; fon frere Cothbeddin régnoit paisiblement dans Mouffoul, par les confeils de Dgemaleddin Mohammed, fils d'Aly el Ifphahani, qui avoit confervé aux enfans de Zenghi les Royaumes de Mouffoul & d'Alep. Cothbeddin lui avoit entiérement abandonné le gouvernement du Royaume; mais quelques Emirs jaloux de l'autorité de ce Miniftre, chercherent à le perdre dans l'efprit du Prince Dgemaleddin, fut arrêté & mis en prison (a), où il mourut regretté de tout le monde; il étoit un des plus grands hommes de fon fiécle. Il fut dabord enterré à Mouffoul l'année suivante transféré à la Mecque, & de-là à Médine, où il fut mis dans un lieu qu'il avoit fait bâtir proche le tombeau de Mahomet. Dans tout le chemin fon corps fut accompagné de Religieux & de gens qui lifoient l'Alcoran ; le peuple accouroit en foule pour faire des prieres fur fon cercueil. On regrettoit en lui un homme qui n'avoit été occupé qu'à foulager les pauvres, & à rendre la juftice; il avoit fait conftruire plufieurs Mofquées, une entr'autres fur le Mont Arafat. C'eft une montagne fituée dans le voisinage de la Mecque. Les Mufulmans croyent qu'Adam & Eve après avoir été chaffés du Paradis terreftre, & avoir été séparés l'un de l'autre pendant cent vingt ans, fe retrouverent fur cette montagne, & c'eft pour cette raifon que le neuviéme jour du mois Dzoulhedgé ils y vont en pélerinage. Il fit conftruire un aquéduc qui conduifoit des eaux dans les baffins qui étoient dans la Mosquée, & fit environner de murailles la ville de Médine, expofée auparavant aux incurfions des Arabes. Il donnoit tous les jours aux pauvres qui étoient à la porte de fon palais cent piéces d'or, & même dans les grands befoins il vendoit fes habits pour les foulager. Il a fait bâtir un beau pont fur le Tigre dans la ville de Dgeziret ben omar. Les pierres étoient liées avec du

(a) Il y fut mis en 558, & mourut en 559.

fer, du plomb & de la chaux. On voyoit auffi dans Moussoul, Sandgiar & Nefibin plusieurs beaux bâtimens qui avoient été Apr. J. C élevés à fes dépens.

Noureddin
Cothbed-

L'an 1165.

Benelathir.

Noureddin cependant continuoit toujours avec fuccès la din. guerre contre les Chrétiens. Après avoir pris Harem, il mar- Aboulmacha (a) vers Paneas qui étoit fituée au pied du Mont Li- hafen. ban; c'eft le fiége de cette ville' qui obligea Amaury de lever celui de Pélufe; mais Amaury malgré toute fa diligence, ne put venir affez promptement, & Paneas qui avoit appartenu aux Francs depuis l'an 1148, tomba fous le pouvoir de Noureddin. Amaury ne s'occupa plus qu'à réparer les pertes des Francs. Il fe tranfporta au plûtôt à Antioche, où par fes foins & des fommes confidérables, il obtint de Noureddin la liberté du Prince Boemond. Les Francs furent étonnés de le revoir; ils fçavoient que Noureddin outre l'intérêt qu'il avoit de garder ces prifonniers, fe glorifioit encore d'en avoir un grand nombre dans fes fers. On prétend qu'il craignoit que l'Empereur de Conftantinople ne le lui redemandát, & qu'il ne fût obligé de le rendre fans rançon; d'autres, que comme ce Prince étoit jeune, il appréhendoit qu'on n'en mît un autre dans Antioche beaucoup plus. expérimenté dans la guerre, & capable de lui donner de l'occupation de ce côté.

Aboulfedha

En même-tems Schirkouh ne reftoit point oifif dans la L'an 1166. Syrie, Noureddin qui lui avoit confié le commandement d'une armée, l'envoya (6) fur les terres des Francs où il alla affiéger un château très-fortifié, fitué dans le territoire de Seid, c'eft ce que les Arabes appellent Mounaidhera (c). On prétend qu'elle fut prife par la trahifon des foldats, qui paf- Benelahir. ferent auffi-tôt chez les Turcs, pendant que le Gouverneur Guillaume fe retira à Seïd. Schirkouh s'empara encore d'une autre fortereffe, c'étoit une efpéce de caverne qui paffoit pour imprenable, elle étoit fituée au-delà du Jourdain fur les frontieres de l'Arabie. Les Chevaliers du Temple en avoient la garde. Amaury qui venoit au fecours fut fi irrité de ce qu'ils avoient livré la place, qu'il en fit pendre douze.

(a) L'an 560 de l'Hegire. (6) L'an 561 de l'Hegire.

(c) Nos Historiens le nomment Cavea de Tyrum.

de lyr.

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