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Touranschah promit de le secourir de toutes fes forces, alors il partit, & il tint parole dans la fuite.

de

Apr. J. C..

L'an 1169.

din.

Benelashir

L'établissement de Saladin dans l'Egypte allarma tous les Noureddin Francs; par cette conquête Noureddin fe trouvoit en état de Cothbedfaire partir des flottes de l'Egypte pour croifer fur toutes les Guillaume côtes de la Syrie où ils étoient établis; il pouvoit empêcher de Tyr. le paffage des Pélerins, & par-là détruire entiérement le Royaume de Jérufalem. A la vûe de tous ces malheurs qui les menaçoient, les Francs tinrent un grand confeil dans fequel il fut arrêté que le Patriarche de Jérusalem, l'Archevêque de Céfarée (a), l'Evêque d'Akka (6), pafferoient en Occident pour demander des fecours à Louis, Roi de France, à Henri Roi d'Angleterre, à Guillaume Roi de Sicile, & aux autres Souverains de l'Europe; mais une tempête qui s'éleva pendant la nuit endommagea fi confidérablement le vaiffeau, qu'elle l'obligea de rentrer dans le port. Fréderic Archevêque de Tyr, & Jean Evêque de Paneas, furent chargés alors de paffer en Europe; ce dernier mourut peu tems après à Paris, & l'autre ne fit qu'un voyage inutile. Pendant que ces Députés étoient dans l'Occident où ils Guillaume ne recevoient que des promeffes; l'Empereur de Conftan- de Tyretinople équippa une flotte confidérable qu'il envoya au se¬ cours des Francs. Elle étoit compofée de cent cinquante grands vaiffeaux, appellés Galées, qui étoient à deux rangs de rames, & portoient en avant un bec; de foixante autres vaiffeaux plus grands pour porter la cavalerie, & de dix ou douze autres encore plus confidérables, appellés Dromons; ceux-ci étoient chargés de toutes les provifions, des armes & des machines. Megalducas Maurefius, Général fort expéri menté dans la guerre, & Alexandre de Converfana conduifirent cette flotte (c) à Tyr & enfuite à Akka. Au mois d'Octobre toutes les troupes des Francs & des Grecs s'affemblerent à Afcalon, & fe mirent en marche vers l'Egypte. Elles fe rendirent à petites journées à Pharamia, ville prefque déferte, fituée proche la premiere embouchure du Nil appellée Carabes. Tout ce chemin étoit devenu plus long. (c) Au mois de Septembre

(4) Ernefius.
(6) Guillaume,

Apr. J. C.

depuis quelque-tems. Les flots de la mer, à force de battre L'an 1169. Continuellement contre les monceaux de fable qui s'étoient Noureddin accumulés fur le rivage, avoient ouvert un paffage, & après être entrés dans la plaine, ils avoient formé un vafte marais, dont l'embouchure étoit affez étroite. Il en étoit réfulté un

Cothbed

din.

avantage confidérable pour toutes les villes voifines, ce marais s'étoit rempli d'une quantité prodigieufe de poiffon de toute efpece que l'on y venoit pêcher de tous les environs; mais ceux qui vouloient aller de Syrie en Egypte, en suivant le bord de la mer, étoient obligés de faire un détour d'environ dix milles le long du marais, avant que de pouvoir regagner le rivage. Les Francs trouverent à Pharamia la flotte des Grecs qui étoit partie d'Akka. Elle fervit à faire passer les troupes de l'autre côté du Nil, laissant Taphnis à la gauche. De-là elles fe rendirent toutes à Damiete (a), & camperent entre la ville & la mer, en attendant que la flotte les eut rejoint de nouveau.

Sur le bord du fleuve il y avoit une tour très-fortifiée, d'où partoit une chaîne qui étoit attachée aux murs de la ville, & qui empêchoit que l'on ne pût pénétrer plus haut. Par ce moyen les habitans recevoient librement des fecours du Caire, & il leur arrivoit continuellement des troupes. Les Francs qui comptoient emporter cette ville d'emblée, fe virent dans la néceffité d'en former le fiége en régle, & de dreffer un grand nombre de machines; mais les affiégés leur en oppoferent d'autres, & la négligence & même la trahifon de quelques Francs étoient caufe que celles des affiégés avoient la fupériorité. La flotte manqua de vivres les Grecs étoient obligés de se disperser dans la forêt des Palmiers qui eft aux environs, & de manger les branches les plus tendres pour appaifer leur faim; les Francs craignoient en leur fourniffant des vivres de fe trouver dans la même fituation. Les pluyes qui tomboient en abondance augmentoient les maux de l'armée Chrétienne. Il fouffloit alors un vent du Midi qui augmentoit la rapidité du courant du Nil, où toute la flotte s'étoit raffemblée comme dans un lieu de

(a) Le fix des kalendes de Novembre, gire, dans le mois Sepher de l'an 565 de l'He

fûreté

Apr. J. C.

Cothbed

Guillaume

fûreté. Les habitans remplirent un brûlot de bois fecs & d'autres matieres graffes, le lâcherent fur le fleuve en le dirigeant l'an 1169. vers les vaiffeaux. Six de ceux qu'on appelle Galées furent Noureddin entiérement brûlés, & toute la flotte eût éprouvé le même din. fort fans le Roi Amaury qui vint au fecours. Les Francs Benclathir. refterent ainsi pendant cinquante jours devant Damiete. Voyant alors qu'il étoit impoffible de la prendre, ils fe préparerent à fe retirer, après avoir fait une efpece de trêve avec les habitans, par l'entremife de quelques Emirs Egyptions qui n'étoient pas portés pour Saladin.

de Tyr.

Bohaeddin.

Cet Emir s'étoit plaint à Noureddin de ce que plufieurs grands Seigneurs de l'Egypte s'étoient déclarés en faveur des Francs, & Noureddin pour conferver ce pays y avoit envoyé des troupes, en même tems que de fon côté il étoit entré dans la Syrie où il avoit fait beaucoup de ravages, qui ne contri- Benelathir. buerent pas peu à la levée du fiége de Damiete. L'expédition Aboulfedha de Noureddin avoit non-feulement pour but de faire une diverfion mais encore d'arrêter les courfes que quelques Francs faifoient dans fes Etats; ils venoient de lui enlever (a) la fortereffe d'Akkar, après avoir fait prifonnier Khathlagh L'an 11701 qui y commandoit pour Noureddin. De plus, comme ce Prince envoyoit alors Nodgemeddin ayoub, pere de Saladin dans l'Egypte avec quelques troupes, & qu'un grand nombre de Marchands Mufulmans s'étoient joints à cette armée, afin de faire leur voyage plus en fûreté, il crut devoir pour empêcher qu'ils ne fuffent infultés par les Francs, s'approcher du château de Krak ou Pierre du defert, & en former le fiége. Dans le tems qu'il étoit occupé à battre les murailles de cette place, il apprit que deux Généraux Francs nommés par les Arabes, l'un le fils de Unfroy & l'autre Carib, fils de Dakik, venoient fecourir Krak avec deux cens cavaliers & mille Turcoples; il marcha contre eux avant qu'ils fuffent en plus grand nombre; mais ceux-ci ne jugeant pas à propos de l'attendre, Noureddin fe répandit dans tout leur pays qu'il ravagea, & établit fon camp à Afchtara; un Emir nommé Schehab eddin Mahmoud (b) qui poffédoit le château de

(a) Dans le mois Rabi elakher de l'an Tom. II. Part. II

565.

(b) Fils d'Elias, fils d'Ilghazi, fils
d'Ortoc.
Dd

L'an 1170.

Benelathir.

de Tyr.

Bira, fe mit en marche avec deux cens cavaliers pour ve Apr. J. C. nir le joindre dans cet endroit. Lorsqu'il fut arrivé à Léboua, Noureddin dans le territoire de Baalbek, il monta à cheval pour aller à Cothbed- la chaffe ; mais il rencontra trois cens cavaliers Francs qui din. faifoient des courses dans les environs, il tomba fur eux & les Aboulfedha mit en déroute. Parmi les morts étoit le chef des HofpitaGuillaume liers qui étoit maître du château des Kurdes, & que les Bohaeddin. Francs eftimoient à cause de fon courage. Sa tête fut portée à Noureddin. Ce Prince étoit encore campé à Afchtara lorsqu'il fut informé que de grands tremblemens de terre venoient de détruire (a) la plûpart des villes de la Syrie. Au rapport des Hiftoriens on n'en avoit point encore fenti de fi violens, les villes les plus considérables furent renversées, & les habitans enfévelis fous les ruines; de ce nombre étoient Baalbek, Hemeffe, Hama, Schizour ou Céfarée, & Alep. Dabord Noureddin n'apprit que ce qui regardoit Baalbek il s'y rendit en diligence pour en faire réparer les fortifications; mais lorfqu'il fçut le fort des autres villes il laissa dans Baalbek des troupes, courut à Hemeffe & à Hama où il fit de même, & ensuite au château de Barin qui étoit dans le voifinage des Francs, & qui par cette raison l'inquiétoit d'avantage; toutes fes fortifications avoient été détruites, il y laiffa une garnison, & après avoir donné des ordres afin qu'on travaillât jour & nuit pour le réparer, il fe rendit à Alep qui avoit fouffert plus que toutes les autres villes. Il n'y avoit pas une maison dans laquelle on pût demeurer, & les habitans étoient campés hors de la ville: il fut préfent aux travaux & les accéléra, il craignoit toujours que les Francs ne profitaffent de ce défaftre pour entrer dans fes Etats; mais ceux-ci, qui avoient également fouffert du tremblement, loin de fonger à entreprendre quelque expédition, n'étoient occupés qu'à réparer leurs pertes. Toute la ville d'Antioche dont les murailles & les tours étoient d'une folidité à toute épreuve, étoit renversée. Celle de Tripoli (b) avoit perdu prefque tous fes habitans, Tyr avoit fouffert confidérablement. Noureddin étoit occupé à faire reconstruire,

Pendant que

(a) Le 12 de Schoual de l'an 565.

(b) Le trois des kalendes de Juillet.

fe

L'an 1170.

din.

hafen.

'Alep, fon frere Cothbeddin Maudoud Roi de Mouffoul, mourut (a) de la fiévre dont il avoit été attaqué. Il étoit âgé Apr. J. C. d'environ quarante ans, & avoit régné vingt-un & cinq mois. Noureddin Il fut regretté de tous fes fujets, il ne ceffoit de leur faire Cothbeddu bien, & quand on lui repréfentoit fa trop grande facilité Benelathir. à cet égard, il répondoit que perfonne n'y étoit plus obligé Bohaeddia. qu'un Roi. Il aimoit également les grands & les petits, par- Aboulfedha donnoit facilement, traitoit fes Officiers avec douceur, Aboulinaplaifoit à les enrichir, dans la crainte qu'ils ne le fiffent euxmêmes, prévenoit ceux qui avoient befoin de lui, les fecouroit promptement dans leurs befoins, & faifoit rendre la juftice à tout le monde. Il avoit toujours vécu en bonne intelligence avec fon frere, l'avoit fouvent fecouru d'hommes & d'argent, & avoit permis par amitié pour lui qu'on fît la priére publique en fon nom, dans fes Etats. Il l'avoit accompagné au fiége de Harem & de Paneas. Avant que de mourir il ordonna que fon fils aîné Emadeddin zenghi, qui avoit époufé la fille de Noureddin, lui fuccédât. Mais le premier Miniftre du Royaume, nommé Phakhreddin abdolmefih, qui.craignoit de perdre fon autorité fous un Prince trop attaché à Noureddin, fon ennemi déclaré, convint avec la Khatoun ou la Reine, fille d'Houfameddin Timourtafch, que le lendemain ils affembleroient tous les Emirs & feroient prêter ferment de fidélité pour fon fils Seifeddin.

Auffi-tôt que cela eût été exécuté, Emadeddin vint im- Seïfeddin plorer le fecours de Noureddin. Ce Prince irrité de cette conduite du Miniftre, partit fur le champ de Tell-bascher, passa l'Euphrate au château de Dgiaber, & alla à Racca qu'il prit (b) après une légere réfiftance de la part du Gouverneur. Il s'empara enfuite de Khabour & de Nefibin (c). Il attendit dans cette derniere ville le refte de fes troupes qui venoit le joindre, car il n'avoit pris avec lui qu'un camp volant, mais il avoit eu l'attention d'en laiffer une partie confidérable dans la Syrie, pour réfifter aux Francs. Noureddin (d) Mohammed, Roi du Diarbekr, le joignit en cet en

(a) Le 22 de Dzoulhedgé de l'an 565. (b) Au commencement de Mouharram de l'an 566.

(c) Sur la fin du même mois.
(d) Fils de Cara arflan.

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