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Apr. J. C.

L'an 1113.
Saifan.

nène.

Zonare.

Apolloniade, ils marchoient vers Cyzique dans le deffein de s'en emparer, & que les Emirs Contagmen & Mohammed

avoient fait un butin confidérable du côté de Poimanen. Anne Com- Il donna ordre à Camitzes de les poursuivre avec cinq cens hommes, de les harceler dans leur retraite; mais d'éviter le combat. Cet ordre fut bientôt oublié. Camitzes rencontra les Turcs en fortant de Nicée, les chargea & les mit en déroute. Ce qui avoit le plus contribué à cette victoire étoit que les Turcs s'étoient imaginés que l'Empereur étoit dans l'armée. Mais ils ne furent pas plutôt inftruits que ce détachement n'avoit pour chef que Camitzes, qu'ils fe rallierent, furprirent le Général Grec, taillerent en piece une partie de fon armée, & mirent le refte en fuite. Camitzes fe défendit en défefpéré, & ne fe rendit que quand il ne put réfifter davantage, & que l'Emir Mohammed lui eût promis qu'il ne lui feroit rien fait.

L'an 1-115

nène,

Cependant Alexis Comnène pénétroit de plus en plus dans Anne Com- l'Afie mineure; après avoir traverfé Nicée, il avoit paffé les Melangines & les gorges du mont Olympe, appellées Bafiliques. Il avoit deffein de venir furprendre l'avant-garde des Turcs qui étoit campée dans un lieu plein de rofeaux, où elle fe croyoit en sûreté. Il les y furprit en effet, en tua un bon nombre, mit le feu aux rofeaux où la plupart des autres s'étoient fauvés, ce qui les obligea de fortir pour être tués ou faits prifonniers. l'Emir Mohammed qui apprit cette déroute, vint à la hâte avec fes Turkomans, un autre Emir accourut en même tems du côté de l'armée. Alors l'Empereur fe trouva enveloppé, fes Généraux Ampelos & Tzipurules furent battus, & toute l'armée étoit détruite fans l'arriere-garde qui marcha propos & mit les Turcs en fuite.

Anne Com

nène.

& fuiv.

à

Le Sulthan eut recours aux Princes de l'Orient, il fit venir des troupes] d'Alep & du Khorafan pour oppofer aux Grecs. L'an 1116. D'un autre côté, Alexis Comnène fe difpofoit à aller attaquer Iconium, devenue depuis la prife de Nicée par les Grecs, capitale de l'Empire des Seljoucides. Mais la goutte dont il étoit incommodé ne lui permettant pas de fuivre fon projet, il laissa au Sulthan la liberté de fe répandre dans toute l'Asie mineure & de la ravager. Les Turcs infultoient à l'Empereur au sujet

de

Apr. J. C.

de fa maladie ; mais auffi-tôt que ce Prince fut guéri, il fortit de Conftantinople, fe rendit à Civitot & de-là à Lopade. Les 1 1116. Turcs, pour faire croire qu'ils étoient en plus grand nombre, Saisfan, allumerent beaucoup de feux, ce qui n'empêcha pas que l'Empereur ne les fuivît & ne les obligeât de prendre la fuite. Il vint camper à Poimanen, d'où il envoya des détachemens qui enleverent aux Turcs tout le butin qu'ils avoient fait. Alexis Comnène demeura pendant trois mois à Lopade, & Y fit venir l'Impératrice. Sa préfence n'empêcha pas que les Turcs ne vinffent faire des courses jufqu'aux environs de cette ville, & n'y jettaffent l'allarme; mais quelques Généraux qui s'étoient poftés fur les hauteurs des monts Germiens, les battirent dans leur retraite. Les Turcs revinrent & pénetrerent jufqu'à Nicée; l'Empereur fe retira à Nicomédie pour les engager plus avant dans le pays, fuivant le rapport d'Anne Com

nène.

Alexis Comnène qui n'avoit pas perdu de vûe le projet de prendre Iconium, raffembla toutes les armées, & fe mit en marche. Il vint dans les plaines de Dorylée, & de-là à Santabaris. Il envoya Camitzes vers Polybot & Cédrée où commandoit l'Emir Puchéas; Stypeota eut ordre d'aller vers Amorium. Puchéas n'attendit point les Grecs, il leur abandonna Cédrée, & leur laiffa prendre Polybot. L'Empereur battoit de fon côté tous les partis qu'il rencontroit dans fa route. Il s'empara de Philomele, d'où il envoya plufieurs détachemens pour ravager les environs d'Iconium; c'eft où fe termina toute cette expédition, & l'Empereur reprit le chemin de Conftantinople. L'Emir Monolyc le furprit dans une plaine voisine de Polybot, on fe battit pendant un jour, mais les Turcs furent obligés de céder. Le lendemain le Sulthan & l'Emir revinrent à la charge, ils tomberent fur l'arriere-garde des Grecs, Nicéphore de Brienne les arrêta par fon courage, & les obligea de fe fauver dans les montagnes où trois Scythes fuivirent de fi près le Sulthan, que fon Echanfon qui l'accompagnoit fut arrêté. Echappé de ce danger, un transfuge Scythe le vint trouver, & lui confeilla de venir attaquer les Grecs pendant la nuit, fans autres armes que les fleches, parce qu'étant renfermés dans un endroit affez étroit, il fuffifoit de lancer sur Tom. II. Part. II,

E

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L'an 1116.
Saifan.

eux beaucoup de fleches pour en faire périr un grand nombre. Le Sulthan qui écouta trop légérement ce confeil, trouva plus de résistance qu'il ne penfoit, & fut obligé de fe retirer avec perte. Il revint une feconde fois à la charge fans aucun fuccès, ce qui lui fit prendre la réfolution de demander la paix à l'Empereur. Il fuivit de près les Ambaffadeurs qu'il avoit envoyés à cet effet. Il vint en perfonne trouver l'Empereur qui étoit campé dans une plaine entre Auguftopolis & Acronium. Tous les Emirs qui l'accompagnoient, & parmi lefquels Monolyc étoit diftingué par fon âge, fon courage & fon expérience, mirent pied à terre à la vûe de l'Empereur. Alexis Comnène préfenta fa main au Sulthan, & le fit enfuite monter fur un très-beau cheval ; il promit de grandes richeffes aux Turcs s'ils vouloient garder la paix avec l'Empire, & ils parurent le Anne Com- défirer. On les fit alors paffer fous les tentes qui leur avoient été préparées; le lendemain le Sulthan Saifan rendit une vifite à l'Empereur & le traité fut figné.

nene. Zonare.

Elycas.

Le Sulthan étoit encore auprès de l'Empereur lorfqu'on apprit qu'il s'étoit formé une conjuration dans fa Cour, dont le chef étoit fon frere Mafoud (a), qui étoit fecondé d'un grand nombre d'Emirs. Mafoud vouloit faire périr Saifan, pour monter enfuite fur le trône. Alexis Comnène en donna avis au Sulthan, & lui confeilla de demeurer auprès de lui jufqu'à ce que les conjurés euffent été arrêtés. Saifan par une imprudence qu'on ne fçauroit pardonner, réfolut de s'en retourner, & n'accepta pas même les gardes que l'Empereur vouloit lui donner. Il fe contenta d'envoyer quelques coureurs afin d'être informé de ce qui fe paffoit. Les coureurs rencontrerent Masoud à la tête de fon armée, lui prêterent ferment de fidélité, & revinrent auffi-tôt affurer Saifan qu'ils n'avoient rien découvert. Le malheureux Sulthan continua fa marche, & fe trouva auffi-tôt invefti par fes ennemis. On en vint aux mains; Ghazi fils de l'Emir Afan Cathus qu'il avoit fait mourir autrefois, lui porta un coup de lance qu'il eut l'adreffe de parer; il échappa de ce premier péril,mais ne pouvant tenir plus long-tems, il voulut fe fauver vers l'Empereur Alexis; partout il ne trouvoit que des traîtres, l'Emir Puchéas (4) C'est celui que Nicet choniate appelle Mafut

lui confeilla de fe retiter à Tyganium, petite ville près de Philomele. Saifan s'y rendit & fut reçu par la garnifon. Auffi- L'an 1116, Apr. J. C. tôt l'armée de Mafoud inveftit la place. Le Sulthan parut Saifan, fur les murailles, reprocha à fon frere fa perfidie & le menaça de l'arrivée des troupes Grecques. L'Emir Puchéas excitoit fecretement les habitans de la ville à fe rendre, leur faifoit entendre qu'il arrivoit de nouvelles troupes de Perfe, & que s'ils réfiftoient plus long-tems ils s'expofoient à être paflés au fil de l'épée. Les peuples ouvrirent leurs Les peuples ouvrirent leurs portes, Saifan fut arrêté, on lui paffa un fer chaud devant les yeux pour le priver de la vûe, & on le conduifit enfuite à Iconium. Saifan avoua à sa nourrice que fa vûe n'étoit pas entierement éteinte, & qu'il pouvoit encore diftinguer les objets. La Sulthane fa femme en fut inftruite. Par elle ce fecret fe répandit infenfiblement de bouche en bouche, & parvint jufqu'au Sulthan Mafoud (a) qui pour se déliver de toute inquiétude fit mou

rir fon frere.

L'Empire de Conftantinople venoit de paffer en même Mafoud 1. tems, par la mort d'Alexis Comnène, entre les mains de Jean L'an 1120 Comnène fon fils. Ce Prince n'eut pas plûtot arrangé les af- Cinnamus. faires dans cette capitale, qu'il réfolut de paffer en Afie, & Nicet chon. de reprendre Laodicée ville de Phrygie, fituée vers l'embou chure de la riviere de Lapras dans le Meandre, que les Turcs avoient prife. Il commenca par le fiége de Philadelphie, où commandoit l'Emir Picharas (b). Cette ville fe rendit, & l'Empereur revint faire de nouvelles provifions à Conftantiple, d'où il repartit pour aller faire le fiége de Sozopolis, ville de la Pamphylie, fituée dans un endroit inacceffible, que de rochers efcarpés environnoient de tous côtés; un petit fentier fort étroit où l'on ne pouvoit paffer qu'un à un, étoit le feul chemin qui y conduifoit. Jean Comnène qui n'o foit s'engager dans ce défilé, eut affez d'adreffe pour attirer la garnifon Turque dans la plaine, il s'empara du défilé, & la place fe rendit. De-là il alla prendre le château Hieracoryphite ou de l'Eprevier & quelques autres places dans le voisinage d'Attalie, & s'en retourna à Conftantinople.

(a) D'Herbelot a omis ce Prince.
(6) Nicet choniate le nomme Alpi-

charas. Je crois qu'il eft le même que
le Pucléas d'Anne Comnène.

Apr. J. C.

Les Turcs cependant continuoient à faire de grands ravaL'an 1126. ges fur les terres foumifes à l'Empire Grec. Jean Comnène Mafoud I. fut obligé de venir faire le fiége de Caftamon dans la PaCinnamus. phlagonie. Cette ville leur fervoit de retraite. A la vûe des troupes Impériales les Turcs fe rendirent. Mais l'Empereur ne fut pas plutot rentré dans Conftantinople, que le fils de Danifchmend qui regnoit dans la Cappadoce la reprit.

Nicet chon.

de Tyr.

Sanute

Les Historiens Orientaux, comme je l'ai remarqué, nous fournissent peu de détails fur l'Hiftoire des Seljoucides d'Iconium, & laiffent de grands intervalles de tems fans faire aucune mention de ces Princes. Les Hiftoriens de la Byzantine & ceux des Croisades n'en parlent que relativement aux affaires des Chrétiens; nous ignorons par conféquent l'hiftoire L'an 1131. du Sulthan Mafoud jufqu'au tems qu'il alla faire le fiége de Guillaume Creffum (a), fortereffe qui appartenoit à Jofcelin Comte d'Edeffe. Ce Comte qui s'étoit trouvé peu de tems auparavant enfe veli fous les ruines d'une tour au fiége d'Alep, & qui depuis cet accident étoit très-dangereufement malade, ne pouvoit aller au fecours de ses Etats. 11 chargea fon fils Jofcelin le jeune, de cette expédition; celui-ci n'ofa attaquer le Sulthan, & le pere fe vit dans la néceffité de fe faire porter dans une littiere: Mafoud qui connoiffoit la bravoure du Comte leva auffi-tôt le fiége, & fe retira; le fils de Danischmend fut plus heureux que le Sulthan dans une expédition qu'il entreprit Aboulfedha Contre les Chrétiens de Syrie, il les battit (b), & leur tua beaucoup de monde. Il mourut quelque tems après, & fon fils Mohammed lui fuccéda.

L'an 1133.

L'an 1136 Le nouveau Roi de Cappadoce eut dès le commencement Cinnamus. de fon regne des démêlés avec le Sulthan Mafoud. L'Empereur Jean Comnène qui ne tendoit qu'à faire des conquê tes à la faveur des divifions des Turcs, fit la paix avec le Sulthan qui lui envoya des troupes pour faire la guerre à Mohammed, & vint faire le fiége de Gangra. Mohammed qui ne pouvoit résister aux forces réunies des deux Princes, employa toute forte de moyens pour détacher le Sulthan & il y réuffit. Mafoud donna fecretement des ordres à fes troupes de

(a) Sanute le nomme Croisson.

(6) L'an 528 de l'Hegire.

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