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fait, il conjura le Pape d'employer 1517. le fer & le feu contre Luther. Sylveftre de Prière, autre Dominicain, Maître du facré Palais, affura bien que le Pape étoit infaillible & fupérieur aux Conciles, que les Indulgences étoient ce qu'il y avoit de plus faint dans la Religion, qu'on ne pouvoit en vendre trop ni les vendre trop cher, pourvû que les Dominicains fuffent toujours chargés de ce commerce facré.

Le feu qui alloit embrafer l'Europe, pouvoit s'éteindre de lui-même, fi d'un côté l'Electeur de Mayence, de l'autre l'Electeur de Saxe euffent défendu ces affiches ridicules & euffent fait contenir les Moines par leurs Supérieurs; mais les Princes ne favoient alors rien ordonner à des Moines, & fur-tout ils ne fa

Ou bien au lieu des deux derniers vers, les deux fuivans :

Ipfe quoque excedens vitâ, indignatus ab illâ, Maftus ob hoc, quòd non plus nocuiflet, erat. Les torts de certains ennemis de Luther, ne conaribuérent pas peu à fes fuccès.

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voient pas leur ordonner de vivre en paix.

Un parti peut-être encore meilleur auroit été de laiffer difputer tous ces Docteurs, fans faire attention à leurs querelles. Les Ecoles Auguftinienne & Dominicaine d'Allemagne se seroient partagées fur les indulgences; leurs très-célèbres Profeffeurs, ignorés par-tout,auroient foutenu de très-favantes Thèses, dont perfonne n'auroit entendu parler hors de leurs Ecoles, & tout auroit été tranquille. Mais fi ces Moines avoient la maladie de difputer, les peuples avoient celle de les écouter, & les Princes celle de les protéger.

Léon X. croyant terminer ces querelles en les jugeant, cita Luther à Rome, & commença ce procès par une affez grande irrégularité, il lui nomma deux Juges, & l'un des deux étoit ce même Sylveftre de Priére qui avoit écrit contre Luther, & qui l'avoit déclaré hérétique. Mais Luther n'étoit déja plus un homme qu'on pût opprimer impunément ;

1517.

I.

1518.

l'Electeur de Saxe le couvroit d'une protection respectée dans tout l'Em

Sleidan, L. pire, & impofante pour Rome mê

me. Sur fa recommandation & fur celle de l'Univerfité de Vittemberg, le Pape délégua un Juge en Allemagne, ce Juge fut le Cardinal Cajetan (Thomas de Vio) Légat à Aufbourg. C'étoit, difoit-on, un homme de beaucoup de mérite, & le P. Maimbourg l'appelle un grand homme. Mais il y avoit encore là un refte d'irrégularité; ce Cardinal avoit été Jacobin, & Luther prétendit depuis l'avoir trouvé très Jacobin dans les fentimens & très-Cardinal dans les manières.

Luther, forcé par fon Protecteur même de comparoître devant ce JuAfta Luth. ge, vint à Ausbourg sans autre fûreap. Caieta- té que des Lettres de recommanda

num.

tion de l'Electeur, mais quelques jours après il prit un fauf-conduit de P'Empereur Maximilien; un pareil fauf conduit de l'Empereur Sigifmond n'avoit pas fauvé Jean Hus du bucher, mais cette infidélité bar

bare avoit eu des fuites funeftes, &

ne valoit rien à répéter. Luther donc 1518. comparut, difputa, protefta, afficha de nuit fon appel (car il affichoit volontiers) & s'enfuit fecrettement à Vittemberg, feignant de craindre ou craignant réellement qu'on ne l'arrêtât. En effet, il paroît certain que les inftructions du Légat étoient de l'obliger à fe rétracter ou de le faire arrêter (1).

(1) Erafme, Sadolet, Sponde & Florimond de Remond lui-même ont trouvé un peu trop de précipitation & de hauteur dans la conduite de Léon X. & du Cardinal Cajetan à l'égard de Luther. Th. Hayne (vie de Luther) & Durand, (Hift. du feiziéme fiècle) Auteurs Proteftans, rapportent une converfation entre Luther & un Sécrétaire du Légat, où tout l'avantage eft du côté du premier. Le Sécrétaire venoit prefer Luther de fe rendre chez le Légat, Luther n'avoit point encore de fauf conduit.

LUTHER.

Je n'irai point, que je n'aye obtenu un fauf » conduit de l'Empereur.

LE SECRETAIRE.

» Un fauf-conduit ! Eh! qu'en voulez-vous » faire? Quand vous l'auriez obtenu, & qu'on n'y auroit eu aucun égard, penfez-vous donc que le » Prince Frédéric voulût prendre les armes pour » l'amour de vous?

LUTHER
J'en fero is bien fâché.

I.

Sleidan. L.

4518.

La fuite de Luther paroiffant dépofer contre lui, le Légat écrivit à Î'Electeur de Saxe pour le prier d'abandonner un hérétique que les foudres de l'Eglife alloient frapper ; mais l'Electeur prévenu par Georges Spalatin, fon Secrétaire, & par le Vicaire-Général Stupitz, crut fans peine que le Légat, ou avoit craint prudemment, ou avoit dédaigné infolemment de fe commettre avec un homme tel que Luther; il répondit u'il ne priveroit point fon Univerfité d'un pareil ornement.

L'Empereur Maximilien mourut, & l'Electeur de Saxe, l'un des deux Vicaires de l'Empire pendant l'in

LE SE' CRE' TAIRE.

» Et où vous cacheriez-vous donc, fi l'on vouloit vous arrêter ?

LUTHER.

» Je me cacherois fous la voute des Cieux.

LE SE' CRE' TAIRE.

» Et vous, fi vous aviez le Pape & tous les » Cardinaux en votre puiflance, qu'en feriez-vous? LUTHER furiant.

» Je tâcherois de leur rendre toute forte d'hon»neurs & de refpe&ts. Hayne, p. 19. Durand Lua 5. 11. 289

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