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dérable, nommé Albon, Orfévre, & maître de la monnoye de Limoges, dont il apprit l'art en peu de tems. Ayant eu quelque occafion de venir en France, c'est-à-dire, au-deça de la Loire, il fut connu de Bobbon tréforier du roi Clotaire II. & fe mit fous fa conduite. Le roi voulant faire faire un fiége magnifique, orné d'or & de pierreries ne trouvoit point d'ouvrier dans fon palais qui pût éxécuter fa pensée. Le tréforier lui indiqua Eloy, que le roi accepta avec joie, & remit au tréforier une grande quantité d'or pour l'exécution de fon deffein. Eloy travailla diligemment, & apporta au roi la chaife qu'il lui avoit donnée à orner, dont le roi fut très-content; & ayant loué hautement l'élegance de l'ouvrage, il ordonna que l'ouvrier fut dignement recompenfé. Alors Eloy découvrit une feconde chaife, toute femblable à la premiere, & dit qu'il l'avoit faite de l'or qui étoit resté. Le roi admira fa fidélité & fon induftrie; & par fes réponses, lui trouvant beaucoup d'efprit, lui donna grande part à sa confiance. Depuis il fut lui même monetaire & l'on voit encore fon nom en plufieurs monnoies d'or frappées à Paris fous Dagobert & fon fils Clovis.

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Eloy étant venu en âge mûr, & voulant mettre fa confcience en repos, confeffa devant un prêtre tout ce qu'il avoit fait depuis fa jeuneffe, & s'impofa une févere pénitence. C'est le premier exemple que je fçache de confeffion générale. Après la mort de Clotaire, il fut en fi grand crédit auprès du roi Dagobert, qu'il attira l'envie des méchans auxquel il s'oppofoit. Cependant il continuoit toû

Le Blanc. hift. mon. p. 50. 54.

Vita c. 7.

c. 9.

c. 10.

$994.

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B. II.

f. 8.

jours à travailler de fon art, à divers ouvrages d'or A. Ben: tr. 2. & de pierreries, pour le roi. Il avoit près de lui un esclave Saxon, nommé Tillon, qu'il forma dans la vertu; en forte qu'il devint un grand perfonnage, connu fous le nom de S. Theau, & honoré le fept de Janvier. En travaillant, S. Eloi avoit devant les yeux un livre ouvert, pour s'inftruire en même tems dans la loi de Dieu. Autour de fa chambre étoient quantité de livres fur des planches, principalement la fainte écriture, qu'il lifoit après la pfalmodie & l'oraifon, & plufieurs de fes domeftiques chantoient avec lui l'office canonial le jour & la nuit. On nomme entre autres Bauderic fon affranchi, Tituen fon valet de chambre, de la nation des Sueves, qui fut martyr; Buchin, qui avoit été payen & devint abbé de Ferrieres; André, Martin, & Jean, qui par fes foins devinrent clercs. Au haut de fa chambre étoient suspendues plusieurs reliques des Saints, fous lefquelles il fe profternoit fur un cilice pour prier, & paffoit quelquefois ainfi toute la nuit. Après l'oraifon, il chantoit des pleaumes pour se foulager; puis il prenoit la lecture, qu'il interrompoit fouvent en levant les yeux au ciel, en foupirant, & en pleurant abondamment: car il avoit un grand don de larmes. Quoique le roi le mandât, & lui envoyât message sur meffage, il n'alloit point qu'il n'eût achevé ses exercices de pieté. Il ne fortoit jamais de chez lui, fans prier & faire le figne de la croix; & en rentrant, il commençoit toûjours par la priere. Il étoit de grande taille, avoit la tête belle, les cheveux frisés, le teint rouge: la fimplicité & la

6. 12.

ayant

des

prudence éclatoient dans fes regards. Du commen-
cement il portoit des habits magnifiques, & quel-
quefois tout de foye, quoiqu'encore rare
chemises brodées d'or, des ceintures & des bourses
garnies d'or & de pierreries. Mais
fait ur
plus grand progrès dans la vertu, il donna tous
ces ornemens aux pauvres, & s'habilloit si négli-
gemment, qu'on le voyoit fouvent ceint d'une
corde. Le roi le voyant ainfi, lui donnoit quel-
quefois fon habit & fa ceinture. Les aumônes
d'Eloi étoient immenfes, il donnoit aux pauvres
tout ce qu'il recevoit des bienfaits du roi. Ši quel-
que étranger demandoit fon logis, on lui difoit:
Allez à une telle rue, à l'endroit où vous trouverez
quantité de pauvres affemblés. Ils le fuivoient toû-
jours en foule, & il leur donnoit ou de fa main,
ou par un domeftique, de la nourriture & de
l'argent. Tous les jours il en nourriffoit chez lui
un grand nombre, qu'il fervoit de ses propres
mains, & mangeoit leurs reftes. Il leur donnoit
du vin & de la chair, quoiqu'il n'en usât point lui-
même; & il jeûnoit quelquefois deux ou trois
jours de fuite. Quelquefois l'heure étant venue,
la table mife, il n'avoit rien à donner à fes pau-
vres, ayant tout distribué auparavant; mais il se
confioit en la providence, qui jamais ne lui man-
qua, par la liberalité du roi, ou d'autres perfonnes
pieufes. Il prenoit foin de faire enterrer les corps
des fuppliciés.

&

Il avoit une dévotion particuliere à racheter les captifs. Quand il fçavoit que l'on alloit vendre quelque part un esclave, il y couroit; & il en ra

C. IN

C. 3T.

C. TO.

A. Ben. to. 2. P. 1991.

chetoit des cinquante & cent à la fois, principalement des Saxons, que l'on vendoit à grandes troupes. Il les mettoit en liberté, puis il leur donnoit le choix de retourner chez eux, de demeurer avec lui, ou d'entrer dans des monafteres, & pre6. 15.61. noit un grand foin de ces derniers. Il fonda deux monasteres célébres, un près de Limoges, l'autre à Paris. Le premier eft celui de Solignac, où il mit des moines tirés de Luxeu, fous la conduite de faint Remacle, depuis évêque de Mattrick. L'abbé de Luxeu avoit infpection fur ce monaftere, pour y conserver la régle, & S. Eloy obtint du roi la terre où il étoit bâti, comme il paroît par l'acte de ceffion, daté de la dixième année de Dagobert, qui eft l'an 631. Cette communauté s'accrut bien-tôt jufques au nombre de cent cinquante moines de divers pays, qui exerçoient plufieurs métiers, & vivoient dans une grande régularité. Saint Eloy y donnoit tout ce qu'il pouvoit, & s'y vouloit retirer lui-même; mais la providence le deftinoit ailleurs. Après avoir bien établi ce monastere, il en fonda un de filles à Paris, dans la maifon que le roi luiavoit donnée, où il établit une discipline très-exacte, y assembla jusques à trois cens filles, tant de fes efclaves, que de la nobleffe de France: & leur donna pour abbesse sainte Aure. Cette abbaye a fubfifté long-tems fous le nom de S. Eloy, mais enfin le revenu a été uni à la manfe épiscopale de Paris, & la maifon donnée aux prêtres nommez Barnabites. S. Eloy fit hors la ville un cimetiere pour les religieuses, avec une église dédiée à S. Paul qui eft devenue une grande pa

Vita. c. 17,

c. 18.

C. 32.

roiffe. Il employa fon art pour orner d'or & de pierreries les châffes de plufieurs Saints; de S. Germain de Paris, de S. Severin, de S. Piat, de S. Quentin, de S. Lucien, fainte Genevieve, fainte Colombe, & plufieurs autres: mais il orna particulierement les tombeaux de S. Martin de Tours, & de S. Denys de Paris. Le roi Dagobert en fit la dépense; & de plus en l'honneur de S. Martin, & à la priere de S. Eloi, il donna à l'église de Tours tous les revenus publics de cette ville, & accorda à l'évêque le droit d'y établir le comte par fes

lettres.

S. Eloy fit auffi plufieurs miracles. Etant à faint Denys la nuit de la fête, il guérit par fes prieres un homme qui avoit tous les membres retirez; mais il attribuoit ce miracle au faint martyr. Dans l'église de S. Germain à Paris, il guérit un boiteux qui ne marchoit point depuis neuf ans : un autre à a Gamaches; & fur le pont de Paris un de Paris un aveugle, qui lui demanda au lieu d'aumône, de faire le figne de la croix fur fes yeux.

C. 238

c. 26.

c. 29.

XXXIX.
Monafteres de

Brie.

Sup. n. 7. Fonas, Aud. Vita. Elig.

Vita Col. c. so.

c. 8.

Le meilleur ami de S. Eloy, étoit S. Oüen ou Audoën, autrement nommé Dadon, fils d'Autaire ou Aldecaire, feigneur François, qui reçut chez lui S. Colomban, comme il a été dit. Il avoit un autre fils nommé Adon; & les mit tous deux dès leur jeuneffe à la cour du roi Clotaire où Dadon ayant fait amitié avec S. Eloy, conçut à fon exemple un grand mépris pour le monde, & prit la réfolution avec fon frere de fe donner à Dieu. Adon Vita fanữ. Agil. l'executa quelque tems après, & fonda dans les to. 2. Alt. Ben. forêts de la Brie le monaftere de Jouare, nommé

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P. 321.

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