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gement de toutes chofes. Or on ne fauroit parler en cette maniere, fans instruire ceux à qui on parle, & fouvent cette inftruction eft plus efficace qu'aucune autre. Ainfi qui auroit toûjours dans la bouche des paroles de verité, auroit toûjours des paroles d'inftruction. C'est la priere feras de que faifoit le Prophete Roi, lorfqu'il di- ore meo foit à Dieu; Ne m'ôtez jamais de la bouche verbum la parole de la verité.

Ne au

veritatis

Deo, co

2. Cor. 2

Ainfi l'entretien commun & ordinaire ufquequaque. P des Chrétiens devroit être une leçon con- 118. 43. tinuelle de toutes les vertus, parce qu'ils ne devroient parler, à l'imitation de faint Ex finPaul, que de la part de Dieu, devant Dieu, ceritate & dans l'efprit de Jesus-Chrift. Il n'y a rien ficut ex qui n'entre dans l'entretien & dans la con- rain Deo, verfation des hommes; on y parle fans in Chrifto ceffe des objets qu'il faut ou aimer ou loquimur. haïr; & ainfi la converfation & l'entretien des hommes comprend tout, puifqu'il n'y a rien qui ne foit un fujet ou de haine, ou d'amour. Il n'y a donc pour inftruire les autres, qu'à parler de toutes chofés dans la verité, & felon la verité. Ce qui fe fait non-feulement en ne propofant que des fentimens veritables; mais auffi en ne faifant paroître que des inclinations telles qu'on les doit avoir.

D. Cette maniere d'inftruire eft-elle fort importante?

R. Elle eft d'une importance extrême. 1. Parce qu'étant conforme à la verité, qui eft Dieu lui-même, elle eft felon fon efprit & felon fa volonté ; car Dieu ne peut vouloir que ce qui eft vrai, comme nous avons dit ci-devant.

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2. Parce que cette maniere d'instruire eft la plus continuelle. Un Predicateur ne prêche qu'à certains jours, & à certaines heures; un vrai Chrétien inftruit en cette maniere en tout tems, en tous lieux, & en toutes occafions.

3. Cette maniere d'inftruire eft la plus efficace, parce que la plupart des maximes fur lefquelles chacun fe conduit dans la vie, fe tirent beaucoup plus du commerce ordinaire, & de ce qui fe pratique dans le monde, que des inftructions formelles des Pasteurs.

D. D'où vient donc que l'entretien des Chrétiens eft fi peu édifiant?

R. C'eft que la plupart des Chrétiens, ne font Chrétiens que de nom. Ils n'ont la verité, ni dans le cœur ni dans l'efprit: ainfi ils ne la peuvent faire paffer dans Bonus leurs paroles. Ils n'ont point ce bon tréhomo de for, dont Jefus-Chrift parle, en difant bono the Que l'homme de bien tire de bonnes chofes du fauro fuo bon tréfor de fon cœur; & comme ils n'ont profert bona. au-contraire qu'un tréfor de fauffes maxiMatth. 12. mes à l'égard des biens, des maux, & des 35. devoirs de la vie,ils n'en peuvent tirer que Os fa- ce qui y eft. Et c'est ce qui a fait dire au Sa

tuorum

ebullit ftultitiam.

ge, Que la bouche des fous fe répand en folies. D. Comment peut-on rendre fon enProv. 15.2. tretien utile à l'inftruction des autres?

R. En fe rempliffant le cœur & l'efprit des veritez Evangeliques; en les méditant jour & nuit; en s'accoutumant à ne fe plaire que dans la verité; en banniffant de fon efprit toutes ces vaines pensées, qui font condamnées par ces paroles du

inutile.

Prophete: Malheur à ceux qui s'entretien- Væ qui nent de penfées inutiles. Enfin en defirant cogitatis au prochain ce que nous defirons pour Mich... nous-mêmes. Car comme la verité & la lumiere fpirituelle nous feront découvrir une infinité d'erreurs dans ceux avec qui on parlera, la charité pour eux nous fera defirer de les en délivrer, & la prudence chrétienne nous en fera trouver les remedes.

D. Ceux qui font obligez de reconnoître que bien loin d'avoir édifié les autres par leurs difcours, ils n'ont fait au-contraire que leur nuire, ne doivent-ils pas avoir un grand fujet de fcrupule?

R. On n'en peut pas douter, fi on confidere combien la charité a été bleffée, tant par l'omiffion du bien que l'on pouvoit procurer au prochain, que par le mal qu'on lui a caufé; & pour ne parler ici que de la feule omiffion, peut-on douter que l'omiffion de cette charité fpirituelle, ne foit un très-grand mal, puifqu'elle eft d'une bien plus grande confequence que l'omiffion des charitez temporelles,& que l'omiffion des charitez corporelles eft fi feverement condamnée dans l'Ecriture.

D. Mais il faut donc que tous les Chrétiens deviennent Predicateurs, & fe rendent onereux les uns aux autres par des inftructions continuelles?

R. C'eft pouffer les chofes à une autre extremité, & c'eft abufer de ce que l'on a dit ici, que d'en tirer cette confequence. Il y a diverfes manieres d'inftruire, & il les faut toutes proportionner à l'efprit de

:

ceux à qui on parle, en s'abstenant de celles qui peuvent avoir de mauvais effets, & qui font onereufes & chagrinantes dans la converfation. On ne parle point non plus d'une inftruction qui fe faffe avec autorité mais on parle des difcours qui édifient. Or il elt certain que fans que l'on prenne l'air & le ton de Predicateur, on peut dire par differens tours une infinité de bonnes chofes. Et fi on ne le fait pás c'eft qu'on ne s'y applique point, c'est qu'on ne fonge point au bien du prochain, ni au fien propre;c'eft que l'on parle au hazard comme l'on vit au hazard, au-lieu qu'il faudroit toûjours en toutes fortes de converfations avoir pour but de tâcher d'être utile aux autres par fes difcours, ou de profiter des difcours des autres.

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D. Quelles regles doit-on fuivre pour s'acquitter comme il faut de ce devoir?

R. Cette matiere a été traitée affez au long dans les Inftructions précédentes, où en parlant de l'amour de Dieu comme Verité, on a rapporté quels font les motifs dont on doit fe fervir pour s'exciter à l'amour de la verité, & de quelle forte Voyez ci- il faut faire regner la verité fur notre vodevant to-lonté, fur nos actions & fur nos paroles. me I. pag. On a traité des pechez oppofez à l'amour

118.

fuiv.

de la verité; tels que font le menfonge, l'hypocrifie, & la haine de la verité; enfin, on y a parlé des effets que l'amour de la verité doit avoir à l'égard du prochain, & des pechez qu'on peut commettre contre ce qu'on doit à la verité. Ce qu'il eft inutile par confequent de repeter ici.

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De la correction fraternelle, 5 de ce qu'on doit y obferver.

DE

St-ce un devoir fort important que celui de la correction fraternelle ? R. L'autorité de l'Evangile & la raison nous le perfuadent également. JefusChrift nous le prefcrit expreffément dans Si perl'Evangile par ces paroles: Si votre frere caverit in peche contre vous, allez lui montrer fa faute te frater en particulier entre vous && lui, & s'il vous tuus, écoute, vous aurez gagné votre frere.

va

de, & cor

audierit

Matth. 18.

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ripe eum L'Apôtre S. Jaques en marquant com- inter te & ment Dieu récompenfe cette charité, en ipfum fait connoître la neceffité. Si l'un d'entre lum: fi te vous, dit-il, s'égare de la verité, & que lucratus quelqu'un l'y faffe rentrer, qu'il fache que ce- eris fralui qui convertira un pecheur, & le retirera trem tuu. de jon égarement, fauvera une ame de la mort, & couvrira la multitude de fes pechez. Si quis Puifque ce paffage de l'Apôtre S. Jaques ex vobis -s'entend formellement, & des pechez de veritate, celui qui eft converti, & de ceux de celui & converqui contribue à la converfion, il prouve terit quis abfolument la neceffité de la correction cum: Scire debet, fraternelle; & il eft certain qu'on ne peut quoniam negliger fans un grand peché, de fauver qui conl'ame de fon prochain, & de couvrir la verti multitude de fes propres pechez.

erraverit à

fe

cerit pec.

catorem

ab errore viæ fuæ, falvabit animam ejus à morte, & operict multitudinem peccatorum. Fac, s, 19. &. 20.

D. Si c'eft un peché que de ne pas reprendre ceux qui commettent des fautes, ne s'enfuit-il pas que l'on commet tous

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