fon lui découvrant les befoins de plufieurs de fes compagnons d'Eglife, il prit fur l'argent qu'on lui donnoit pour fes menus plaisirs, de quoi les aider dans leurs études, & le fit avec fi peu de ménagement, que M. de Louvois en fut informé. Le Miniftre touché de l'inclination bienfaisante de fon fils, voulut qu'il pût la fatisfaire d'une maniére plus convenable; il lui affigna un fond pour l'entretien de quinze de ces jeunes gens au Collège de Rheims. Mais comme en faifant ces fortes d'établissements, on ne fuppute gué res qu'un certain néceffaire qui se préfente d'abord; les douceurs d'un petit fuperflu intimement liées au néceffaire, roulérent toujours en fecret fur le compte du jeune Pro tecteur. Il n'étoit encore que dans fa pre K que miére année de Philosophie, âgé feulement de feize ans, & fans nul engagement dans les Ordres, quand M. de Louvois fon pere mourut. Loin d'être tenté de rentrer dans le monde, où de nouvelles espérances pouvoient l'appeller, il ne fut plus conftant à fuivre fes études & le plan de vie qu'il s'étoit propofé. La petite Communauté des Quinze, qui retourna pour lors entiérement à sa charge, fut augmentée jufqu'à trente, & transférée à Reims, où elle forma une espéce de Séminaire, qui a donné au Diocèse une infinité de Curés fçavans & vertueux. On en conçut dès le commencement une telle idée, que M. l'Abbé de Louvois, tout jeune encore, fut élû à Paris Supérieur d'une Communauté semblable, qu'on appelle le Séminaire des Trente trois, & à qui on fçait qu'il faifoit auffi beaucoup de bien, quelque foin qu'il prît d'en dérober la connoiffance : car c'étoit sa maniére, il obfervoit le fecret des bonnes œuvres, aux dépens même de l'édification qui pouvoit y être attachée. La douceur, la politeffe & l'affabilité qu'il avoit fçû joindre à l'érudition & aux autres talents de l'ef prit, le firent dans la fuite fouhaiter ardemment par plufieurs Eglises; celle de Reims en particulier, qu'il avoit utilement fervie, l'auroit poftulé après la mort de fon oncle, si elle avoit ofé tenter cette voie avant que l'heure des places fût venue pour lui. Elle vint enfin cette heure toujours attendue du Public, mais échapée aux défirs, ou plutôt bannie de puis longtems des vûes particuliéres de M. l'Abbé de Louvois, qui s'étoit accoûtumé à mener fans ennui une vie privée que les affaires de fa famille, les devoirs de l'amitié & les agréments de la Littérature occupoient affez. Ce ne fut cependant ni pår indifférence, ni par dégoût qu'il refusa l'Evêché de Clermont, où il fut nommé au mois d'Octobre 1717. Il en avoit une raison bien plus effentielle, que perfonne que lui ne fçavoit encore. Des douleurs qu'il fupportoit fans fe plaindre depuis près de deux ans, l'avoient déja intérieurement convaincu qu'il étoit atteint de la pierre, & que le mal augmentant nécessairement de jour en jour, ne lui permettroit pas de faire exactement la vifite d'un fi grand Diocèfe, dont les Paroiffes d'ailleurs, fituées pour la plûpart dans les montagnes, ne pouvoient être parcourues qu'à cheval. L'efprit de régularité l'emporta fur l'opinion des grandeurs, & ce qui étoit beaucoup plus pour lui fur fa reconnoiffance pour le choix du Prince. Il faut ajoûter que le foin de fa fanté y entra pour peu de chofe, car elle n'avoit jamais balancé aucun de fes devoirs ; & dans des circonftances plus délicates encore, ou du moins plus marquées, il avoit fait connoître qu'elle ne lui étoit pas à beaucoup près fi chère, qu'on le fuppofe ordinairement aux perfonnes de fon état & de fa fortune. Il n'avoit jamais eu la petite vérole, & devoit par conféquent la craindre ; cependant quand Madame la Ducheffe de Villeroy fa foeur en fut attaquée, il s'enferma avec elle, il ne la quitta pas un inftant, il reçut fes |