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Il pensoit, & aimoit à s'exprimer d'une façon peu commune: il ofoit heureusement en ce genre, il amenoit fi finement une penfée, il fauvoit fi adroitement une expression, qu'il venoit enfin à bout de faire paffer avec grace les idées les plus finguliéres, & les plus hardies métaphores. Les faillies, la promptitude & la force de fes reparties ne lui donnoient. pas feulement quelque fupériorité, elles alloient jufqu'à le rendre redoutable dans la conversation.

Zélé partifan de la vérité, il la cherchoit avec obftination jufques dans les chofes les plus indifférentes; il vouloit blâmer impitoyablement ce qui lui paroifsoit blâmable, & louer, même en public & malgré les plus févéres défenses, ceux qui méritoient fes éloges. Auffi, pour excufer auprès de lui un défaut, pour

le réparer en quelque forte, il fuffifoit presque de l'avoüer. C'est de ce principe qu'il tire une nouvelle apologie pour Démosthène accufé d'avoir pris l'épouvante, & d'avoir jetté fon bouclier dans une déroute. Il l'avoue lui-même, & dès là, dit-il, je Pabfous & lui rends d'autant plus volontiers mon eftime, qu'après la bravoure je ne fçais rien de plus brave Paveu de la poltronerie.

que

Réduit depuis long-temps à un petit nombre d'amis, d'ordre & d'états différents, ce n'étoit point leur qualité, c'étoit leur érudition feule & leur caractére qui les diftinguoit dans fon efprit, suivant un autre grand principe qu'il avoit encore étalé dans fa Préface fur Démosthène, où après avoir prouvé que cet Orateur n'étoit pas le fils d'un forgeron craffeux & enfumé, comme Juvénal

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Juvénal l’insinuë; il ajoûte: Je ne m'attache pas à cette preuve par un entêtement ridicule pour mon Auteur, moi qui ne lui demande d'autres titres de nobleffe que fes Ouvrages, & qui d'ailleurs ne connois de véritable roture que celle des actions.

Il mourut le onziéme d'Octobre dernier, âgé de cinquante-huit ans moins un mois & quelques jours. Il étoit fur le point de donner une troifiéme édition de fon Démosthène, augmentée de deux Harangues, fçavoir de celle d'Efchine contre Ctéfiphon, & de celle de Démosthène contre Efchine; piéces que Cicéron avoit lui-même traduites avec foin & qu'il traite de chef-d'œuvres inimitables. Le teftament de M. de Tourreil doit raffurer le Public fur

le payement d'une fi importante dette, il en a chargé M. l'Abbé Maf Tome II.

B

fieu, & on fçait que personne n'eft plus en état de l'acquiter.

CATALOGUE DES OUVRAGES de M. DE TOURREIL.

1. Difcours qui a remporté le Prix de l'Académie Françoise en 1681. fur ces paroles: Ave, gratiâ plena, Dominus te

cum.

2. Difcours qui a remporté le Prix de la même Académie en 1683. fur ces paroles: Ecce enim beatam me dicent omnes generationes, &c. Ces deux Difcours ont été imprimez dans les Recueils de l'Académie Françoise des années 1681. & 1683.

3. Harangues de Démosthène traduites, avec des Remarques. Paris, 1691. in-8. Il n'y a dans cette édition que cinq Harangues fçavoir la premiére Philippique, les trois Olynthiennes, & la Harangue fur la Paix,

4. Difcours prononcé à l'Académie Franfoife le 14 Février 1692. à fa réception. Paris, 1692. in-4. réimprimé dans les Recueils de l'Académie.

5. Réponse au Difcours de M. l'Abbé Begault, Député de l'Académie Royale de Nîmes, 30 Octobre 1692. Ibidem. 6. Réponse au Difcours de M. l'Abbé Boileau, lorfqu'il fut reçû à l'Académie Françoife le 19 Août 1694. Ibidem. 7. Effais de Jurifprudence. Paris, 1694. in-12.

8. Réponse au Difcours de M. l'Abbé de Soubife, alors Coadjuteur, depuis Evêque de Strasbourg, & Cardinal de Rohan, le jour de fa réception à l'Académie Françoife, le 31. Janv. 1704. Dans les

Recueils de la même Académie. 9. Philippiques de Démosthène traduites, avec des Remarques. Paris, 1701. in-4. Les mêmes, Amfterdam, 1706. in-12. C'est la même Traduction des cinq Harangues qui avoient paru en 1691. mais

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