D U DANTE, AVEC UNE NOTICE DÉTAILLÉE DE SES OUVRAGES... Michel Paal Guide Par M. DE CHABANON, de l'Académie Royale des Infcriptions & BellesLettres, & de celle de Lyon. A AMSTERDAM; M. D C C. LXXIII. AVERTISSEMENT. CE qui compofe cette Brochure devoit faire partie d'un Ouvrage plus étendu, confiftant en des recherches fur l'état des Lettres en Italie, dans le treizième, & dans le quatorzième fiècle. Ces recherches devoient être accompagnées de la vie des principaux Ecrivains de ce tems-là. Des confidérations particulières nous ont forcés d'abréger ce travail, & de publier cet essai. t Ref. It Glant 5-2-40 40605 1770. LE VIE DU DANT E. E DANTE naquit à Florence l'an 1265, d'une Famille noble & diftinguée, Cacciaguida, fon trifaïeul, époufa une Aldighieri de la Ville de Ferrare; le nom d'Alighieri (1) fut donné aux enfans & aux petits-enfans. Le Dante le reçut en naiffant, & ce ne fut que long-tems après qu'on l'appela Dante, en recon (1) On avoit retranché le d. noiffance, dit-on, des avantages que fon génie avoit procurés à fon pays (1). Cette étymologie nous femble un peu fufpecte, & Bayle en indique une plus naturelle. Le jeune Alighieri, dans fon enfance, avoit été furnommé Durante ; par abréviation l'on prononça Dante; c'est ce nom que notre Poëte a confervé, que fes Ouvrages ont illuftré, & qui s'est maintenu dans fa poftérité comme un titre de gloire. L'Italie, au treizième fiècle, étoit livrée à un efprit de faction qui produifoit, non-feulement des guerres entre les Etats voifins, mais des inimities irréconciliables entre les Citoyens des mêmes Etats. Chaque Ville, partagée en Guelfes & en Gibelins, formoit deux Villes ennemies l'une de l'autre. Chaqué faction fe fubdivifoit encore pour des intérêts particuliers. L'effet le plus affreux (1) Dante, qui donne. de ces divifions fut l'inimitié perpétuée dans les mêmes familles, la haine tranfmise de père en fils comme un héritage, & devenue la première leçon des enfans, dès qu'ils pouvoient fe connoître. Voilà dans quel tems naquit le Dante, reftaurateur des Lettres, & créateur de la' Poëfie Italienne. Par quel fort étrange le règne des Muses, amies de la paix, se trouve-t-il toujours lié à des tems de difcorde & d'horreurs? Le siècle de Périclès fut celui de la guerre du Péloponnèfe; les Lettres s'accrûrent à Rome parmi les guerres civiles, au milieu des profcriptions d'Augufte; & du fein des troubles de la fronde, nous avons vu éclore le règne des beaux Arts. Le Dante, témoin des malheurs de fa patrie, put dire comme Énée: quorum pars magna fui. Il joua un grand rôle dans l'État, & fentit tout le poids des calamités publiques, |