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plus que probable que Locman, le plus ancien de tous, dit Sahid ( 1 ) qui a traduit Pilpay, leur a fourni ces Fables communes entre ces trois Auteurs, & que les deux Ecrivains poftérieurs ont imitées felon le goût de leurs différentes Nations. Veuton voir comment Efope a quelquefois déguifé ces Fables, il faut lire celle du Lion devenu vieux, traduite du Grec en Latin par Phédre, L. 1, f. 20, & en François par la Fontaine, L. 3, f. 14. Nous nous contentons de rapporter la Fable de Locman, que nous traduifons du Latin d'Erpenius, Fabula 16:

Les Chiens & le Renard.

de Lion

Des Chiens trouverent une peau & fe mirent à la ronger; un Renard les vit attaquer cette peau, & leur dit : « Si ee » Lion étoit encore en vie, fes griffes vous » paroîtroient plus longues que vos dents ». Moralité. Cette leçon s'adrefle à ceux qui

(1) Sahid, Livre des Lumières au Lecteur,

B

attaquent la réputation des perfonnes mortes, ou des foibles qui ne peuvent fe défendre.

Il faut convenir néanmoins que la Fable d'Efope, très-bien traduite par la Fontaine, femble l'emporter fur celle de Locman; mais en revanche, la Fable de la Poule aux Œufs d'or, la Fontaine, L. 5, f. 13, nous paroît plus naturelle dans le Fabulifte Orien tal, que dans fon Imitateur Grec ou François. Voici la pièce Arabe:

La Femme & la Poule.

Une Femme avoit une Poule qui pondoit chaque jour un œuf d'argent; elle fe dit à elle-même : « Si je nourris mieux ma Poule, » elle me pondera deux œufs au lieu d'un ». La Poule créva par trop de nourriture.

II eft plus naturel que la femme ait efpéré obtenir deux œufs de fa poule, en lui donnant beaucoup à manger, que de trouver un tréfor dans fon corps, en la faisant mourir. Locman composa des Fables, des Apologues, des Sentences & des Maxi

mes,« dont chacune, difent les Orien"taux, eft plus eftimable que le monde » entier ». Ainfi l'on peut ajouter que les ouvrages de cet Ecrivain font ineftimables. On lit dans le Chapitre 31 de l'Alcoran ces Maximes, que du Ryer a traduites ainfi: «Locman dit à fon fils: ô mon fils, » ne crois pas que Dieu ait un compagnon; » c'est un très-grand péché. Nous avons » commandé à l'homme d'honorer père & » mère. Sa mère le porte avec douleur fur » douleur, & le fèvre à l'âge de deux ans ; »ne fois pas ingrat des bienfaits de Dieu, » honore père & mère. Tu feras un jour » devant Dieu pour être jugé; ô mon fils, » fais ce qui eft honnêre, fuis ce qui n'eft » pas approuvé, & fois patient en tes ad» verfités. Ne fréquente pas les fuperbes, » observe tes pas, marche avec modestie, » parle doucement. Il y a des ignorants qui

difputent de la Divinité fans raifon. Tout » ce qui eft au ciel & en la terre eft à Dieu; » il n'a pas befoin du monde, la louange » lui eft due en tout ce qu'il fait. Si tous les B →

arbres du monde étoient plumes, & fi la mer étoit encre, ils ne comprendroient » pas les effets de fa tout-puiflance. Il eft » tout-puiffant, il fait tout. O Peuple, » craignez Dieu! ne foyez pas orgueilleux de vos richesses, ni de ce que Dieu vous "tolère & vous fouffre; il fait le tems que » vous ferez châtié. Personne ne fait que » Dieu ce que tu feras demain; personne » autre qui lui ne fait en quel lieu tu mour> ras: il fait tout! il fait tout »>!

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Nous allons parler des ouvrages de Locman. Le P. Imbonati (1) dit qu'il existe dans la Bibliothèque du Vatican un gros volume des Œuvres de Locman. Ce qui en eft parvenu jufqu'à nous, confifte en Proverbes & en Fables, que nous ne connoiffons que d'après une traduction faite du Perfien en Arabe. Cette traduction convertie de l'Arabe en Latin par Erpenius, forme une brochure de 48 pages, qui comprend

(1) Imbonati, Bibliot. Magna Rabbin., T. IV. p. q.

la Traduction & le Texte; elle eft intitulée: Locmani fapientis Fabulae & felecta Adagia, &c. c'eft-à-dire, Fables & Proverbes choifis du fage Locman; avec la traduction Latine & les Notes d'Erpenius, Imprimeur des langues Orientales Leyde, 1615. Les Arabes, felon Sahid (1), ont auffi un gros volume des Apologues de Locman.

à

Le Traducteur Latin n'a recueilli que trente-fix Fables & cent Proverbes de Locman; la plus grande partie de ces Fables fe trouve dans la Fontaine, qui les a traduites en partie ou imitées du Grec d'Esope: Dans quelques-unes Efope a changé les noms des perfonnages, en attribuant à un animal ce que Locman attribue à un autre. Ainfi dans la Fable du Renard & du Bouc, L. 3, f. 5. le Bouc defcend dans un puits pour s'y défaltérer, & ne peut plus remonter. Le Fabulifte Perfe met cette étourderie fur le compte du Cerf. Esope a-t-il eu raison

(1) Sahid, Livre des Lumières.

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