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des malheurs où les autres font tombés, on me blâmeroit de revenir fur une matiere que tant d'autres ont fi bien traitée, Cela me conviendroit d'autant moins, que la nouveauté des faits que je me propofe de raconter fera plus que fuffifante pour attirer tous les hommes, fans diftinction, à la lecture de mon ouvrage. Il n'y en aura point de fi ftupide & de si grossier, qui ne foit bien aife de favoir par quels moiens & par quelle forte de gouvernement il s'eft pu faire, que les Romains en moins de cinquante-trois ans (a) foient devenus maîtres de prefque toute la terre. Cet événement eft fans exemple. D'un autre côté quelle paffion fi forte pour les fpectacles, ou pour quelque forte de fcience que ce foit, qui ne céde à celle de s'inftruire de chofes fi curieuses & fi intéreffantes?

Pour faire voir combien mon projet eft grand & nouveau, jugeons de la République Romaine par les Etats les plus célébres qui l'ont précédée, dont les Hiftoires font venues jusqu'à nous, & qui font dignes de lui être comparés. Les Perfes fe font vu pendant quelque tems un Empire affez étendu, mais ils n'ont jamais entrepris d'en reculer les bornes au-delà de l'Afie, qu'ils n'aient couru rifque d'en être dépouillés. Les Lacédémoniens eurent de longues guerres à foutenir pour avoir, fur la Gréce, l'autorité fouveraine, mais à peine en furent-ils paifibles poffeffeurs pendant douze ans. Le Roiaume des Macédoniens ne s'étendoit que depuis les lieux voifins de la mer Adriatique jufqu'aut Danube, c'eft-à-dire, fur une très-petite partie de l'Europe; & quoiqu'après avoir détruit l'Empire des Perfes, ils aient réduit l'Afie fous

(a) Les Romains en moins de cinquante-trois ans.] Eft-ce une chofe bien fu prenante qu'une République déja puiffante par la conquête de l'Italie, att étendu les limites de fon Empire dans un efpace auffi long que celui de cinquante trois ans? Les Modernes qui réglent leur admiration & leurs éloges à l'égard des Anciens fur le plus ou le moins de fiécles d'antiquité, conviennent fur ce point avec notre Auteur, & prennent comme une vérité ce qui n'eft dans le fond qu'une flaterie. Si Polybe eût laifle là les Romains & eût remonté quelques fiécles plus haut, fi les Modernes euffent defcendu plus bas, ils euffent trouvé beaucoup de rabais & rendu à chacun la gloire qui lui appartient. Je voudrois bien demander au premier ce qu'il penfoit d'un Séfoftris, d'un Cyrus, d'un Alexandre le Grand? Ces trois grands hommes n'ont-ils pas pouffé plus loin leurs conquêtes en beaucoup moins de tems? Laiffons les Séfoftris, les Cyrus, les Alexandres, que mon Auteur écarte en faveur des Romains, eft-ce que depuis eux le monde auroit fi fort dégénéré en Conquérants? Rien n'a-t-il paru qui en approche? N'en connoiffons-nous pas, qui venus plufieurs fiécles après, ne font pas moins dignes de notre admiration pour être plus proches de nous? Un Tamerlan ou Timur-bec, un Genghifcan valent bien les Romains, valent

leur

bien un Alexandre. Celui-ci étoit Roi, & les autres de petits Souverains, & même quelque chofe de moins. Il eft pourtant vrai qu'ils ont porté plus loin leurs conquêtes que n'ont fait les Grecs & les Romains. L'Empire de Timur-bec a eu d'auffi foibles commencemens que celui de Rome; celui-ci n'eft monté à fa puiflance que très-lentement, & peu à peu, & l'autre prefque tout d'un coup comme celui des Macédoniens. Timur-bec & Genghifcan ont conquis plus de pais qu'Alexandre le Grand, & donné un plus grand nombre de batailles très-fanglantes contre des peuples très-braves & très-aguerris; c'eft ce qu'Alexandre & les Romains n'ont pas rencontré en Afie. Ils ont plus fait en dix ans que les Romains en cinquante-trois. Ceux-ci ont plus perdu de batailles qu'ils n'en ont gagné. Ils ont étendu leur empire par la vertu de plufieurs grands hommes, au lieu que les autres Conquérants n'ont eu befoin que de la leur pour faire de fi grandes chofes. La décadence de Carthage fit la grandeur de Rome, elle n'eut plus qu'un pas à faire pour s'étendre fur une partie de l'Europe & de l'Afie. Si elle alla fi loin, ce fut plutôt un effet de fa puiflance & de la défunion des Grecs, que de fa valeur,

leur obéiffance; cependant, malgré la réputation où ils étoient d'être le plus puiffant & le plus riche peuple du monde, une grande partie de la terre eft échapée à leurs conquêtes. Jamais ils ne firent de projet ni fur la Sardaigne, ni fur la Sicile, ni fur l'Afrique. Ces nations belliqueufes qui font au couchant de l'Europe leur étoient inconnuës. Mais les Romains ne fe bornérent pas à quelques parties du monde, prefque toute la terre fut foumife à leur domination (a), & leur puiffance eft venuë à un point que nous admirons aujourd'hui, & au delà duquel il ne paroît pas qu'aucun peuple puiffe jamais aller. C'est ce que l'on verra clairement par le récit que j'entreprens de faire, & qui mettra en évidence les avantages que les curieux peuvent tirer d'une éxacte & fidéle Hiftoire.

Celle-ci commencera, par rapport au tems, à la cent quarantiéme Olympiade (b). Par rapport aux faits, nous la commencerons 'chez les Grecs par la guerre que Philippe fils de Démétrius & pére de Perfée fit avec les Achéens aux peuples de l'Etolie, & que l'on appelle la guerre Sociale: chez les Afiatiques, par celle qu'Antiochus & Ptolo

(a) Prefque toute la terre fut foumise à leur domination.] Cette expreflion malgré fon correctif, me femble un peu forte, & fort éloignée de la vérité. Il s'en falloit bien que les Romains n'euffent couru un fi grand espace. Les bornes de leur Empire ne s'étendoient pas au-delà du mont Taurus, du tems de Polybe, ils ne poffédoient de l'Afrique que le païs de la domination des Carthaginois, & les Provinces de l'Espagne les plus proches de la mer Méditerranée & des Colonnes d'Hercule. L'Egypte ne leur étoit pas foumife. A l'égard des Gaules, elles leur étoient inconnues, à la réferve de la partie méridionale de la Provence. Quelque tems après que notre Auteur eut donné fon Hiftoire, de la Ligurie, dont ils étoient les maîtres, ils pafférent dans la Provence, & de là dans le Languedoc, où ils établirent quelques colonies pour s'affûter le che min jufqu'en Espagne. Ils appellérent cette nouvelle Province, leur Province, Provincia noftra, dont Narbonne qui lui donna fon nom dans la fuite, fut la Capitale, & dont le Rouffillon faifoit partie. Tous les autres peuples à l'Occident, & au Nord de ces Provinces méridionales, n'ont été connus que longtems après Polybe, fi ce n'eft les Alpes maritimes, & quelque peu de alifiére des Alpes Cotiennes.

Denys d'Halicarnaffe, qui écrivoit dans un tems qui n'étoit pas éxemt de flaterie, pouffe plus loin hyperbole car il dit que Rome étoit maîtreffe de toute la terre, & qu'elle n'avoit point d'autres bornes que l'Orient & l'Occident. Je lui pafle Occident, quoiqu'il reftât encore quelques peuples de l'Espagne vers les côtes de l'Océan qui n'étoient pas encore foumis aux Romains, & Angleterre, qui n'étoit pas entiérement domp tée. L'Elbe & le Danube fervoient de bornes du

mée

côté du Nord, & l'Euphrate à l'Orient. Ce font les frontiéres de l'Empire Romain du tems que Denys d'Halicarnaffe donne fon Hiftoire des Antiquités Romaines. On peut voir par ce que je viens de dire, qu'il s'en falloit bien qu'ils ne do minaflent fur toute la terre. Mais d'où vient que nous élevons fi haut la grandeur Romaine & la vafte étendue de leur domination, comme s'il n'y avoit rien eu au-delà de leur gloire & de leur puiflance, lorfque fans remonter fi haut & en defcendant plufieurs fiécles plus bas, on trouve l'Empire des Sarrafins? A-t-on jamais lû une fuite fi longue & fi fuivie de victoires & de conquêtes? Ils les poufférent fi loin, qu'à peine cel les des Romains comprennent une partie de leur Empire.

(6) Celle-ci commencera, par rapport au tems, à la cent quarantiéme Olympiade.] Iphitus Roi d'Elide, & Licurgue Roi de Lacédémone, rétablirent les Jeux. Olympiques inftitués par Hercule à l'honneur de Jupiter. Ces Jeux ne fe célébroient que dans certaines occafions; ces deux Rois établirent la coûtume de les célébrer tous les quatre ans près de la ville d'Olympie; c'est ce qui donna le nom d'Olympiade aux quatre années révolues. Je tire tout ceci de Tourreil, qui dit que cet intervalle prefcrit & fixé par la Religion, parut le plus commode pour diftinguer les tems.

Le premier qui s'en fervit fut Timée fous Ptolomée Philadelphe. Jufques-là on marquoit d'ordinaire les événemens par les années des Archontes d'Athénes & des Rois de Lacédémone. Eras tofthene, fous Ptolomée Eve gétes, imita Timée mais de tous les Hittoriens Grecs, qui comptent de la forte & qui nous reftent, le plus ancien c'eft Polybe.

mée Philopator fe déclarérent pour la Coelofyrie: dans l'Italie & l'Afri que, par celle des Romains contre les Carthaginois, & que d'ordinaire on appelle la guerre d'Annibal. Tous ces événemens font la fuite de 'Hiftoire d'Aratus le Sicyonien. Avant cela les chofes qui fe paffoient dans le monde n'avoient entr'elles nulle liaifon; chacun avoit fes raifons pour entreprendre & pour éxécuter, qui lui étoient particuliéres. Chaque action étoit propre au lieu où elle s'étoit paffée. Mais depuis tous les faits fe font réunis comme en un feul corps, les affaires de l'Italie & de l'Afrique n'ont formé qu'un tout avec celles de l'Afie. & de la Gréce, toutes fe font rapportées à une feule fin; & c'eft pour cela que nous avons fixé à ces tems-là le commencement de cette Hif toire. Car ce ne fut qu'après s'être foumis les Carthaginois par la guerre dont nous parlions tout à l'heure, que les Romains, croiant 'être ouvert un chemin für à la conquête de l'Univers, oférent porter leurs vûës plus loin, & faire paffer leurs armées dans la Gréce & dans le refte de l'Afie.

Si les Etats, qui fe difputoient entr'eux l'Empire fouverain, nous étoient bien connus, peut-être ne feroit-il pas néceffaire de commencer par montrer quel étoit leur projet & quelles forces ils avoient lorsqu'ils s'engagérent dans une fi grande entreprife. Mais parce que la plupart des Grecs ne favent quelle étoit la forme du gouvernement des Romains & des Carthaginois, ni ce qui s'eft paffé parmi ces peuples, nous avons cru qu'il étoit à propos de mettre fur ce fujet deux Livres à la tête de notre Hiftoire, afin qu'il n'y ait perfonne en la lifant qui foit en peine de favoir par quelle politique, quelle force & quels fecours, les Romains ont formé des projets qui les ont rendus maîtres de la terre & de la mer. Après la lecture de ce que nous dirons par avance dans ces deux Livres, on verra que ce n'eft pas fans raifon qu'ils ont conçu le deffein de rendre leur empire univerfel, & que pour éxécuter ce projet, ils ne pouvoient prendre des mefures plus juftes. Car ce qui diftingue mon ouvrage de tout autre, c'eft le rapport qu'il aura avec cet événement qui fait l'admiration de nos jours. Comme la fortune a fait pancher prefque toutes les affaires du monde d'un feul côté, & femble ne s'être propofé qu'un feul but: ainfi je ramafferai aux Lecteurs fous un feul point de vûë les moiens dont elle s'eft fervie pour l'éxécution de ce deffein.

C'est là le principal motif qui m'a porté à écrire. Un autre a été, que je ne voiois perfonne de nos jours qui eût entrepris une Hiftoire univerfelle. Cela m'auroit épargné bien des foins & bien de la peine. Il y a des Auteurs qui ont décrit quelques guerres particuliéres, on en voit qui ont ramaffé quelques événemens arrivés en même-tems: mais il n'y a perfonne, au moins que je fache, qui affemblant tous les faits & les rangeant par ordre, fe foit donné la peine de nous en faire voir le commencement, les motifs, la fin. Il m'a paru qu'il ne falloit pas laif

fer

fer dans l'oubli le plus beau & le plus utile ouvrage de la fortune. Quoique tous les jours elle invente quelque chofe de nouveau, & qu'elle ne ceffe d'éxercer fon pouvoir fur la vie des hommes, elle n'a jamais rien fait qui approche de ce que nous voions aujourd'hui. Or c'eft ce que l'on n'apprend pas dans les Hiftoriens particuliers. On feroit ridicule fi après avoir parcouru les villes les plus célébres l'une après l'autre, ou les avoir vues peintes féparément, on s'imaginoit pour cela connoître la forme de tout l'Univers & en comprendre la fituation & l'arrangement. Il en eft de ceux qui pour favoir une Hiftoire particuliére fe croient fuffifamment inftruits de tout, comme de ceux qui après avoir examiné les membres épars d'un beau corps, fe mettroient en tête qu'il ne leur refte plus rien à apprendre fur fa force & fur fa beauté. Qu'on joigne enfemble & qu'on affortiffe les parties, qu'on en faffe un animal parfait foit pour le corps, foit pour l'ame, & qu'on le leur montre une feconde fois, ils reconnoîtront bientôt que la prétendue connoiffance qu'ils en avoient d'abord, étoit bien plus un fonge qu'une réalité. Sur une partie on peut bien prendre quelque idée du: tout, mais jamais une notion distincte. De même l'Hiftoire particuliére ne peut donner que de foibles lumiéres fur l'Hiftoire univerfelle. Pour prendre goût à cette étude & en faire profit, il faut joindre & approcher les événemens, il faut en diftinguer les rapports & les différences.

Nous commencerons le premier Livre où finit l'Histoire de Timée, je veux dire par la premiére expédition que les Romains firent hors de P'Italie, ce qui arriva en la cent vingt-neuviéme Olympiade. Ainfi nous ferons obligés de dire quand, comment & à quelle occafion, après s'être bien établis dans l'Italie, ils entreprirent d'entrer dans la Sicile. Car c'est dans ce païs qu'ils portérent d'abord leurs armes. Nous nous contenterons de dire fimplement le fujet pour lequel ils fortirent de chez eux, de peur qu'à force de chercher caufe fur caufe, il ne nous en refte plus pour en faire le commencement & la base de notre Histoire. Pour le tems, il nous faudra prendre une époque connuë, dont tout le monde convienne & qui fe diftingue par elle-même : ce qui n'empêchera pas que reprenant les chofes d'un peu plus haut, nous ne rapportions du moins en abrégé tout ce qui s'eft paffé dans cet intervalle. Cette époque ne peut être ignorée ou même difputée, que tout ce que l'on raconte enfuite ne paroiffe douteux & peu digne de foi; au lieu que lorsqu'elle eft une fois bien établie, on se perfuade aisément que tout le refte eft certain.

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Premiére expédition

CHAPITRE PREMIER

Premiere expédition des Romains hors de l'Italie. Meffine eft furprife par les Campaniens & Rhege par quatre mille Romains. Rome punit cette derniere trahison. Les Campaniens ou Mamertins battus par Hieron Préteur de Syracufe, implorent le fecours des Romains & l'obtiennent, quoique coupables de la même perfidie, que les Rhéginois. Défaite des Syracufains & des Carthaginois. Retraite de Hiéron.

C

E fut donc la dix-neuviéme année après le combat naval donné près de la ville d'Egofpotame dans l'Hellefpont, & la feiziéme des Ro- avant la bataille de Leuctres, l'année que les Lacédémoniens, par les mains foins d'Antalcide, firent la paix avec les Perfes, que Denys l'ancien P'Italie. après avoir vaincu les Grecs d'Italie fur les bords de l'Ellépore, fit le fiége de Rhege, & que les Gaulois s'emparérent de Rome, à l'exception du Capitole (a): Ce fut dis-je cette année que les Romains

hors de

(a) Les Gaulois s'emparerent de Rome, à l'excepsion du Capitole.] Tite-Live donne fouvent dans le merveilleux. C'eft dommage. Sans cela fon Hiftoire eût été beaucoup moins défectueufe. Il compofe des victoires imaginaires par haine, par jaloufie ou par efprit flateur, pour rehauffer la gloire ou couvrir la honte de fa nation. Sa partialité éclate fur-tout dans la victoire qu'il fait remporter à Camille fur les Gaulois, dans le tems qu'on étoit à pefer l'or pour la rançon du Capitole que les Gaulois tenoient afliégé après s'être rendu maîtres de Rome. Notre Auteur ne dit pas un feul mot de cette prétendue victoire. Si Polybe en eût eu la moindre nouvelle, il en eût dit quelque chofe, de peur de choquer les Romains par la fuppreffion d'un fait de cette nature. Auroientils fouffert, ces fiers Républicains, qu'il s'éloignât des autres Hiftoriens, s'il y en eût eu quelqu'un qui en eût parlé? ne lui auroient-ils pas reproché qu'il cherchoit à étouffer leur gloire & à mettre leur honte dans tout fon jour?

Mr. Dacier dans la préface de fon Plutarque, prétend que Tite - Live n'a point impofé à la poftérité fur cette victoire de Camille. Les preuves qu'il allégue contre l'opinion de Polybe ne me paroiffent pas fondées. Il fuffit, dit-il, que Plutarque a Tite-Live pour garant, notez que le premier a copié le fecond, d'ailleurs, continue-il, Polybe n'ayant écrit fon Hiftoire qu'après l'O lympiade 157. près de 240. ans après cet exploit de Camille, on peut croire qu'il n'étoit pas mieux

aiant

inftruit que Tite-Live, qui avoit écrit la fienne. avant la premiere année de l'Olympiade 189. c'efte à-dire 124. ou 125. ans après Polybe. Quoi? cette antériorité de tems de Polybe fur Tite-Live doit être comptée pour rien? Ce favant homme foupçonne que Polybe, ami de Scipion, avoit en vue d'échpfer la gloire de Camille, dont l'éclat pouvoit diminuer celle de fon Héros. Ce foupçon eft-il bien légitime? De grace qu'on me falle voir un feul Hiftorien Latin qui ait relevé Polybe fur cela, au lieu que l'opinion de Tite-Live eft combattue & repouffée par des Hiftoriens anciens. Suetone & Juftin sui font formellement contraires. Dacier cite le premier & ne dit mot du fecond Le bon eft que Plutarque fe dédit dans fon traité de la fortune des Romains. Si ce que Polybe écrit, dit-il, touchant les Gaulois qui prirent Rome eft vrai. Dácier fait bouclier de ce si. Il dit qu'il marque fon doute: cela marque plutôt que ce fait de Camille étoit de l'invention de Tite-Live & qu'il n'en avoit aucun garant. D'ailleurs Plutarque vivoit dans un ficcle inquifiteur & flateur, il n'ofoit trop appuyer fur le fentiment de Polybe, de peur de déplaire aux Romains, outre que les ouvrages de Tite-Live étoient révérés parce qu'ils commençoient à vieillir. Les fables les plus impertinentes & les plus fauffes prennent à la longue la place de la vérité, & impofent aux efprits crédules. On croyoit alors à Rome ce qu'on ignoroit du tems de Polybe.

L'Hifto

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