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X. De Petter fecit 1728.

-TERRAIN OÙ L'ON PEUT RANGER EN COLONNES

attaque feroit d'autant plus dangereufe, que la fection F peut donner de tête contre le corps qui attaqueroit, & qui lui prête le flanc.

Si l'ennemi tombe en même tems fur les deux faces de la gauche, il fe trouve expofé aux mêmes difficultés & aux mêmes dangers, ne pouvant s'engager en G, fans effuier tout le feu de M, de la fection E & de F. Voilà un avantage qui ne fe trouve point dans le quarré, ni dans quelque évolution ou figure que ce foit.

Je veux que cette Colonne foit inveftie, envelopée, & choquée de tous côtés par un corps de trois ou quatre mille hommes rangés felon la méthode d'aujour d'hui; croit-on que cette Colonne unie & ferrée, & ne faifant qu'une feule maffe bien ordonnée, reftera immobile & fans action dans un terrain libre comme le quarré lorsqu'il eft environné? Ce feroit lui refufer & lui dérober fes propriétés naturelles, qui confiftent dans la force & la violence de fon choc, dans la vîtesse & la célérité de fes mouvemens, de fes changemens, & de fes différentes manœuvres en présence de l'ennemi, & pendant le cours même d'un combat, dans la fimpli cité de fa figure qui fe rompt & fe remet dans un inftant fans peine & fans confufion. Joignez à cela qu'elle s'accommode à toute forte de fituations de terrain, dans les plaines comme dans les païs couverts, embarraffés & ravineux, montagneux & de défilés, & dans les infultes de poftes & de camps retranchés. Elle combat avec les mêmes avantages par tout, & plus dans les lieux refferrés & de défilés que dans les autres. Car dans ceux qui peuvent à peine contenir deux ou trois bataillons de plus, ou dans des trouées, où quelquefois des armées entiéres font obligées de fe former fur un très-grand nombre de lignes, où à peine fix ou fept bataillons peuvent combattre de front, on peut au moins leur oppofer les quatorze Colonnes A, c'eft-à-dire le double de bataillons aux fept de l'ennemi B, qui remplit l'ouverture de la trouée par plufieurs lignes redoublées; de forte que ces vingt-fix Colonnes rangées fur deux lignes, font en état de culbuter & de battre un nombre triple de bataillons rangés fur plufieurs lignes; n'eft-ce pas là une évidence palpable? Car quel eft le bataillon qui pourra réfilter & foutenir contre le choc d'une Colonne, & à plus forte raifon contre deux? Je ne prétens pas feulement que ces Colonnes attaquent les bataillons minces; mais ma méthode eft que les Colonnes de la feconde ligne C, paffent en même tems entre les intervalles des Colonnes de la premiére A, & tombent fur la feconde B.

Je ne m'arrête pas au reproche que l'on fait à la Colonne de donner prife fur elle, par l'excès de foibleffe des côtés qui deviennent plus longs & plus minces. Car que répondre à un tel reproche, finon ce qu'Ajax répondit à Vénus: Allez, la guerre n'est pas votre métier, mêlez-vous de la faire naître. Peut-on en effet appeller excès de foibleffe & côtés longs & minces, un corps de 24. ou de 30. files de tête à queue fur 46. de profondeur? Si ce corps fe trouve attaqué par une de ses faces, l'ennemi doit fe réfoudre à affronter & à pénétrer 24. rangs, c'est-à-dire un corps dont les files des faces font de 24. de hauteur. Où eft donc cet excès de foibleffe? Où font ces côtés minces? Mais quelle eft la nature des corps qui attaqueront cette Colonne tour à tour, & à différentes reprises? Ce ne peuvent être que des bataillons ordonnés, armés, & difpofés felon la façon d'aujourd'hui, fur quatre ou cinq de hauteur. Ne feroit-ce pas une efpéce de prodige en matiére de lâcheté, fi des files de 24. hommes se laiffoient enfoncer & pénétrer par de files de cinq tout au plus ?

Je fuppofe que ces bataillons en bon nombre environnent & envelopent cette Colonne de toutes parts, ou plufieurs enfemble; combattant fur un tel principe, ils ne tiennent rien: car cinq hommes de file auront alors affaire à douze ou à quinze à b

Tom. I.

chaque

chaque face. Si c'eft de la cavalerie qui charge & qui s'abandonne fur cette Colonlonne, on la chauffera à bout touchant. C'eft là la premiére civilité, le premier compliment, & ce compliment fera un peu long & fort ennuieux; parce que le cavalier étant plus élevé, il fera auffi vû & falué des rangs de derriére, & paffé encore par les pertuifannes, les hallebardes & les efpontons dont ma Colonne fe trouve fraifée. Ajoutez encore les compagnies de grenadiers, qui peuvent s'introduire dans les efpaces des efcadrons, & les chauffer en flanc. Encore une fois, les uns comme les autres fe trouveront-ils bien d'une telle reception? Ne voilà-t-il pas une façon de combattre bien mauvaife & bien foible, puifqu'on ne peut autrement l'attaquer que par une autre femblable qui puiffe en foutenir le choc & le heurt. Cette Colonne ainfi combattue, comme je l'ai dit, fera toujours chemin, pénétrera & paffera fur le ventre de tout corps qui ofera fe préfenter devant & lui couper retraite, ce que le quarré ne fera jamais j'entens ici le quarré vuide, car le plein dont on fe fervoit il y a près de deux fiécles avoit quelque convenance avec la Colonne.

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De l'ordre quadrangulaire oppofe à la Colonne. Analyse de ces deux évolutions. Que le feu de la premiere eft inferieur à celui de la Seconde, quoique plus foible en nombre d'hommes.

L

E bataillon quarré plein étant maffif, car c'eft fur celui-là que quelques Officiers ont commencé à ouvrir les yeux depuis mon Livre des Nouvelles découvertes fur la Guerre; ce bataillon, dis-je, étant maffif & épais, ne fçauroit fe mouvoir ni manceuvrer, (car il ne s'agit pas ici du quarré vuide, qui eft pis encore,) fes mou-vemens font lourds & graves, & tout d'une piéce; tout terrain n'eft pas propre à cette forte d'évolution: il lui en faut, pour ainfi dire, un fait exprès, comme à la phalange, & lorfqu'on le rencontre il faut y refter, s'il plait à l'ennemi de nous y combattre; s'il faut marcher, on ne va pas longtems fans trouver des obftacles, qui ne permettent plus de fuivre cet ordre: & s'il faut le changer pour en prendre un autre, il eft dangereux de le faire l'ennemi fur les bras, foit qu'il vous fuive ou qu'il vous harcelle. Si le quarré eft plein, il eft propre pour le choc & pour enfoncer : mais les angles font foibles, & le choc en eft moins violent; s'il eft vuide, il est fujet à fe rompre de lui-même, à fe défordonner & à fe confondre, pour peu qu'on foit obligé de doubler le pas, & l'on n'a pas befoin de l'ennemi pour faire cette œu vre, à moins qu'on en ufe comme fit Xénophon, ce que nous expliquerons.

Je fuppofe même qu'on foit favorifé du terrain, comment remédier à un incon-venient qui peut arriver, & qui arrive toujours lorfqu'on eft attaqué? Car fi l'ennemi fait plus d'effort en un endroit qu'en l'autre, & qu'il s'y trouve plus de gens tués, ce n'eft plus un quarré, mais une confufion: la cavalerie furvenant là-deffus, comme on manque de cette arme, qui feule peut lui réfifter, je veux dire de ma pique ou pertuifanne, je laiffe à penfer ce qui en peut arriver; & fi ce quarré eft à centre vuide, ce qui ne peut fe faire que par un grand corps de troupes, je défie les plus habiles d'y apporter du reméde. Car lorfque c'est à centre plein, il y en a, quoique difficile à appliquer, fi ce corps eft même rompu à un de fes angles il ne fçauroit

fe

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