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1o. Les oracles des Dieux. Les réponses qu'ils rendoient par la bouche de leurs prêtres, paffoient pour infaillibles, & très-fouvent devenoient proverbes. Telle eft la fuivante: Summum cape, & medium habebis, dont on verra l'explication dans le corps de cet ouvrage.

2o. Les mots des Sages. L'antiquité les a reçus & célébrés comme autant d'oracles. Tel eft celui-ci : Ausxoλa la xaλa; Ardua quæ pulchra. Tels font encore les fymboles de Pythagore, qu'Erafine met au rang des proverbes. Voyez les Nos. 212, 271 & 409.

3o. Les écrits des Poëtes très-anciens, comme Homère, Pindare, Sapho. Ils font pleins de penfées vraies & d'expreffions vives, qui passèrent dans le difcours familier. Les vers fe chantoient autrefois dans les repas; ce qu'ils avoient de plus faillant n'échappoit pas aux convives, qui en faifoient enfuite des applications dans les fociétés où ils fe trouvoient: ces applications fenties & répétées finiffoient par devenir autant de proverbes.

4o. Les Pieces dramatiques, fur-tout les Comédies. Si Thalie emprunte du peuple quantité d'expreffions, en récompenfe elle lui en crée d'autres qu'il adopte & cite par forme de proverbes. Combien n'en devons-nous pas à notre Molière ? C'est de lui que nous viennent celles-ci: Qu'alloit-il faire, dans cette galère? Rengaîner un compliment; &

plufieurs autres que j'omets pour revenir aux Anciens. Erafme qui a recueilli & commenté plus de cinq mille de leurs proverbes, convient que cette moiffon n'eft qu'une très-foible partie de celle qu'il auroit faite, s'il avoit pu parcourir toutes les productions des fcènes Grecque & Romaine. Mais le tems a fait difparoître ces dépôts ineftimables de tant de proverbes. Les deux Comédies des Grecs font entièrement perdues, à l'exception de onze Pieces du théâtre d'Ariftophane. On connoît à peine le nom de quelques tragédies Romaines, & l'on n'a fauvé que celles de Séneque, qui affurément ne font pas les meilleures. La perte de tant d'écrits précieux feroit ici moins à regretter, fi l'on avoit les proverbes qu'en ont extrait Ariftote, Chryfippe, Cléarque, Didyme, Tarrhée, & plufieurs autres. De ces recueils & des commentaires qui les rendoient fi curieux, il ne nous refte pas le moindre frag ment. Toute notre richeffe en proverbes anciens eft due à des écrivains poftérieurs, Zenobius, Diogénien, Suidas, dont les compilations dépourvues de goût & de critique font encore mutilées en bien des endroits. Méritent-ils des reproches, pour avoir extrait fi peu d'articles, & les avoir présentés d'une manière fi feche, eux qui étoient à des fources pures & fi fécondes; ou notre reconnoiffance, de ce qu'ils nous ont tranfinis quelques foibles lambeaux de l'antiquité? C'eft une queftion, dit Erafine,

fi

que je n'ai pas encore décidée. Mais quelqu'un leur attribuera peut-être la perte des originaux que leurs épitomes ont fait négliger, & croira, non fans fondement, que s'ils n'avoient point porté une main téméraire & prefque facrilege fur les Commentaires de Didyme, de Tharrée & d'autres célebres Parémiographes, au lieu d'abrégés informes qui laiffent au lecteur toute fa foif, il pourroit aller l'étancher à la fource même (1).

5o. La Mythologie. Elle a fourni un nombre infini d'expreffions proverbiales, telles que : C'eft un tonneau fans fond, tiré de la fable des Danaïdes; C'eft la toile de Pénélope. -Plus belle que Vénus. C'eft un Protée. Tomber de Charybde en Scyl

la, &c.

6o. L'Apologue; comme: Jetter le manche après ta cognée. - Réchauffer un ferpent dans fon fein, &c.

(1) Superfunt igitur nobis recentiores quidam, ut indiligentes nulloque delectų, ita jejuni quoque mutilique, velut Zenobius, Diogenianus, Suidas. Quibus haud dum conftitui malam-ne gratiam debeamus, qui ex tam abfolutis copiofifque autoribus tam paucula quædam, tamque nuda nobis tradiderint ; an bonam, quòd illorum ftudio qualiacumque fragmenta veflatis ad nos permanarint. Nifi fi quis id etiam eorum epitomis acceptum ferat, quòd illi neglecti perierunt. Quemadmodum Latini quidam Livii interitum Floro, Trogi Pompeii Juftino folent imputare: neque id prorsùs abs re, meâ quidem fententiâ. Erafm. Adag.

7°. L'Hiftoire. Nombre de proverbes ont rapport à un trait d'hiftoire, comme celui-ci : Vin verfé n'eft pas avalé; lequel rappelle le genre de mort qui enleva Ancée, roi de Samos. L'hiftoire. offre encore quantité de perfonnages, dont les noms ont paffé en proverbe. Ainfi l'on dit d'un envieux, C'eft un Zoïle; d'un critique févère, C'est un Ariftarque; d'une femme chafte, C'est une Veftale, &c. Certains proverbes viennent à l'appui de quelques: faits hiftoriques, & font cités comme preuves de la vérité de ces faits: en forte, dit Erafmne, qu'un événement dont ni le marbre, ni le bronze, ni les Lettres mêmes n'ont pu conferver le souvenir échappe à l'oubli par le bienfait d'un proverbe. Plufieurs ufages très-anciens, & dont il ne refte plus le moindre veftige, doivent le même service à des proverbes qu'ils ont fait naitre, & qui, en leur · furvivant, attestent qu'ils ont exifté: de même que les coquillages marins, femés dans les contrées méditerranées, font des reliques du déluge..

8°. Une répartie courte & vive, comme ce beau mot de Tibère, Il faut tondre fes brebis, & non les écorcher; la réponse d'Amyot, L'appétit vient en mangeant, &c.

9o. Les Arts. Ces expreffions: Avoir le vent en pouppe, Faire naufrage au port; - Selon le vent, la voile, &c., viennent de la navigation; & celles-ci: Baifer la lance; Se battre en retraite, &c., font

de l'art militaire: prifes allégoriquement, elles font devenues proverbiales. La vénerie nous a donné une infinité de proverbes, qui prouvent le goût particulier de nos ancêtres pour la chaffe. Tels font ceux-ci: De toute taille, bons lévriers;- Bon chien chaffe de race, &c. Sur quoi l'on observera que le caractère ou le goût diftinctif d'une nation, d'une province, ou même d'une ville, & le genre d'occupation auquel on s'y livroit autrefois, fe connoiffent à l'efpece de proverbes qui y dominent encore.... Les arts méchaniques mêmes font une fource de proverbes, & ont par-là contribué à la richeffe des langues. Pour n'en citer qu'un, la ferrurerie nous a donné: Mettre les fers au feu; Battre toujours la même enclume, &c.

10o. Les geftes du corps. Nous avons dans notre langue, Demeurer les bras croifés; Donner le croc en jambe, &c..

11. Les êtres animés. Erafme met la femme à la tête de cette claffe, & cite le proverbe: Muliere loquacior. Vient enfuite une kirielle de proverbes tirés des différens animaux, quadrupedes, oiseaux & poiffons. En voici quelques-uns: Lepore timidior; -Sue indoctior; — Afello ftolidior; - Albo corvo rarior; Lufcinia vocalior; - Pifce fanior; Anguilla magis lubricus, &c. Notre langue a adopté la plupart de ces expreffions, & en a, dans cette efpece, un grand nombre d'autres qui lui font

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