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pour ne rien laiffer à défirer aux perfonnes qui, non contentes des preuves de raisonnement veulent des preuves de fait nous allons préfenter une Lettre du Traducteur Anglois, M. le Major Davy, fur l'authenticité des INSTITUTS; elle fe trouve au commencement de l'Edition Perfane-Angloife, & en voici la Traduction.

Glouceftre, 24 Octobre 1776..

MON AMI,

«Vous vous adressez à moi pour que j'établiffe l'authenticité des INSTITUTS, la tâche que vous m'impofez, n'est pas des plus faciles. Cependant je vais vous déduire, avec franchife, les motifs qui m'ont déterminé à regarder cet Ouvrage comme original. J'ignore quel fera leur autorité auprès de ces Critiques févères, qui tirent gloire de leur Pirrhonisme; certains en profiteront, fans doute, pour m'accufer d'un excès de crédulité. Quoi qu'il en foit, je commence par vous déclarer que je ne produirai aucune preuve hiftorique de l'authenticité de ces Inftituts.

Je n'ai lu que deux Hiftoires de Timour, fans compter celle qu'on dit écrite par lui-même (1). L'une eft de ChériffeddinAly-Yezdi, l'autre de Mirkhond; & cette dernière fe trouve dans le Rozzot Euffaffa

(1) ce Outre les Hiftoires de Timour, écrites par » différens Auteurs & dont quelques-unes fe trouvent » dans des Bibliothèques de l'Europe, il en exifte une » bien fupérieure, digne de fixer notre attention. » Elle fut écrite fous la direction du Conquérant, & » peut-être même de fa propre main. Pour en con>>connoître tout le prix, il fuffit de remarquer qu'elle » a été composée, non-feulement d'après les maté>> riaux qui ont fervi à Chériffeddin, mais encore » que Timour y a employé un Recueil particulier de faits dont lui feul connoiffoit les caufes. Cette » Hiftoire n'eft pas encore parvenue en Europe. » M. Davy, qui l'a lue dans l'Orient, m'apprend que c'eft le récit très-exact & très-circonftancié s d'un certain laps de temps; & j'espère que mon » Ami, qui n'épargnera ni peine, ni argent, pour »fe procurer ce MS. le rapportera dans fon

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pays, & qu'à fon retour de l'Inde, il en donnera une traduction, pour l'inftruction & l'amufement de fes Compatriotes ». Préface de M. White, p. vj.

Nous joignons nos vœux à ceux de l'illuftre Profeffeur d'Oxford. Quel bonheur pour nous fi les éloges

Ces deux Auteurs, autant que je puis m'en rappeller, ne font aucune mention des Inftituts, ni de l'Hiftoire ou Commentaires compofés par Timour. Chériffeddin nous apprend que ce Conquérant avoit toujours auprès de lui des hommes inftruits, dont l'occupation étoit de tenir une efpéce de Journal Historique de toutes fes opérations, tant militaires que civiles. Il leur étoit enjoint expreffément de dire la vérité dans les objets même les moins importans, & fur-tout d'obferver la plus fcrupuleuse impartialité, en racontant la conduite & les actions de l'Empereur. On lifoit de temps en temps ces Journaux hiftoriques devant lui, en présence de fes Miniftres, de fes Officiers & des Sçavans. On conféroit les différens textes, & Timour, ou bien une perfonne, témoin oculaire du fait dont il s'agiffoit, fe chargeoit de la rédaction. C'é

fincères & juftement mérités des Littérateurs de l'Europe pouvoient encourager les Sçavans Anglois, habitans de l'Inde, à continuer des travaux qui en-. richiffent la République des Lettres, & qui ont déjà illuftré l'ANGLETERRE.

toit fans doute un excellent moyen d'amaffer des matériaux authentiques pour l'Hiftoire du Souverain d'un grand Empire, fi toutefois il avoit foin d'appuyer fes ordres & d'encou rager cette impartialité & cette véracité qu'il exigeoit dans fes Ecrivains, en fe montrant supérieur à la flatterie. Ce fut avec ces Notes, écrites tantôt en Mogol, tantôt en Perfan, les unes en profe, les autres en vers, qu'Aly-Yezdi compofa, dans la fuite, l'Hiftoire du régne & des conquêtes de Timour." On peut préfumer qu'avec le fecours des mêmes notes, le Conquérant écrivit la volulumineuse & précieuse Histoire de fa propre vie, à laquelle il joignit fes INSTITUTS. Còmment eft-il arrivé qu'Aly-Yezdi & Mirkhond n'ayent eu aucune connoiffance de ces deux Ouvrages? C'eft ce que la diftance des temps ne nous permet pas de connoître. Cependant on pourroit former quelques conjectures très→ plaufibles. Ces Journaux hiftoriques, dont nous avons déjà parlé, fe trouvoient en grand nombre; ils étoient mêmes publics. Les Grands & les Sçavans pouvoient les confulter. On en tira plufieurs copies, qui, ainfi que

les

originaux

originaux, furent tranfmifes à la Poftérité. Mais la Vie & les Inftituts de TIMOUR étoient un Ouvrage particulier, compofé par lui-même. Nous ignorons quelles raifons ont fait prendre la plume à ce Conquérant. Le défir de s'amufer ou de fatisfaire fa vanité; peut-être même ces deux motifs réunis ont pu l'engager dans une entreprise auffi difficile.

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A-t-il écrit de fa propre main? S'estil fervi de celle d'un Confident? C'eft ce qu'il importe peu de fçavoir. Quoi qu'il en foit, nous avons lieu de croire que, pendant fa vie & long-temps après, il n'exista qu'une copie de fon Livre. Nous ignorons également ce que devint cette copie, pendant les troubles qui fuivirent la mort de Timour. Mais enfin on peut raisonnablement fuppofer qu'un tel Manufcrit a exifté fans parvenir à la connoiffance de Chériffeddin ou de Mirkhond; autrement ils n'auroient pas manqué d'en parler, foit pour appuyer fon authenticité, & louer tout le mérite de cette production, foit pour prouver qu'elle étoit fuppofée, s'ils l'euffent regardée comme telle.

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