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détails fur cette Collection de Portraits en miniature, qui représentent différens Souverains de l'Inde, & dont M. Pope a fait préfent à la Bibliothéque Bodléienne d'Oxford, en y infcrivant fon nom & le 'mien.

Tandis que j'étois dans l'Inde, peu de temps avant l'an 1740, un des généraux du Grand-Mogol vint camper, avec fon armée, fous les murs de Surate, dont TegbegKhan étoit Gouverneur pour le même Monarque. C'est la coutume, dans ces occasions, que le Général n'entre point dans la ville; il envoye fimplement au Gouverneur des Officiers chargés de s'informer de fa conduite; c'est un prétexte dont il fe fert pour en tirer certaines rétributions en forme de préfent, plutôt que pour prendre des renseignemens

bien circonftanciés.

Comme Tegbeg-Khan n'étoit pas trop bien à la Cour, il fallut que fon préfent fût capable de faire oublier le paffé, & de lui procurer de la protection pour l'avenir; il envoya donc au Général plufieurs laks (1)

(1) Le Lak ou Leuk fait cent mille roupies. La roupie vaut environ quarante-cinq fols de France. Voyag. dotter. Tom. I. p. 362.

de roupies, qui formoient une fomme de trois ou quatre-cents mille livres fterl. Mais, pour que le marché ne paroiffe pas abfolument inégal (ce qui arrive toujours), le Général offre quelque chofe en retour. Le Général Mogol donna donc au Gouverneur un fabre enrichi d'émeraudes, de rubis & de diamans, qui valoit à-peu-près trois ou quatre mille liv. fterl. & le volume dont il s'agit. Il contient une fuite de Portraits des Souverains qui ont régné dans l'Inde depuis plufieurs fiécles. Ce font des miniatures peintes fur vélin, & copiées d'après une fuite d'Originaux, qu'on voit dans le Palais du Grand-Mogol.

Il y a une forte raifon de croire que ce ne font point des Peintures de fantaisie (indépendamment de la circonftance importante où un Grand-Officier du Royaume les offrit à un autre; ce qui dépofe déjà en leur faveur.) On fçait très-bien que cette fuite de Portraits existe dans le Palais du Monarque, & il n'est pas impoffible qu'on en tire une copie. On doit auffi remarquer que les Maures Mogols n'ont point, pour les Peintures & les Images, cette aversion qui constitue un des points de la Re

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ligion Musulmane. Or ceux-ci tiennent tellement encore de leur origine Tartare, qu'ils tolèrent toutes les Religions, & qu'ils mêlent au culte du THIEN, tel qu'on le profeffe à la Cour de Chine, la Religion dominante de chaque pays qu'ils envahiffent. Cette foupleffe politique leur fert à conferver leurs conquêtes.

On trouve, dans cette Collection, le Portrait de Tamerlan (Timur-leng); c'est peutêtre le feul en Europe auquel on puiffe fe fier. La plus grande certitude de fa reffemblance, c'eft qu'on diftingue dans la figure les traits d'un Tartare, un vifage large & plat, avec de petits yeux.

Ces traits font moins frappans dans fon fils & dans fes defcendans, qui prennent par dégrés le caractère de douceur qu'on remarque dans les figures Indiennes (1).

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(1) J'ajouterai ici ce que Chardin nous apprend de la chauffure de Tamerlan on lui montra les habits de ce Prince que l'on conserve dans le Tréfor du Roi de Perfe. « Les fouliers, dit ce Voyageur', font à la Tartare, fort différens de ceux des Perfans, ils font pourtant pointus tout de même,

dans ce

On peut encore obferver que, Recueil, les Souverains Maures ou Mahométans de l'Inde font diftingués des Gentoux par les pans de leurs robes › que ces derniers laiffent tomber de chaque côté, & qui fe terminent par une forme angulaire, à la manière des Rayas modernes, qui, aujour d'hui, les portent ainfi, comme une marque de la Royauté.

Quoi qu'il en foit, le Gouverneur Tegbeg donna ce Livre à M. Frazer, le même qui, à ma prière, traduifit d'un MS. Perfan, l'Hiftoire de l'expédition de Nadir-Chah (Thamas-Kouly-Khan) dans l'Inde, & qui apporta une curieufe Collection de MSS. Orientaux. La plupart de ces MSS. venoient

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» le talon en eft bas & large, & ils font fi ou. → verts au-dessus qu'il n'y a que les doigts des pieds de couverts. La femelle en est toute gar» nie de petites têtes de clouds ». Comparez le paffage de Chardin avec la Gravure, la confor mité m'a paru fi frappante que j'ai cru devoir placer ici cette note, que les Sçavants Anglois n'auroient fans doute pas manqué d'inférer dans leur Ouvrage, fi elle étoit parvenue à leur connoiffance. Voyez Chardin. Tom. VIII. p. 153,

de la Bibliothéque royale d'Ifpahan, & avoient échappé à la rage des Afghouns, ou Ofghans, Brigands conduits par l'Emir Véiff & par fes fucceffeurs.

M. Frazer m'ayant donné cette fuite de Portraits, je l'envoyai à M. Pope, avec lequel j'étois alors en correfpondance. Mais il m'écrivit que ces objets lui ayant paru trop précieux pour le Cabinet d'un particulier, il avoit eu l'honneur de les offrir à la Bibliothéque Bodleïenne.

Il eft, je crois, fuperflu de vous témoigner combien cette disposition a été agréable à un homme plein de vénération pour cetteUniverfité, qui, en qualité de mère des Sçavans, & de noble conservatrice de la Littérature,* doit être regardée comme l'ornement & l'honneur de la Nation, &c.

Signé, J. CLÉLAND.

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VIE

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