difputoient la poffeffion. (1) La victoire l'ac compagna par-tout; mais il étoit obligé de revenir fouvent fur fes pas, pour réprimer les Sujets déjà vaincus ces diversions retardèrent beaucoup fes progrès. Néanmoins il parvint à ranger tout le Khoraffan fousfa domination (2).

Tandis que ce Prince, porté dans le char de la Fortune, voloit de victoire en victoire, il effuya des malheurs qui le rappellèrent à la condition de l'homme. La mort lui enleva sa fille, fa fœur & une de fes femmes (3). Ces trois pertes précipitées lui furent fi douloureufes, qu'elles rallentirent pour quelque temps fon ambition; il ne vouloit plus même s'occuper des foins de l'Empire; mais les Docteurs & les faints Personnages firent entendre la voix de la Religion, les Grands

(1) J. C. 1380. Hégire 782. Charles VI monte fur le trône au mois de Septembre 1380, à l'âge de douze ans & neuf mois.

(2) J. C. Mars 1381. Hégire Moharrem 783. Minorité de Charles VI.

(3) J. C. 1383. Hégire 785, Age de Timour 47. Régne de Charles VI,

celle

celle de la gloire, & Timour se laissa toucher. Enfin, en continuant les bonnes-œuvres que ces charitables Princeffes pratiquoient de leur vivant, ce Prince donna le change à fon affliction. De nouveaux projets de conquêtes l'entraînèrent bien-tôt à de nouveaux hazards.

(1) Son premier foin fut d'envoyer une armée dans le Jitteh, où ils se trouvoit toujours des mécontens & des mutins. Il conduifit lui-même plus de cent mille combattans dans le Mazendran & dans le Siftan. Cette expédition fut des plus fanglantes. Dans une forteresse, qui ne renfermoit que des rébelles, on fit deux mille prifonniers, qu'on entaffa, tout vivans, les uns fur les autres, avec des briques & du mortier ; & les corps de ces malheureux fervirent ainfi à bâtir plufieurs tours. Pourroît-on imaginer des monumens plus convenables à un Conquérant? La Capitale du Siftan fut prife, faccagée, & fes habitans paffés au fil de l'épée, fans distinction d'âge ni de fexe (2). Le Vainqueur fit encore quelques exploits dans les montagnes du Car

(1) Chériffeddin. J. C. 1383. Hégire 785.
(2) J. C. Décembre 1383. Hég. Chawal 785.

d

dahar, que des brigands avoient prises pour afyle, & il regagna Samarcande.

(1) Trois mois après fon arrivée, il repaffa dans le Mazendran, fur lequel l'ancien Roi Aly faifoit des tentatives. Mais une déroute complette prouva à ce Monarque détrôné la justice céde toujours à la force.

que

(2) Les Tartares portèrent enfuite leurs armes dans l'Irac-Ajémi, & quittèrent cette Province fans y avoir fait de grands progrès. Néanmoins leur Prince les ramena l'année fuivante (3) dans ces mêmes contrées. L'Azer baïjane fut la première Province foumife; & Tauris, la Capitale, fe racheta du fac. Après avoir paffé quelque temps dans cette nouvelle possession, les Vainqueurs, guidés par l'amour de la Religion, qui ordonne de faire la guerre aux Infidéles, fondirent fur la Georgie, habitée par des Chrétiens. Ceux-ci n'opposèrent

(1) Chériffeddin. J. C. 1384. Hégire 786. Age de Timour 48. Régne de Charles VI.

(2) J. C. 1385. Hégire 787.

(3) J. C. 1386. Hégire 788. Age de Timour so. Régue de Charles VI.

pas une longue résistance; & leur Roi, nommé Ipocrates, fut pris. Il étoit Chrétien; «& Timour, dit Cheriffeddin, lui communiqua » tant de lumières fur la Religion de Mohammed, que, par une grace toute particulière, » celle de la vocation entra dans l'esprit de » cet infidéle, encore tout rempli de ténébres; Ipocrates quitta l'erreur, & se fit » Mufulman ».

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Le Prince Tartare célébra ces dernières Victoires par une Chasse à la manière des Perfes; car la Géorgie, couverte de bois & de montagnes, est un pays très-propre à cet

exercice.

La défaite de Toctamich-khan, qui avoit eu l'ingratitude d'attaquer fon bienfaiteur, & quelques autres exploits moins confidérables, préludèrent à l'entrée de l'Emperereur dans l'Irac-Ajémi, & dans la Province de Fars, où régnoient les Mozafériens (1). Ces Princes avoient ofé jetter dans les fers un de fes Ambaffadeurs. Cet acte d'hoftilité fut pour excellent prétexte de leur déclarer la

hui un

guerre:

(1) J. C. 1387. Hégire 789.

1

il continua donc fa marche, & s'avanca fous les murs d'Ifphahan. Le Gouverneur de la Ville, fe voyant hors d'état de lui tenir tête, lui remit les clefs; & les habitans fe difpofoient à payer le prix du fang, lorfqu'un Forgeron, à la tête de la Populace, égorgea les Commiffaires établis pour recevoir les rançons, & près de trois mille Tartares. Timour, indigné de cette perfidie, jura d'en tirer vengeance. Il livra donc à la ville un affaut général. Ses foldats, efcaladant les murailles, entrèrent de tous côtés dans Ifphahan, & firent main-baffe fur les habitans. Dans leur fureur, ils n'épargnèrent que le quartier des Defcendans du Prophète, la rue des Docteurs de la Loi & la maison d'un grand Prédicateur, mort depuis un an. Animée par la vengeance, & encore plus par l'ardeur du butin, la foldatefque fe porta aux plus grandes extrémités. Il eft vrai que chaque Tartare avoit ordre de fournir un certain nombre de têtes. Suivant les regiftres du Divan on en ramaffa foixantedix mille, qui fervirent à élever des tours en différens endroits de la ville. Cette boucherie