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Le moyen de se perfectionner dans cette étude, est d'étudier les auteurs qui nous ont transmis là dessus leurs savantes recherches. On trouve sur - tout un grand nombre d'étymologies dans le fameux Dictionnaire de Ménage, qui a presque épuisé cette matière, il y a des choses extrêmement précieuses, et qui peuvent, à cet égard, donner de vastes connaissances. COURT DE GEBELIN nous a donné, dans son grand ouvrage du Monde primitif, plusieurs nomenclatures ETYMOLOGIQUES qui ne sont pas moins précieuses,

Il semble au cioyen Mayre. que l'analyse dans lesquels je crois avoir prouvé que se trouvent un adjectif et le verbe être ne présentent que des élé mens tronqués et factices. Il pense qu'un seul mot qui ne présenterait qu'un seul rapport, serait plus facile à entendre, et ainsi le mot frapper serait plus clair que ces deux élémens être frappant.

Je ne peux être de cet avis; il n'est pas vrai que le verbe ne présente qu'un seul rapport; il en présente deux, celui de l'affirmation, et celui d'une qualification déterminée. Une fois que les élèves auront reçu sur les idées, les premières leçons qui doivent précéder l'étude de la grammaire, ils sauront qu'il doit y avoir deux mots dans chaque verbe actif. A propos de cela, citoyens, il est bon de vous dire d'avance que je me propose, dans ma grammaire élémentaire, de faire précéder l'étude de la grammaire de quelques notions générales sur les idées, avant de conduire les enfans aux mots qui doivent servir à expliquer la grammaire élémentaire, car toutes nos grammaires supposent

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supposent déjà des idées reçues, des idées convenues; il faut donc (et ne vous effrayez pas du mot), il faut donc que chaque livre élémentaire de grammaire soit précédé d'un petit cours de métaphysique, c'est-àdire, qu'il faut tout simplement expliquer aux enfans les termes dont on doit se servir dans le cours de l'ouvrage; et pour leur expliquer les termes il faut leur expliquer les idées, car les mots ne seront pas entendus si les idées ne le sont pas. On leur aura appris à distinguer les objets et leurs qualités, ils sauront ce que c'est qu'une proposition, ils sauront de quoi elle se compose, et alors rien ne sera plus facile que la décomposition du verbe.

Il y aura donc à la tête de mon Livre élémentaire un chapitre spécialement consacré à faire entendre ce que c'est qu'une proposition et une phrase, et j'emploierai pour cela la manière la plus facile, la plus simple et la plus claire. Sans doute, citoyens, daas l'ancienne manière d'enseignement des langues, quand on ne s'occupait de faire entendre que les mots isolés, comme élémens de la parole, sans entrer dans la métaphysique des langues, sans unir la logique à la grammaire, il était plus court, et devait paraître plus facile, de ne rien décomposer, de tâcher seulement de comprendre quelques à - peu - près dans les mots. Quant à nous, nous nous occuperons moins des mots que des idées, et jamais des mots que par rapport aux idées, et comme signes des idées.

Je ne puis après cela renoncer à la manière analytique que j'ai adoptée, d'expliquer les verbes actifs. Le citoyen Ferrand, du district de ST. - GAUDENS, Débats. Tome II.

C

m'a écrit sur la définition que je donne du qualificatif. J'ajourne ma réponse à la prochaine séance.

Le citoyen Vanmeenen estime que la signification que je donne au mot penser à la suite du mot idée, est un peu hazardée. Tout ce qui tient aux opérations de l'entendement est trop, essentiel, pour passer légèrement sur les observations auxquelles ces opérations donnent lieu; en conséquence vous ne serez pas lâchés d'entendre la lecture de cette lettre, c'est la dernière que je vais lire.

Paris, le 28 Germinal l'an III de la République.

CITOYEN PROFESSEUR,

L'honnêteté avec laquelle vous répondez aux doutes de mes collègues, m'inspire la confiance de vous proposer les miens sur les objets intéressans dont vous nous avez occupés hier; les voici :

" Dans le tableau formé par votre élève, je vois le mot penser correspondre à idéer. Il faut vous l'avouer, je crois n'y point reconnaître votre exactitude ordinaire. Quand vous avez employé ce tableau pour élever votre sourd-muet aux idées abstraites, vous avez prétendu, sans doute, ne joindre à ces idées que les mots qui leur correspondent, dans la langue que vous lui enseignez : or, je crois qu'idéer, quoiqu'écrit deux fois, ne peut signifier penser. Une perception quelconque est présente à mon esprit, je me représente un objet sensible ou quelque notion intellectuelle ; j'idée j'idée, c'est-à-dire, j'ajoute un degré de vivacité à

la perception qui est présente à mon esprit, je m'efforce de retenir l'image de l'objet sensible, ou la notion intellectuelle qu'elle me trace; je crois appercevoir ici l'attention seule : il aurait donc été plus exact de dire qu'idéer idéer, signifie être attentif.

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"Mais non seulement le mot penser n'est point exact et ne peut être employé dans le sens que vous lui donnez, mais encore penser est un mot qui renferme toutes les opérations de l'esprit; l'usage com. mun, et le sens que lui attribuent tous les philosophes qui ont écrit sur l'entendement humain, nous en convainquent. C'est ainsi qu'après avoir compris toutes les opérations de l'esprit dans l'entendement, celles qui naissent du besoin, dans la volonté ;

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Condillac ajoute: Ces deux facultés, la volonté

" et l'entendement, se confondent dans une faculté plus générale, qu'on nomme la faculté de penser. 19 Mais penser, n'est point toujours être attentif; c'est aussi réfléchir, méditer, pénétrer.

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Daignez, citoyen professeur, employer envers moi la même bonté, la même patience que vous employez envers les sourds muets : comme je desire m'instruire, comme eux, je me fais un devoir de la docilité.

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J'ajouterai une réflexion sur la méthode qu'emploie MASSIEU pour exprimer par la voie de l'écriture ses pensées et celles des autres, j'ai remarqué, ainsi que plusieurs de mes collègues : qu'au moment de répondre à une question qu'on lui a proposéé, ou d'exprimer une action qui a été faite en sa présence, it emploie le langage des signes, ou plutôt son lan

gage naturel, pour se dire en quelque sorte à luimême ce qu'il doit écrire. Il démontre, je crois, la vérité que vous nous avez si bien développée, que nous ne pensons qu'autant que nous parlons; qu'en conséquence tout l'art de penser se réduit à une langue bien faite. Mais est-ce une preuve que nous ne pensons que dans notre langue maternelle? Je croirais plutôt que des deux langages qu'a MASSIEU, celui d'action et celui de l'écriture française, il emploie pour penser celui qui est en lui le plus facile celui qui obéit mieux à la rapidité avec laquelle il voudrait faire succéder les idées; dire que nous ne pensons qu'en notre langue maternelle, c'est dire qu'un français qui s'énonce en latin pense en français, et qu'il rend ce français en latin, formé d'après cette méthode.

"Pardonnez au desir que j'ai de m'instruire, la liberté que je prends d'interrompre vos importans travaux; et à la patience que vous avez eue de lire cette lettre, ajoutez celle de vouloir bien lever mes doutes sur une première observation, et de porter votre jugement sur la seconde. "

Salut et fraternité,

P. VANMEENEN, élève de l'Ecole normale.

Voici la réponse que je crois devoir faire à cette lettre; il s'agit de savoir si penser se compose d'idéer.

Je sais, citoyens, à cet égard que chaque métaphysicien a son langage; mais je vous ai dit que le

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