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dehors; mais je trouve que Moliere excite le rire au dedans & au dehors, fi on peut ufer de cette expreffion, & qu'il le fait avec bien plus de génie & bien plus d'efprit que ceux qui l'ont précede. Les Modernes en général ont mieux peint les paffions que les Anciens; leurs peintures font -plus détaillées & plus chargées & ces fortes de peintures ont enrichi le Théatre François d'un nombre confidérable de caractéres, & lui ont donné par-là l'avantage fur tous les autres, en fait de ridicule.

ARTICLE QUATRIE ME.

De l'Action & du Naud felon les

L

Anciens.

Es Anciens ont nommé ac

une

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tion, dans une Fable Tragique ou Comique un point prefque indivifible. Selon eux, un coup de poignard fait fou vent l'action de la Tragédie ; & celle de la Comédie ne consiste presque toujours qu'en quatre mots, que dit un Auteur pour confentir à une chofe à laquelle il a été contraire pendant toute la Piéce. A l'égard du noeud, il eft formé par les obstacles qui retardent l'action, foit que ces obftacles viennent des perfonnages mêmes, ou qu'ils foient produits par le feul hazard. Un Ouvrage parfait feroit celui qui réu

niroit fi bien le nœud & l'action, qu'elles ne fiffent ensemble qu'un même corps: tel eft le feul oedide Sophocle, modéle le plus excellent les Auteurs Tragiques puiffent choifir.

pe

que

que

L'action de cette Tragédie n'est la reconnoiffance d'Oedipe : on commence, dès la premiere Scéne, à faire des perquifitions pour découvrir le meurtrier de Laius: il n'eft question que de cela pendant tout le cours de la Piéce; & Oedipe trouve à la fin qu'il est tout à la fois fils de Laius, meurtrier de fon pere, & mari de fa mere; l'action de la Tragédie n'eft donc que la reconnoiffance d'Oedipe; & le noud de l'action ne fait qu'un même corps avec elle. C'est à cette union fi importante que l'on doit principalement s'attacher; car il fte indubitable que, malgré l'o

pinion

pinion contraire de quelques Modernes, l'action & le nœud font les objets les plus effentiels d'une Fable Dramatique.

Les Poëtes Comiques Grecs & Latins, ont tellement fenti la conféquence de cette union qu'ils ont toujours eu la plus grande attention à ne les pas feparer. Les Italiens du feifiéme fiécle ont auffi été très-exacts à les réunir; mais Moliere eft peutêtre celui de tous qui a porté le plus loin cette perfection. Aujourd'hui le nœud de l'action eft la partie la plus négligée; & certe négligence produit des Comédies, dont les unes reffemblent fi on ofe le dire, à un corps fans bras & fans jambes; & les autres, au défaut d'un corps, ont plu fieurs jambes & plufieurs bras. Dans la premiere efpéce, c'eft un fort beau dialogue, mais fans ac

K

tion; & dans la feconde, ce font des chofes étrangères, & tout-àfait épifodiques que l'on joint à l'action, mais qui ne font qu'embarraffer fa marche, & que rallentir fon mouvement. Je laiffe aux connoiffeurs à faire eux-mêmes l'application de ce que je viens de dire, & le foin d'en trouver des exemples.

I

ARTICLE CINQUIE'ME.

De l'Action double.

L s'eft gliffe parmi la plupart des Auteurs Dramatiques, à l'égard de l'action double, une erreur qui bleffe la vérité & le bon fens. Ariftote & les Anciens qui ont traité cette matiere nous ont donné pour premiere régle, que la Tragédie & la Comédie ne doivent avoir qu'une

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