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les Fables plus parfaites, fi le

noeud de l'action bien mefuré n'e, xigeoit, furtout dans une Comé die, d'autre tems, que celui que les Acteurs emploient à les repréfenter. Par-là on éviteroit les vuides du mouvement de l'action, aufquels le Spectateur ne pourroit pas même penser dans les entr'Actes.

Pour l'unité de lieu, je ne me ferois point un fcrupule de la vio ler, mais fans enfraindre les loix de la vraisemblance; & malgré tout ce qu'en difent les plus féveres partifans des régles, je ne eroi pas devoir m'impofer un joug qu'Ariftote n'impose point, & que le bon fens & la vraifem, blance femblent condamner. Il eft raisonnable, que dans l'efpace de douze ou de vingt-quatre heures, on ne puiffe pas tranfporter les Acteurs en un lieu fi

éloigné de celui où l'action a commencé, qu'à peine les douze ou les vingt-quatre heures fuffifent pour en faire le trajet. Mais auffi, il n'est pas contre la raifon de les faire changer de lieu, lorf qu'une demi-heure fuffit naturellement pour ce changement; & il ne me paroît pas jufte de facrifier, par trop de délicateffe & de fcrupule, les beautés que fourniroit le sujet à la faveur d'un fem-. blable changement. Ariftote, ni les autres Anciens, ne nous ont point demandé cette exactitude; & peut-être n'auroient-ils entendu autre chofe par unité de hieu, s'ils nous l'avoient prefcrite, que la même Ville, le même Camp, ou la même Maifon dans' laquelle a commencé l'action furtout fi les changemens de lieu étoient réglés avec prudence par l'unité de tems.

Moliere qui a mieux fenti cet te vérité que tous les Interprétes d'Ariftote, a fait des Comédies, où le lieu de l'action eft dans une Place, dans une Sale, ou devant une Maison ; & voilà l'exacte unité de lieu. Mais dans les Piéces où il a voulu faire des changemens, fans bleffer la vraisemblance, il a placé communément la Scéne dans Paris, dans la Ville de Tempe, dans Aftorgue Ville d'Espagne, dans Angoulême, dans Meffine, ou dans Naples; il a fait marcher avec toute la vraisemblance poffible, comme nous l'avons dit, fes Acteurs d'un lieu à un autre lieu de la même Ville. Ainfi je fuis perfuadé que fi Ariftote nous avoit expliqué lui-même fes Préceptes, nous verrions qu'il ne les a pas

entendus autrement, & que c'eft

fans doute par cette raifon qu'il

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n'a rien dit de positif fur l'unité
de lieu, lorsqu'il a établi pour
principes les deux autres unités
de tems & d'action. La conjura-
tion de Cinna tramée contre Au-
gufte dans le Cabinet même de
cet Empereur, eft une preuve des
inconveniens que produit la ré-
gle de l'unité de lieu prife à la ri-
gueur, & des fautes qu'elle fait
commettre aux plus grands hom-
mes contre la vérité : au lieu que
cette unité, telle
?
que Moliere l'a
entendue, fournit mille beautés
qui feroient perdues par une e-
xactitude fcrupuleufe. Au refte,
les Auteurs font les maîtres de
fuivre celui des deux partis qui
leur conviendra davantage; mais
'ils doivent auffi faire réflexion
que dans l'un ils rencontreront
de la fechereffe, fouvent le dé
faut de la vraifemblance, & mil-
le autres inconvéniens ; & que

dans l'autre au contraire ils trouveront avec l'abondance des idées, la vérité, la facilité, & la fource des moïens qui menent à la perfection. Le premier ne nous eft point impofé par Ariftote, & le fecond eft autorife par les éxemples que l'inimitable Molie re nous a laiffés.

ARTICLE SEPTIE'ME.

Du Caractére dans les Comédies
Gréques.

J'ai

'Ai dit dans le premier Livre de cet Ouvrage, que les Latins n'avoient point fait ufage des Caractéres, & qu'il ne nous reftoit aucun fragment des Comédies Gréques, qui pût nous faire connoître que leurs Poëtes les euffent emploïés fur leurs Théatres je penfe néanmoins

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