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principal ou acceffoire : la fympathie & l'amitié font des caractéres acceffoires à l'amour, comme le foupçon & la défiance sont acceffoires à la jaloufie; or tous ces degrés de caractére, & autres femblables, ne fçauroient fournir une matiere qui convienne à la Comédie. D'ailleurs une partie des caractéres que j'ai appellés ceffoires, peuvent quelquefois n'être pas propres à former un caractére theatral, parce qu'au lieu d'être une paffion ou un vice dans la focieté, ils y font regardés comme une vertu, ou comme un mérite: tels font, par exemple, l'économie à l'égard de l'avarice, & l'amitié par rapport à l'amour. Ainfi ce que j'ai dit ne doit s'appliquer qu'à ceux des caractéres acceffoires qui font des défauts dans la focieté, comme le foupçon & la défiance, & non pas à la

pathie, ni à l'amitié. D'où on peut conclure que les paffions & les vices conviennent davantage au Théatre, puifqu'en donnant le moïen de corriger les mœurs, ils nous préfentent encore les ridicules de ces paffions.

de trai

ter les ca

Il ne fuffit pas d'avoir choifi Maniere un caractére convenable, il s'agit encore de le bien traiter. Pour ractéres. y réüffir, il eft, je crois, néceffaire de ne lui en opposer aucun autre qui foit capable de partager l'interêt & l'attention du Spectateur. Nous en avons une preuve récente dans une Comédie repréfentée depuis peu fur le Théatre François, & compofée par un Auteur dont le mérite eft généralement reconnu ; un des perfonnages de cette Comédie dont le caractère eft brufque & familier, s'attira l'attention des Spectateurs, & enleva au carac

tére principal les fuffrages & les applaudiffemens qu'on lui avoit donnés avec raifon au commencement de la Piéee. Le caractére dominant de la Fable fut obligé de céder, & les plaifanteries groffieres du Financier éclipferent prefqu'entierement les traits fins & délicats du Glorieux:dès ce moment, le principal objet de la Piéce en devint, pour ainsi dire, un Episode, & ce caractére imaginé pour fervir feulement de contrafte au Glorieux, l'emporta tellement, & fut fi bien reçû du Public, que la Piéce lui eft pref que redevable du brillant fuccès qu'elle a eu.

Je ne prétens pas cependant exclure tous les caractères d'une moienne force, & en blâmer la liaifon avec le caractère principal; mais je prétens feulement dire que celui-ci doit tellement

dominer & prévaloir fur les autres, que le Spectateur ne foit jamais entraîné par l'effet ou l'action qu'ils peuvent produire à fon préjudice.

tére mix

De tout ce que je viens de di- Comédie re, on ne doit point conclure de caracque l'on ne puiffe pas faire des Comédies de caractére mixte; les Fables de ce genre différent beau

coup de celles que l'on appelle

te.

cette Co

fimplement Piéces de caractéres, comme nous l'expliquerons dans la fuite. La Comédie de caractére mixte doit être regardée fous deux faces très-différentes. Pre- Deux efmierement, le Poëte peut quel- péces de quefois fe fervir d'un caractére médie, principal, en faire même l'objet de fa Fable, & lui affocier d'autres caractéres, pour ainfi dire, fubalternes, fans que l'action en devienne plus chargée & plus intriguée. Secondement, il peut

Exemple

miere ef

joindre ensemble plufieurs carac téres des deux efpeces que nous avons marquées, fans donner à aucun d'eux affez de force pour le faire dominer & briller au-deffus des autres.

tres,

Moliere dans le Misantrope; de la pre- fournit un exemple de la premiepéce. re façon de confiderer la Comédie de caractére mixte. Il fait du Mifantrope le principal objet de fa Fable, & y joint en même tems les caractéres de la Coquette, de la Médifante, & des Petits-Maîfans que le caractére principal faffe par lui-même l'intrigue de l'action. Il eft vrai qu'il y a peu d'intrigue dans la Piece; mais il n'eft pas moins vrai que tous les caractéres qui environnent le Mifantrope, & tout ce qui arrive dans l'action fe rapporte à lui. Le Sonnet, le Procès, les converfations de la Coquette, les propos

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