difficulté de parvenir au fublime dans les furprifes, ou coups de Théatre, foit d'action, foit de pensée.

ARTICLE SEPTIE'ME.

L

Du Comique.

E feul Comique auquel les Poëtes doivent s'attacher, eft le Comique qui prend fa fource dans les chofes mêmes ; le Co- Comique mique doit naître de la fituation de fitua

tion.

des perfonnages. Un Comique de
penfée qui naît de la converfa-
tion, & qui par conféquent ne
tient point à l'action, quelque
bon qu'il puiffe être en lui-mê-
me, ne convient point au Théa-
tre; je ne prétend pas néanmoins
exclure ni les bons mots, ni les
faillies, mais il ne faut pas en fai-
re la bafe du Comique; la Co-o
Ď iiij

médie admet toute espèce de Co-
mique en général, mais elle adop-
te par préférence celui qui naît
de l'action même, ou des fitua-
tions : & fi elle ne rejette pas tou-
jours les plaifanteries étrangeres,
elle ne fouffre pas du moins que
ces fortes de plaifanteries ufurpent
fes droits, & s'emparent de la
Scéne.

:

Un Auteur qui dreffe le plan de fa Fable, de maniere que le Comique réfulte du fonds de l'ac tion, n'a befoin, pour jetter du plaifant dans fon dialogue, ni de faillies, ni dé gentilleffes les penfées les plus fimples, & les expreffions les plus naturelles -produiront cet effet, parce que la fituation fera Comique par elle-même. Quel efprit, quelle fiExemple neffe d'expreffion y a-t'il, par de Comi- exemple, dans la replique de tuation. George-Dandin, lorfqu'outré de

que de fi

ce que M. de Sotenville, après bien des remontrances, lui dit : Vous ne devez point dire ma femme, quand vous parlez de notre fille George-Dandin répond

J'enrage? Comment ma femme n'eft point ma femme ? Ce n'est donc que la fituation où il fe trouve d'avoir été déja repris pour n'avoir pas appeilé Madame fa bellemere, & fa femme, & d'être obligé à tenir fon bonet à la main. quand il leur parle; ce n'eft done que cette fituation, dis-je,& l'impoffibilité de répondre autrement qui ont produit fa réponse; comme fa fituation eft extremé ment Comique, la pensée & l'expreffion toutes fimples qu'elles font par elles-mêmes, devien nent également Comiques.

Il en eft de même lorfque la Suivante d'Angélique, prenant le parti de fa Maitreffe en préfence

de Monfieur & de Madame de Sotenville, George-Dandin lui dit : Taifez-vous vous dis-je vous pourriez bien porter la folle enchère de tous les autres, & vous n'avez point de pere Gentilhomme. Ces paroles détachées de ce qui les précéde, ne font pas capables de faire rire, mais dans la fituation où eft George-Dandin de n'avoir pas la fatisfaction de pouvoir donner à fa femme quelques coups de poing, ou quelques bons foufAlets, comme il vient de le dire, parce qu'elle eft fille d'un Gentilhomme, qui le tient en refpect; dans cette fituation, le difcours de la Suivante lui rappelle la contrainte où il eft, & la fimple pensée ou réponse, Vous n'avez point de pere Gentilhomme, devient d'un Comique admirable, parce qu'il eft pris de la cho

fe même.

Il eft bon d'obferver que dans cette même Scéne il y a des traits Comiques qui font infiniment fupérieurs à ceux que j'ai rapportés; ce n'eft pas que je ne les aie fentis, mais je n'ai voulu parler que de ceux qui font Comiques dans la fituation, & dans lesquels la fimplicité de l'expreffion fait cependant fon effet, parce qu'el le eft foutenue de la fituation feu le, qui comme je me flatte de l'avoir démontré, rend Comique ce qui fans elle ne pourroit jamais le devenir. Pour rendre la chofe plus fenfible, je donnerar un exemple d'un trait Comique dans la même Scéne, où l'on trouvera quelque chofe de plus que la fituation toute fimple. Lorfque George-Dandin s'eft expliqué, & qu'il a dit enfin à M. & Madame de Sotenville, que fille ne vit pas comme il faut qu'u

1

leur